Influenza aviaire : la déception des producteurs périgourdins


Claude Hélène Yvard

Influenza aviaire : la déception des producteurs périgourdins

Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 17/02/2016 PAR Claude-Hélène Yvard

Le département de la Dordogne compte 650 producteurs de palmipèdes : les deux tiers travaillent en circuit courts, un tiers seulement en filière longue. A peine, une cinquantaine produisent de l’oie, figure emblématique de la gastronomie du Périgord, les autres ont opté pour le canard. Hier, ils étaient 280 à avoir répondu à l’invitation de la Chambre d’agriculture de la Dordogne. L’objectif de la réunion étaient d’expliquer les modalités de lutte contre la grippe aviaire.

Ne pas assister une nouvelle fois à une telle épizootieDeux arrêtés publiés au journal officiel précisent les dispositions complémentaires pour éradiquer l’influenza hautement pathogène. A ce jour, 71 foyers situés dans 8 départements du Sud-Ouest de la France ont été déclarés. L’un de ces arrêtés indique que le vide sanitaire prévu dans toutes les exploitations de volailles, commerciales ou non de la zone de restriction durera un mois. « La mise en place de tout palmipède est interdite du 18 avril 2016 au 16 mai 2016 », précise le ministère de l’Agriculture en ajoutant que les bâtiments ayant détenus des palmipèdes devront être désinfectés et maintenus vides pendant au moins 21 jours. La zone de restriction sera levée « à l’issue d’un programme de dépistage national débutant à partir du 2 mai 2016 […] s’il démontre l’absence de circulation virale », a expliqué Frédéric Piron, le directeur départemental de la DDCSPP.
Mais l’éradication de la grippe aviaire ne s’arrête pas là pour les pouvoirs publics. Dans un second arrêté, il met en place des mesures de biosécurité applicables dans toutes les exploitations françaises. Celles-ci doivent « empêcher l’introduction dans les exploitations de volailles du virus de l’influenza aviaire et  limiter le risque de diffusion à l’intérieur des exploitations et vers d’autres exploitations ». Objectif : ne pas assister une nouvelle fois à une telle épizootie.

Dans l’assistance, beaucoup écoutent, en silence. Le préfet insiste sur les mesures de chômage partiel à prendre très rapidement pour les exploitations qui ont des salariés.  Les salaires peuvent être couverts à 100 %. Le docteur  Edouard Huchin, vétérinaire explique ce qu’est ce virus hautement pathogène, d’où il vient.  Les modalités des arrêtés sont expliquées. Chacun a bien conscience de la nécessité de tout mettre en oeuvre pour éradiquer ce virus et que c’est l’ensemble de la filière qui doit faire des efforts. Puis au bout de plus d’une heure de réunion, la parole se libère. Certains s’interrogent sur les basse cours et la perméabilité des frontières géographiques.  Une jeune femme intervient : elle a un projet d’installation. Doit elle le poursuivre ? D’autres, peinent à retenir des larmes. Un autre interpelle le préfet sur, selon lui, la nécessité de faire circuler l’information pour les particuliers qui ont des basse cours par l’intermédiaire des marchands de volailles et non pas des maires.

Une période blanche demandée par les éleveursLe plan de lutte contre la grippe aviaire prévoit une première enveloppe de 130 millions d’euros, pour les producteurs et les accouveurs, pour passer le cap. Cette enveloppe sera complétée par une seconde de 200 millions dévolue  à la mlse en place de mesures de bio sécurité. Ces aides seront complétée par les régions. Lundi, lors de la présentation de la journée régionale au salon de l’agriculture de Paris, Alain Rousset, président de la région ALPC, a évoqué une enveloppe de 10 à 15 millions d’euros pour l’ensemble des éleveurs. Hier, Didier Bazinet, pour le conseil départemental de la Dordogne, a indiqué que le Département soutiendra la filière via les plans départementaux.  Ces aides seront insuffisantes, jugent majoritairement les éleveurs. « Les indemnisations qui arriveront tardivement ne couvriront pas les pertes. Ce qu’il faut c’est une période blanche, au niveau des cotisations MSA, des banques des assurances, qui correspondent à la période sans revenu, intervient Damien Marty, éleveur en circuit court. Seul l’Etat peut acter cette « période blanche », a précisé la MSA.

Des mesures de bio sécurité difficilement tenables
Car pour l’ensemble de la filière, les conséquences économiques sont déjà là, pour ces éleveurs.  Une question est dans tous les esprits : comment vivre lorsque pendant quatre à cinq mois, on ne va rentrer aucun revenu ? Les mesures prises par le gouvernement, pour éradiquer le virus et tenter de retrouver des marchés, paraissent difficilement tenables aux yeux de beaucoup, en particulier, les plus petits qui sont en production fermière, qui vendent à la ferme ou sur les marchés. Derrière ces précautions sanitaires, se déroule une intense bataille économique entre petits éleveurs et industriels. « Le gouvernement insiste ainsi sur la nécessité« de retrouver le plus rapidement possible le « statut indemne » de la France pour l’ensemble de la filière volaille ». Ce statut est la condition sine qua non pour exporter. Quand il y a un cas d’influenza aviaire, le statut indemne tombe. Et  les petits producteurs  que nous sommes représentent peu de choses en poids financiers.  L’impact des vides sanitaires sur nos exploitations, c’est  déjà catastrophique. Les mesures de bio sécurité qu’on veut nous imposer sont difficilement tenables, en termes de coûts d’investissements et de gestion humaine. Pour ceux qui élèvent leurs canards, qui les gavent, et qui les transforment sur leurs exploitations et qui vendent en direct, il faut des assouplissements, » explique Didier Marcouti, éleveur à Saint Antoine d’Auberoche. Des assouplissements fondés sur les cahiers des charges de l’IGP canard du Sud Ouest pourraient constituer une piste de négociations

Beaucoup de producteurs sont repartis déçus, avec le sentiment de n’avoir pas eu les réponses à leurs inquiétudes quant à leur devenir et celui de leurs exploitations. Pour la filière, le défi consiste à trouver des solutions économiquement acceptables et sanitairement satisfaisantes. 

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

On en parle ! Dordogne
À lire ! AGRICULTURE > Nos derniers articles