Reportage: La Noix du Périgord, des histoires de famille et …de mondialisation


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Reportage: La Noix du Périgord, des histoires de famille et ...de mondialisation

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 20/03/2011 PAR Joël AUBERT

Depuis plusieurs générations, la noix du Périgord a marqué de son empreinte toute la région. Elle est l’investissement de plusieurs vies. Un investissement… et pas n’importe lequel : « Quand on y est, il faut y être… même si c’est dimanche ! » Patrick Pedenon, 35 ans, a la même détermination dans ses engagements personnels que politiques : délégué cantonal de la FDSEA (Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles) et administrateur du CRDA (Comité Régional de Développement Agricole).

Mais il a surtout compris que l’investissement du passé doit être tourné vers l’avenir. Récemment, Patrick Pedenon est « passé au bio ». De fait, « la noix est un produit traditionnel non complexe, peu soumis à des traitements ». Une conviction écologique rendue possible grâce à une prime gouvernementale garantissant « 450 kg de noix propres pour un investissement de 900 euros/ha. ». Mais une prime qui a plus ou moins été remise en question en début d’année : « Elle a motivé plus d’agriculteurs que prévu. Un agriculteur, sous ses airs bêtes, sait très bien calculer… », rajoute Patrick Pedenon le sourire aux lèvres.
Mais ce serait trop simple de s’arrêter là : en 2008, il fait installer des panneaux photovoltaïques sur les toits de sa ferme – une surface de 800 m². « Le photovoltaïque, c’est une opportunité : un contrat sur 20 ans qui ne nécessite aucune main d’œuvre.»

Une affaire de famille
Le toit photovoltaïque de la ferme de Patrick Pédenon Fabien Joffre, 30 ans, s’installe seul comme agriculteur en 2003 après avoir récupéré l’exploitation de son père, qui appartenait elle-même à son grand-père… Depuis 2009, il est agriculteur ‘en société’ avec sa mère. Sa femme les rejoint en 2010 au sein du GAEC (Groupement Agricole d’Exploitations en Commun).
En Dordogne, Fabien Joffre est en partie responsable de nombreuses mesures prises pour le monde agricole. Car outre ses responsabilités au sein du Conseil d’administration de l’association ARALEB ( Association de commercialisation pour le bovin), il est secrétaire général des jeunes agriculteurs de la Dordogne. Être proche du ministère de l’agriculture permet évidemment d’orienter les décisions à l’échelle nationale. « Quand Nicolas Sarkozy négocie avec le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva des Concordes et autres avions de chasses, cela signifie indirectement qu’il laisse entrer plusieurs tonnes de viande. »
Alors est-ce vraiment ainsi, le marché brésilien fait saliver… et tant pis pour la France ? Ce n’est pas si radical : le gouvernement français reste conscient que l’agriculture est une force indispensable pour une nation. Des droits de douanes ont été mis en place, mais l’ouverture de la France au libre-échange inquiète le monde agricole et « il faut rester vigilants, défendre notre métier à l’échelle nationale, en faire la promotion.»


Comme un air de mondialisation…
La production de la noix représente un potentiel notable pour l’économie et l’avenir même de la région. Le bassin de production du Sud Ouest embrasse la Dordogne, le Lot, la Corrèze et une pointe de la Charente. Des chiffres de plus en plus élevés à l’échelle internationale mais qui, pourtant, sont parfois encore bien maigres face aux chiffres de la concurrence… Pour l’heure, le marché de la noix se réduit aux trois pays que sont les Etats-Unis, le Chiliet la Chine : « les Chinois ont des régions entières de noyers, une capacité de production massive », rajoute Patrick Pedenon. La commercialisation de la noix en France est plus laborieuse qu’on ne pourrait l’imaginer. « De fait, il est très difficile de négocier avec la Grande Distribution française. Ils ne regardent pas la qualité : c’est à celui qui fixera le meilleur prix », se désole quelque peu Patrick Pedenon. D’où le « tout petit poids de la nuciculture » en France. Actuellement à l’échelle européenne, les coopératives de noix exportent principalement en Espagne, au Portugal et en Allemagne : « 50% en cerneaux et 50% en noix de table. ». Un avantage certain d’appartenir à une coopérative, aujourd’hui, est celui de pouvoir fournir de gros volumes à des grossistes extérieurs ; avoir ainsi un poids plus important.
« L’Europe pourrait devenir dangereuse pour l’expansion de la Noix du Périgord » : en très peu de temps, l’Union Européenne est passée de 15 à 27 pays membres. Une transformation positive sur bien des points, mais qui inquiète les agriculteurs : « Les subventions de la PAC sont de plus en plus maigres.» Si l’on va vers une baisse des aides agricoles, sera-t-elle compensée par les revenus ? Une question qui reste pour le moment en suspens. « Pour donner un ordre d’idée, cette aide s’élève aujourd’hui chez nous à 100 000 euros/an – soit 26% de notre Chiffre d’Affaire annuel. Si on ne les a pas, l’exploitation n’est plus rentable », précise Fabien Joffre.
Cependant, l’Europe est actuellement en sous-production de noix à l’échelle mondiale. Ce petit fruit ne semble donc pas être en si mauvaise posture quant à l’avenir… La mondialisation est bien présente : mais comme un atout de développement. « Théoriquement, dans les dix prochaines années, le prix de la noix devrait augmenter ». Deux interviews qui ont donné un point de vue plutôt optimiste pour l’avenir de la nuciculture à l’échelle mondiale.

Mais ce n’est pas parce qu’il faut s’adapter à une nouvelle organisation mondiale que Fabien Joffre et Patrick Pedenon ne gardent pas en eux une vision traditionnelle de leur métier : « Vivre dehors, au contact de la nature ; transmettre un patrimoine à nos enfants ; et être son propre chef. »

Fanny Cheyrou

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