Soulagé par le vaccin, le foie gras relève le bec


La filière foie gras respire après une fin d’année encourageante en matière de consommation et surtout une campagne de vaccination qui permet d’oublier les mauvais souvenirs de grippe aviaire à répétition. Il faut encore convaincre à l'exportation.

Le ministre Marc Fesneau regarde la vaccination des canetonsMinistère de l'agriculture

Le 2 octobre dernier, le ministre de l'agriculture Marc Fesneau, assiste à la première vaccination de canetons chez le président du Cifog, le Landais Eric Dumas.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 26/03/2024 PAR Cyrille Pitois

Le président du comité interprofessionnel des palmipèdes et du foie gras, le Landais d’Horsarrieu, Eric Dumas ne cherche pas à dissimuler une pointe d’enthousiasme. «Nous mettions beaucoup d’espoirs dans la vaccination. Eh bien, c’est aujourd’hui concrétisé ! Le redémarrage de la production va nous donner de la visibilité.»

Marie Laborde ingénieure en charge du suivi de la production au Cifog, évoque le bout du tunnel. « La succession d’épizooties notamment entre 2020 et 2023 a eu des conséquences dramatiques et a traumatisé la filière. La production mais aussi les élevages de reproducteurs notamment en Pays de la Loire ont été fortement touchés. Nous avons eu peur d’une disparition réelle de l’espèce sur la planète puisque la production de canetons est 100 % française. »

La campagne de vaccination longtemps souhaitée par le monde de l’élevage a permis un spectaculaire changement d’ambiance. « C’était juste l’outil qui nous manquait pour rendre efficaces les autres mesures de gestion, » selon Marie Laborde.

Moins de mises à l’abri

Le 2 octobre 2023 a donc commencé la campagne de vaccination, une première mondiale, qui a permis de conserver une partie des débouchés à l’exportation grâce un plan de surveillance qui accompagne cette vaccination massive. « Les prélèvements mensuels ou hebdomadaires effectués par les vétérinaires dans les élevages sont le moyen de rassurer le monde entier pour éviter de passer à côté d’un début de contamination et des abattages massifs. »

24 millions de canards sont déjà vaccinés depuis six mois, pour un objectif de 64 millions en un an. Avec les mesures de dédensification et de réduction de la production, l’abaissement du niveau de risque influenza aviaire est avéré : la dernière contamination remonte au 16 janvier. A ce jour, 10 foyers sont recensés sur le territoire contre 402 à la même date l’an dernier !

Des résultats qui ont permis à l’État d’alléger les mises à l’abri. Une vaccination encourageante qui a aussi un coût : 100 millions d’euros portés à 85 % par l’État. Il reste donc 15 % à supporter par les éleveurs. « On espère pouvoir reconduire le soutien de l’État sur une deuxième année pour préserver cette mobilisation collective. Cela reste d’un coût moins élevé que les indemnisations, » relève Eric Dumas.

Convaincre les Anglais et les Japonais

Si le produit reste très recherché des consommateurs hexagonaux, il reste une ombre au tableau sur les marchés étrangers. « Pour la première fois depuis très longtemps, notre balance commerciale est devenue négative. Elle était positive de 56 millions en 2015. Elle est devenue négative de 3,5 millions en 2023, » s’inquiète Marie-Pierre Pé, la directrice du Cifog. Les exportations avaient bien démarré début 2023 avant de freiner brutalement, après le début de la campagne. Si 80 % des pays achètent du foie gras, le Japon, première destination du foie gras tricolore et le Royaume Uni ont fermé leurs frontières depuis la vaccination, suivant l’idée qu’un pays qui vaccine n’est pas exempt du virus.

« A nous de poursuivre les efforts de transparence pour aller vers une acceptabilité de la vaccination. Nous sommes le seul pays à vacciner et ça marche bien. Un jour viendra où ce sera plus un atout qu’un frein, » plaide Eric Dumas. « Nous sommes désormais capables de tracer et de le démontrer. Ça intéresse des pays comme le Vietnam ou la Chine. »

Les industriels contraints de s’adapter

Dans ce climat « de modestie, de prudence, mais de confiance,» il reste encore quelques difficultés à solder au sein de la filière. On ne sait pas encore recenser tous les éleveurs qui ont pris l’option de ne pas redémarrer leur activité après les abattages massifs, ni compter les emplois perdus ou les sites malmenés chez les industriels qui doivent adapter leur outil de production à la baisse.

Ainsi, la maison Delpeyrat (Maïsadour) projette de fermer son site de Vic-Fezensac dans le Gers (70 emplois) au profit de celui de Gibret dans les Landes. Celui de la Pommeraie en Vendée est également sur la sellette. « Les entreprises ont pris très cher, mais on estime que la crise est derrière nous. La chance d’une petite filière comme la nôtre, c’est sa capacité de rebond. Ca y est, nous sommes revenus! » commente un professionnel.

Pédagogie et transparence

Le Cifog a bien conscience des questions que posent l’engraissement des animaux. « C’est un sujet de discussion autour de la table familiale, » reconnaît Marie-Pierre Pé, directrice de l’interprofession . Seulement 11 % des consommateurs savent que la phase d’engraissement ne dure que 10% du temps d ‘élevage, avec deux repas par jour, dans des proportions qui respectent les cycles de digestion. Le Cifog a donc ébauché un programme pédagogique destiné aux jeunes générations et remarqué par les instances européennes.

Le Cifog souhaite aussi voir aboutir sa demande d’obligation de l’identification d’origine du foie gras, notamment dans les restaurants. A ce jour il n’est pas considéré comme une viande alors qu’il est protégé par le code rural comme élément du patrimoine culturel et gastronomique.

92% des Français consomment du foie gras, notamment en fin d’année, soit + 2% par rapport à l’année précédente.

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