Entre marché et transition: Euralis prêt « à sortir du cadre »


Le groupe coopératif Euralis a traversé la campagne 2022-2023 dans un contexte d’instabilité globale entre sécheresses exceptionnelles, influenza aviaire, conflit en Ukraine et inflation persistante... Ses boussoles ? Les transitions et le marché.

Christophe Congues, président de la coopérative Euralis et Philippe Saux, Directeur généralEuralis

Christophe Congues, président de la coopérative Euralis et Philippe Saux, Directeur général

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 18/12/2023 PAR Solène MÉRIC

Avec un chiffre d’affaires d’1,58 Mds € en recul de 3,6 %, mais avec une performance économique en progression de 9 M€, portant son bénéfice net avant impôt à 91 M€, le groupe coopératif béarnais ne s’en sort pas si mal. Une performance au rendez-vous, grâce à la stratégie mise en œuvre il y a 3 ans « qui commence à avoir ses effets » selon Christophe Congues, président du groupe. Une stratégie « au service d’une agriculture responsable et d’une alimentation saine et durable, le tout en s’appuyant sur le développement de solutions, et de produits innovants ».

Innovation et adaptation au climat

L’innovation, voilà une donnée que le président et son directeur général, Philippe Saux, mettent volontiers en avant. « C’est le moteur de nos transitions ; presque la moitié de l’EBIDTA (indicateur de bénéfice avant impôts) est investi dans la recherche et le développement », soit 42 M€ sur l’exercice achevé au 31 août 2023. Des investissements massivement portés, pour 35 M€, par la filiale semence de la coopérative, Lidéa, et son activité de création de variétés nouvelles, « mieux adaptées au changement climatique, et à ses conséquences ». Indispensable aussi à une activité à l’international qui ne cesse, malgré la conjoncture, de gagner du terrain.

schéma résultat euralisEuralis

Les résultats financiers d’Euralis pour l’exercice 2022-2023

Mais, la R&D a aussi sa place au sein des activités agroalimentaires d’Euralis avec la création de nouvelles formules et recettes pour ses marques Montfort ou Rougier. Un pan de ce bloc d’investissement est également consacré à l’expérimentation dans les exploitations agricoles,  pour le développement de nouvelles cultures et pratiques toujours plus vertueuses.

Avant, on produisait pour vendre. Dorénavant on va à la rencontre du marché 

Pilier de cette diversification des cultures, et du déploiement de nouvelles pratiques, la stratégie de contractualisation de productions végétales avec l’aval, continue de se déployer, avec une croissance de 9% des filières concernées. Légumes, semences, maïs spéciaux, kiwis… Ce développement de nouvelles filières est issu d’un « changement de paradigme dans la coopérative », reconnaît Christophe Congues. « Avant, on produisait pour vendre. Dorénavant on va à la rencontre du marché et on crée des cahiers des charges qui correspondent aux attentes des clients et aux attentes sociétales pour produire.  40 % de notre sol était contractualisé il y a 3 ans, on est à 60 % aujourd’hui. Notre objectif est d’arriver à 70 % en 2025 et de devenir « la coop des contractuels » », révèle-t-il.

Le succès de l’année, c’est la filière des légumes secs. « Les hectares de production de pois chiches, lentilles et haricots rouges vont encore doubler sur cette campagne », annonce Philippe Saux. Passé de 600 ha à 1300 ha l’an dernier, l’objectif à 2025 est d’atteindre les 6500 ha. Un essor qui s’appuie sur un partenaire de poids : « Bonduelle, qui recentre son approvisionnement sur la France ». Au-delà de la relocalisation, « c’est aussi une question de modes de production », signale-t-il rappelant que Bonduelle s’inscrit dans une démarche de certification B corp, indispensable au statut « d’entreprise à impact ».

La stratégie du conseil

En d’autres termes, le pari gagnant des cultures contractualisées, outre la diversification des productions et la sécurisation du revenu des agriculteurs, vient aussi confirmer pour Philippe Saux, que le choix du conseil mis en œuvre par la coopérative, il y a 3 ans, était le bon. Sur les conseils à l’exploitation, ce sont 1700 agriculteurs qui sont suivis, « 80 % de notre production ». 2 300 prestations de conseil agronomique ou stratégique ont été réalisées cette année. Par ailleurs, 730 agriculteurs ont engagé une démarche environnementale de type Hve 3, Bio, agriculture régénératrice… Pour ce faire, la coopérative a formé en masse ses collaborateurs.

Mais si Euralis se veut à l’écoute du marché pour les mises en production, le même marché dicte parfois ses lois contradictoires sur les réussites et les échecs commerciaux du groupe coopératif. Parmi les succès : La Table des producteurs qui valorise les productions en circuit court de quelque 500 adhérents (en hausse de +6 %).

Dans les déconvenues : l’activité traiteur Stevalen qui, la faute à l’inflation et la recherche d’économies des consommateurs sur leurs dépenses alimentaires, marque un recul important par rapport à l’exercice précédent. Philippe Saux rassure : « Des mesures ont déjà été prises, pour proposer des produits plus en phase avec les besoins actuels des consommateurs et assurer une maîtrise de coûts ».

Bio et Label rouge, « Sortir du cadre »

Partir des marchés, c’est aussi parfois tenir un discours, politiquement incorrect. Christophe Congues s’y risque pointant le « dogme idéologique » qui a guidé le développement du bio. « En surproduction aujourd’hui et plus encore demain, nous avons ces marchandises sur les bras. Nous avons embarqué les agriculteurs dans une mauvaise direction, et on doit l’assumer », lâche-t-il avant d’estimer un taux de déconversion attendu de 20 à 30 %.

Et le discours, n’est pas plus tendre concernant le poulet Label rouge, consommé par 15 à 20% des français. Sur cette activité, le président d’Euralis assume que sa coopérative réfléchisse à « un modèle qui va un peu sortir du cadre. On a une vocation nourricière, on se doit alors de produire un poulet d’ici pour les gens d’ici sinon, ils ne mangeront que de l’ukrainien ou du brésilien. Un poulet qui court c’est mignon, tout le monde le veut, mais personne ne le paye ! » Bien conscient de l’enjeu sur l’acceptabilité territoriale de ses propos (voire plus) la réflexion sur une nouvelle filière ou l’adaptation de bâtiments existant est en cours.

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