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Maryne Durieupeyroux, l’hypnose pour s’évader de la maladie
Maryne Durieupeyroux est infirmière à l’Institut Bergonié auprès d'adolescents. En pratiquant l'hypnose à l'hôpital elle leur permet d'alléger douleurs et angoisses. Le résultat d'une ténacité sans faille au service du bien-être de ses patients.
Maryne Durieupeyroux devant l'institut Bergonié à BordeauxFondation Bergonié

Maryne Durieupeyroux, vise avec son projet Hypno AJA à démontrer que l’hypnose en service de médecine a un impact bénéfique sur l'anxiété, mais aussi la douleur et les autres symptômes subis par les adolescents et jeunes adultes traités pour un cancer.

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 16/02/2024 PAR Solène MÉRIC

Maryne Durieupeyroux 33 ans, est la créatrice et la cheville ouvrière, du projet Hypno AJA, Hypnose pour les adolescents et jeunes adultes. Infirmière à l’Institut Bergonié depuis 10 ans, elle fait entrer l’hypnose dans le parcours de soin de ses jeunes patients en cancérologie, tout en apportant la preuve des bienfaits de cette pratique sur leur état physique et psychologique. Son « but ultime » : que « l’hypnose soit reconnue comme soins de support en cancérologie, au même titre que l’on peut faire appel à une psychologue, une kiné ou une socio-esthéticienne ».

Depuis le 4 février, journée mondiale de lutte contre le cancer, son projet est mis à l’honneur par la Fondation Bergonié, fondation d’entreprises qui mobilise le mécénat en faveur des patients atteints d’un cancer. Une satisfaction pour la jeune femme car le parcours accompli vers cette reconnaissance a demandé une bonne dose d’opiniâtreté.

Après ce que je venais de constater de mes propres yeux, ce n’était pas possible pour moi de ne pas approfondir le sujet de l’hypnose !

Il faut dire que Maryne, sportive et énergique, est une femme de défi. Quand certains fuient face à leurs peurs, elle, à l’inverse, choisit de les affronter. « Phobique de l’hôpital » avant d’entrer en école d’infirmière, c’est bien sa « peur » qui l’a guidée dans son choix de travailler en cancérologie, tout comme dans celui de choisir le service de médecine conventionnelle de l’Institut Bergonié, qui compte alors des lits dédiés pour les adolescents et les jeunes adultes. « Je me suis dit que ça ne devait pas être évident mais, ça devait être très intéressant de travailler avec eux ». Des jeunes pris en charge notamment pour des sarcomes, maladie extrêmement rare dont l’Institut Bergonié est centre expert au niveau régional. 

Son déclic pour l’hypnose en 2017, n’est pas prémédité. « Après une chirurgie liée à son sarcome, une de nos jeunes patientes refusait catégoriquement qu’on la touche pour un soin qu’il nous fallait pourtant faire. Une de mes collègues lui a proposé de procéder sous hypnose, raconte-t-elle. La séance démarre et le soin se fait rapidement et de manière très qualitative, sans aucune douleur. » La patiente ne réalise pas qu’elle est en train d’être soignée. Maryne est impressionnée. « Après ce que je venais de constater de mes propres yeux, ce n’était pas possible pour moi de ne pas approfondir le sujet ! »

Une conviction profonde et tenace

L’infirmière fait alors « des pieds et des mains » pour pouvoir se former. D’abord sur les fondamentaux de l’hypnose. Puis passionnée et convaincue, elle poursuit malgré quelques embûches, en s’inscrivant au Diplôme Inter Universitaire « Hypnose » à la faculté de médecine à Bordeaux. Mais quand il s’agit de mettre en pratique ses connaissances durant son service, elle mesure vite les limites de ce projet. Difficile d’assurer les soins et les prises en charges tout en accordant le temps nécessaire aux patients volontaires à l’hypnose.

Déterminée à pratiquer, son ambition prend alors une autre envergure. Puisqu’elle ne peut pas cumuler à la fois son travail d’infirmière et sa spécialisation en hypnose, et que l’Institut n’a pas les budgets pour financer deux postes distincts, elle crée et finance son propre poste, en créant son projet Hypno AJA qu’elle présente à l’appel à projet de la Fondation Bergonié. « Un exercice très complexe quand ce n’est pas du tout votre métier », pas de quoi décourager la pugnace Maryne qui, avec quelques appuis, réussit le tour de force.

