L’Actualité du Roman : Regarde moi


Antonio Ungar : Regarde-moi (Mirame- traduit par Robert Amutio)- Éditions Noir sur blanc Notab/lia-211 pages- Janvier 2022- 17,5 €-

Antonio Ungar : Regarde-moi (Mirame- traduit par Robert Amutio)- Éditions Noir sur blanc Notab/lia-211 pages- Janvier 2022- 17,5 €-La Machine à lire

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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 23/02/2022 PAR Bernard Daguerrer

Le roman a la forme d’un journal de bord, écrit par un solitaire insomniaque, voyeur, cumulant sur sa personne un condensé des plus mauvaises ondes, dans la détestation des autres -surtout quand ils sont étrangers- en même temps que de lui-même.

Une vie vraiment étriquée dont la fascination aux yeux du lecteur pourrait se présenter comme le symétrique inversé de l’hypothétique attrait, pour le narrateur, de sa propre existence. Elle a pourtant pour lui deux avantages : d’abord de le conforter dans la dévotion portée à l’image de sa sœur aînée, Eva, décédée ; elle est pareille à une divinité privée- déesse lare d’un quotidien terne, qui veille sur lui, au-delà de la mort ; il conserve d’elle, dans une espèce de châsse, rognures d’ongles et ses ultimes achats de vêtements.

Sa réclusion volontaire a un autre attrait : celui de lui donner toute latitude pour espionner avec une avidité gloutonne et infinie une adolescente, Irina, dont l’appartement est situé en face du sien. On comprend bien que l’existence sous cette double et malsaine présence-absence féminine ne permet guère l’épanouissement de notre héros. D’autant que la jeune Irina accroît son malaise existentiel : il sait qu’elle est d’origine étrangère et se persuade qu’elle est maintenue quasiment prisonnière par son père et ses frères, d’affreux Uruguayens. La paranoïa xénophobe du narrateur est cernée par son environnement, c’est pour lui une évidence : le pharmacien qui lui délivre des médicaments consommés en abondance est Pakistanais, l’épicière roumaine qui le fournit en denrées alimentaires l’informe avec luxe de détails sur l’environnement de sa jolie et convoitée voisine… Comment concilier ses principes racistes avec l’attirance pour Irina, si jeune et si sensuelle ?

On ne révèlera pas l’issue de ce récit qui prend très vite la forme d’un thriller ; contentons-nous d’en donner quelques indices sombrement baroques, comme une cruelle et dérisoire litanie. D’abord l’attachement à son pays, à cette « vieille république », le mot revient plusieurs fois dans son journal jusqu’à ce que nous en soit révélé le nom… Et pour accompagner cet hommage, dans un lyrisme de pacotille à la Barrès, il aime à évoquer « les fertiles terres » et « les vastes campagnes » de sa patrie. Il a même acheté une ferme dans laquelle il se ressource, conjuguant travaux des champs et une grande œuvre mystérieuse… L’amour pour Irina, cette pulsion de vie pourrait-elle bouleverser sa trajectoire de vie ? Au fond, ce court roman noir, il faut le déguster à la manière d’une potion amère et délicieuse, comme un contre-poison aux errements d’une actualité bien hexagonale.


Antonio Ungar : Regarde-moi (Mirame- traduit par Robert Amutio)- Éditions Noir sur blanc Notab/lia-211 pages- Janvier 2022- 17,5 €-

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