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Anthony, l’amour du livre à toute épreuve
Installé à Pau, Anthony Fernandes a transformé sa librairie l'Evasion en un café littéraire. Un choix difficile et courageux imposé notamment, par la crise sanitaire. N'ayant jamais pu bénéficier d'aides, sa ténacité est sa seule boussole.
Anthony FernandesSolène MÉRIC | Aqui

Anthony Fernandes, un libraire sous covid économique long

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 08/09/2023 PAR Solène MÉRIC

Quelques tables, des livres d’occasion, des jeux de société… Installé dans un petit local à l’entrée de Pau, Anthony Fernandes accueille le passant pour une boisson, mettant à sa disposition des livres d’occasion et des jeux de société.  Il y a quelques mois encore, la même pièce était remplie de livres neufs. Au 35 rue du 14 juillet à Pau, l’enseigne au-dessus de la vitrine indique « L’évasion – Libraire Papeterie ».  Et pour cause, face au parcours chahuté de son commerce, initialement ouvert à Sarlat en Dordogne, il s’est décidé à renvoyer son stock de livres chez les éditeurs.

Tout avait pourtant bien commencé pour Anthony, timide jeune homme originaire de Pau et « évidemment » passionné de livres et d’imaginaire « comme tout bon libraire qui se respecte ». Après une formation de 2 ans en alternance à l’Ecole de la librairie en région parisienne, c’est donc à Sarlat en 2019 qu’il pose ses valises pour lancer son projet: « il n’y avait plus de librairie indépendante et c’est une cité très touristique », explique-t-il. Pour ne rien gâcher la librairie « était aussi très bien placée ».

L’impression d’avoir été délaissé par l’Etat

Des débuts prometteurs, si le Covid et ses confinements successifs n’étaient pas venus jouer les trouble-fête. Anthony est amer à ce sujet, « en tant que petit nouveau j’ai eu l’impression d’avoir été délaissé par l’Etat ». Il détaille : « Après le premier confinement, quand les livres n’étaient pas essentiels, je n’ai eu droit à rien car il fallait pouvoir justifier d’un chiffre d’affaires sur l’année précédente, ce qui n’était naturellement pas mon cas. » Rebelote après le deuxième confinement, il ne peut prétendre au dispositif mis en place. Enfin, si les librairies ont pu rester ouvertes lors du troisième confinement, le tourisme était à plat, et les Sarladais parmi lesquels beaucoup de personnes âgées, ne se prêtaient pas volontiers aux balades par peur du virus. « Là c’est vraiment devenu compliqué », se rappelle Anthony, pas prêt à baisser les bras pour autant.

Il décide alors de revenir sur Pau, quitte à choisir un local moins cher, plus petit et dans une rue à la réputation « un peu lourde. Je savais où je mettais les pieds », mais le jeune homme coûte que coûte veut poursuivre son rêve. Il y met une sacrée dose de bonne volonté. Créant un site internet, il se propose par exemple de livrer les livres lui-même. Mais le mauvais sort continue de s’acharner. Alors que son commerce reprend doucement sur Pau, la Ville lance de grands travaux de réaménagement de la rue, en juin 2022, trois mois après son arrivée. L’histoire se répète, « la mairie m’avait promis que je serai aidé si j’avais des pertes financières, mais une fois de plus, les dispositifs ne correspondaient pas à ma situation de nouvel installé ». 

Tourner la page du projet de librairie

Amertume et désillusion à nouveau. Mais toujours pas d’abandon. Pour faire connaître sa boutique devenue si peu accessible, il se lance sur les marchés. Pas facile, reconnaît-il. « Les gens ne sont pas là pour ça. » Après 10 mois de travaux ayant grandement perturbé la circulation et l’accès aux commerces de la rue, le constat est sans appel : « j’ai perdu tous mes clients, les gens n’ont pas repris leurs habitudes », lâche-t-il dans un sourire blasé.

Tenace, Anthony, décide alors, courageusement, de revoir sa stratégie, quitte à tourner la page du projet originel de librairie. « Pour essayer de repartir, j’ai retourné tous mes livres aux éditeurs, pour me faire rembourser et j’ai adapté ma boutique en un café littéraire ». La nouvelle vie de l’Evasion a démarré il y a un peu plus d’un mois. Un nouveau défi pour Anthony, qui continue à peaufiner son projet.

La devanture du désormais café littéraire l’Evasion

Pour « redynamiser » la boutique, et attirer le chaland, il organise un samedi sur deux, des soirées conviviales autour de jeux de société. Il a aussi en tête de multiplier les rendez-vous réguliers tout en s’adressant à des publics variés. Le mercredi pour les jeunes et les enfants, « autour d’animations manuelles par exemple », les jeudis et vendredis pour des soirées de jeux de rôle. Autre intention : créer un club de lecture. Après tous ces coups du sort, s’il avoue bien quelques moments difficiles, Anthony s’affirme encore et toujours « optimiste et combatif ».

Dans le monde digital

Une combativité qu’il veut aussi mener sur les réseaux sociaux, Tik tok, Facebook et Youtube, « pour vivre avec son temps ». Il s’est même lancé à faire des petites vidéos « pour essayer de rendre le livre un peu rigolo. C’est en quelque sorte le livre qui se présente lui-même », explique-t-il. Sans perdre de vue ce monde des livres, l’objectif ici est de se faire connaître et tenter d’obtenir une rémunération des différentes plateformes en pariant sur la viralité de ses créations. « Même si ça n’est pas beaucoup, ce sera toujours un complément », espère-t-il.

Autre projet dans le monde digital : animer sur sa chaîne Twitch des échanges en direct avec des internautes. Au programme la culture, toujours : présentation de livres bien sûr, mais aussi de jeux de société ou encore de films. En quête de nouveaux publics et résolu à ne pas lâcher l’Evasion, il est bien loin le jeune homme timide qui a intégré l’Ecole de la librairie. « Les difficultés ça vous apprend à vous affirmer. » 

En quelques mots...

Anthony Fernandes, un libraire sous covid économique long

Anthony qui garde son statut de libraire peut toujours commander des livres auprès des éditeurs, via notamment son site internet. 

Prochain rendez-vous au café littéraire L’Evasion : le samedi 9 septembre 19H pour une soirée autour du Trivial poursuite. Un classique et une valeur sûre.

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