Animée de sa conviction profonde et tenace, elle convainc le comité scientifique de la Fondation, qui la retient parmi les lauréats de l’année 2020, juste avant qu’elle ne donne naissance à son enfant. Une fois son congé maternité terminé elle se lance, en 2021 dans la mise en œuvre pratique de son projet.

De l’hypnose, une cure sur deux, lors de l’hospitalisation

Hypno AJA consiste donc à proposer de l’hypnose à l’Institut Bergonié, « auprès d’une population avec des critères bien précis », explique-t-elle. Des patients entre 15 et 30 ans, « qui viennent d’être diagnostiqués pour un sarcome et vont bénéficier d’une chimiothérapie pourvoyeuse de nausées importantes ». Maryne leur propose de l’hypnose, une cure sur deux, lors de leur hospitalisation, « sur toute la durée de leur parcours de chimio ».

Maryne Durieupeyroux Fondation Bergonié

Une des spécificités de la pratique de Maryne Durieupeyroux est de faire entrer l’hypnose en service de médecine pour soulager les patients

Une intervention en milieu hospitalier au moment du soin qui « est vraiment innovante. Habituellement l’hypnose c’est selon la volonté de chacun et à l’extérieur, pas dans le cadre du service de médecine ». Sentant tout le potentiel de sa démarche, elle accompagne ce projet par la réalisation d’une véritable étude clinique. Un travail monstre. Mais le jeu en vaut la chandelle, il s’agit de démontrer « l’impact de l’hypnose sur la gestion et l’amoindrissement de l’anxiété, des nausées et vomissements, de la douleur, et sur la modification du schéma corporel avec tous les effets indésirables que la chimio amène comme l’alopécie (perte des cheveux) ».

Il y a moins d’anti-nauséeux, moins d’anxiolytiques, lorsqu’il y a hypnose… Il n’y a pas une échelle d’anxiété qui n’est pas en diminution

Formée à Excel sur ces temps de repos, elle a durant deux ans, noté, calculé, répertorié l’ensemble de ces paramètres, avec et sans hypnose, pour chacun des patients suivis. Une initiative, sans financement dédié, dont elle peut être fière. Les résultats intermédiaires vont bel et bien dans le sens de son objectif : « il y a moins d’anti nauséeux, moins d’anxiolytiques, lorsqu’il y a hypnose… Il n’y a pas une échelle d’anxiété (qui va de 0 à 10) qui n’est pas en diminution avant et après une séance, et ce dans tous les parcours complet de tous les adolescents inclus dans l’étude », appui-t-elle avec satisfaction.

Soucieuse de communiquer sur ces premiers résultats encourageants, elle réalise aussi des posters présentés lors conventions nationales et internationales, avec la complicité d’une médecin grenobloise, acquise à sa cause. Des médecins australiens aussi soulignent toute la pertinence du projet qui n’était jusque-là l’objet d’aucune publication. 

Le pari de la pérennisation

Un travail précieux et une implication « à 120% » à nouveau reconnu par la Fondation Bergonié qui lui permet depuis le 1er janvier 2023 de prolonger deux ans de plus sa pratique. Désormais, elle a aussi à ses côtés une équipe d’appui pour la partie recherche clinique. Alors, jeu, set et match pour Maryne qui ne garde son équilibre que par une pratique intense du tennis ? Pas tout à fait, car malgré sa fierté du chemin parcouru, un challenge de taille l’attend encore : pérenniser l’existence d’Hypno AJA.

« Les financements via les appels d’offres, ça ne durent que deux ans, sans avoir la certitude de pouvoir poursuivre » explique-t-elle. La levée de fonds par la voie du mécénat pourrait être une piste de pérennisation, c’est bien l’objet de l’opération qui est actuellement menée par la Fondation Bergonié au profit d’Hypno AJA. Maryne bien sûr a un peu peur quant à la pérennité du projet… mais c’est sans aucun doute ce qui continue de la faire avancer, sans oublier les témoignages, « parfois émouvants » , de ses patients sur le mieux-être que sa pratique de l’hypnose leur apporte au quotidien. Sans aucun doute, la plus belle des motivations.

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