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Mahdi et Sekou (Episode 1): la longue route jusqu’à Pau
Sekou Cherif et Mahdi Hussaini, font partie de la quarantaine de salariés du GEIQ BTP 64 dont l’objet est l’insertion professionnelle des demandeurs d’emploi dans le BTP en Béarn et Soule. Deux réfugiés sur le chemin de l'insertion.
Sekou et MahdiSolène MÉRIC | Aqui

Courageux et motivés, Sekou Cherif et Mahdi Hussaini sont deux exemples de réussite en cours de l'insertion de réfugiés par le travail.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 20/10/2023 PAR Solène MÉRIC

L’un est né Afghan, l’autre Ivoirien. Ils ont chacun quitté leur pays d’origine, petit enfant pour l’un, jeune adolescent pour l’autre. En France depuis 5 et 2 ans, le chemin a été long, avant de trouver une stabilité, un bien-être et une forme de confiance en l’avenir. Si le GEIQ (Groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification) BTP 64 est loin d’être étranger à cet apaisement, en leur donnant les armes pour s’insérer professionnellement, c’est avant tout à leur courage et à leur détermination que ces deux hommes aux parcours malheureusement trop ordinaires dans l’extraordinaire voient leur avenir s’éclaircir enfin.

Mahdi Hussaini, l’éternel étranger

Mahdi Hussaini a les yeux rieurs et finalement, le sourire facile. Il a presque toute sa vie pourtant été un migrant. Il avait « entre 5 et 7 ans » quand il a quitté son pays d’origine, l’Afghanistan, avec sa tante.  Quelque part entre l’arrivée des Talibans au pouvoir et les bombardements américains à la recherche déjà d’un certain Ben Laden. Direction l’Iran où des amis sont déjà sur place. Pour vivre, dès l’enfance, il vend dans la rue des foulards pour les femmes. Puis à 17 ans, il travaille durant 5 ans dans le coffrage et le banche. « Ça me permettait d’avoir aussi un peu d’argent à donner à ma famille ». Enfin, rebondissement de la vie, il devient tailleur de pierre. « Mais là-bas, en Iran, on reste toujours un étranger. On a un récépissé qui est renouvelé mais on n’est jamais vraiment accepté pour rester. Ça ne donne aucun droit à une vie normale. En 2013, 2014, beaucoup de gens que je connaissais partaient en Europe, c’était facile ».

Passé le cap de ses 20 ans, il se décide lui aussi à partir, ou plus exactement, à repartir. L’opportunité qu’il saisit l’amène en Suède. Il y restera trois ans. « J’ai appris la langue, j’ai travaillé dans un magasin de chasse et de pêche, mais au bout de tout ce temps et malgré mes efforts pour m’intégrer, la Suède n’a pas voulu me donner de papiers ». Alors pour « pouvoir progresser dans la vie » et espérer avoir des droits, il choisit la France dont ses amis lui disent du bien.

En fait, je n’ai pas l’impression d’être en France, mais je suis comme dans mon pays.

« Et c’était vrai ! lâche-t-il dans un sourire de soulagement. Ici les gens sont bien, ils nous accueillent et sont respectueux. J’ai rencontré beaucoup de gens pour m’aider. En fait, je n’ai pas l’impression d’être en France, mais je suis comme dans mon pays. ». Heureuse preuve que la France n’a pas encore tout perdu de ses principes universalistes et humanistes. Mahdi garde en effet un très mauvais souvenir de son expérience suédoise : « Si un étranger est assis dans un bus, les gens ne viendront jamais s’assoir à côté de lui, ils préfèreront rester debout. » Autre atout de la France qu’il glisse dans un autre sourire : la météo, et ses « 4 saisons bien marquées, comme en Afghanistan ».

Toute accueillante que soit la France, les débuts ne sont pour autant pas faciles pour Mahdi. Arrivé à Paris, il reste 3 mois à la rue avant que l’OFII ne le repère et l’oriente vers Pau, et le centre d’accueil du Prahada (programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile) Adoma. « Ils m’ont pris en charge, m’ont fourni un toit, un peu d’argent, et m’ont aidé dans mon projet professionnel. C’est là que les choses ont bien tourné pour moi », glisse-t-il reconnaissant.

Sekou Cherif, le courageux 

Sekou Cherif, 22 ans, est lui aussi reconnaissant, mais il sait aussi ce qu’il doit à lui-même. Sa vie a basculé en 2010. Cette année là, en Côte d’Ivoire, la victoire d’Alassane Ouattara, contestée par le président sortant Laurent Gbagbo a engendré plusieurs mois de violences et 3 000 morts dans les deux camps. Parmi eux, le père de Sekou, alors âgé de 9 ans. Un décès qui a bouleversé sa vie future.

« Ma mère s’est retrouvée seule avec cinq enfants qu’elle ne pouvait pas assumer. » Sekou, avec pudeur, décrit des moments « très difficiles », des loyers qui ne pouvaient pas être payés, « l’obligation de sortir pour aller chercher de quoi manger, ou ramener un peu d’argent, des jours où l’on ne mangeait pas ». Une enfance qui n’en était pas une, et qui vous fait comprendre très tôt qu’il faudra se battre et être courageux. Si tôt, qu’à 15 ans, il part avec « deux amis du quartier » pour le Maroc.

J’ai tout fait pour arriver en France en 2021, quel que soit ce que ça allait me couter

« A pied ou en autostop. On a du passer par l’Algérie pour rejoindre Oujda.»  Après une semaine à dormir devant la gare, puis un court hébergement chez un habitant, « un homme m’a embauché dans son entreprise à Marrakech avec une petite chambre pour dormir. Je faisais de l’électricité, du câblage ». Une forme d’exploitation en vérité du tout jeune homme qu’il était. « J’avais 150 euros par mois, ça me permettait de tenir la moitié du mois pour manger. Après c’était difficile ». Sans compter l’agressivité et le racisme ambiant. A ça aussi, il a fallu savoir faire face sans broncher.

Son but c’était de « travailler pour vivre, travailler pour manger, et c’est tout ». Il y est resté cinq longues années. « En 2021, j’ai tout fait pour arriver en France, quel que soit ce que ça allait me couter ». Le ton est encore plein de détermination. Son histoire rejoint alors celles de centaines de milliers d’autres. C’est à bord d’un Zodiac chargé d’une cinquantaine de personnes qu’il débarque sur l’île espagnole de Ténérife. Là, les autorités l’envoient à Madrid, d’où il décide de rejoindre la France, et Pau. Sa copine, partie avant lui du Maroc où ils se sont rencontrés, l’y attend. De la même manière que Mahdi quelques années auparavant, c’est le Prahada Adoma de Pau qui l’accueille et l’accompagne alors dans ses premiers pas palois.


Retrouvez la suite du parcours de Mahdi Hussaini et Sekou Cherif sur Aqui : Mahdi et Sekou (Episode 2): au travail pour l’insertion . Au programme, les étapes de leurs intégrations en cours et leurs espoirs et projets en France.

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