Gironde : Laruscade choisie pour accueillir les dirigeables de Flying Whales


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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 20/07/2020 PAR Romain Béteille

Retardée (notamment à cause de la crise sanitaire), l’annonce de la commune girondine qui accueillera le futur site de l’entreprise de dirigeables Flying Whales, Laruscade, a été faite ce lundi 20 juillet à Bordeaux, après l’annonce de son accueil régional effectué en 2019 au Salon du Bourget. Le site a donc été préféré à d’autres territoires candidats, notamment le Libournais ou Cestas. « C’est un projet de rupture, qui va bien avec tout ce qu’est la Nouvelle-Aquitaine », a ainsi affirmé Alain Rousset, président de la région, au moment de l’annonce, après un projet en discussions depuis plusieurs années. L’enjeu de cette implantation est, pour la région, hautement stratégique : « éviter le passage des camions lourds dans des petites communes de montagne, trouver un moyen d’exploiter le bois alors même que la France est en déficit. C’est aussi un moyen pour transporter des charges lourdes, comme des pâles d’éoliennes ou des pylônes électriques ». L’entreprise, née en 2012, développe le LC160T, un dirigeable destiné au transport de charges lourdes (60 tonnes), conçu au départ pour répondre aux besoins de l’ONF (Office National des Forêts) pour l’extraction de bois en zone isolée. 

Le bon terrain

« Il fallait trouver un terrain qui allait bien, compte-tenu du fait que le bâtiment qui sera construit sera haut (60 mètres) et très long (250 mètres) et qu’il aura besoin d’une piste d’envol », a poursuivi le chef de file de la région. L’un des points clé qui ont poussé l’entreprise, qui va aussi développer deux autres sites de production (au Québec, où l’implantation fait débat et l’objet d’une enquête et en Chine), est logistique : la zone de 160 hectares, sur laquelle est définie un périmètre de développement économique par la Communauté des Communes Latitude Nord Gironde) est située près de la Nationale 10 et de l’autoroute (sur un corridor reliant l’Europe du Nord à la péninsule ibérique) mais également tout-à côté de la gare de Saint-Mariens/Saint-Yzan-de-Soudiac qui fait partie du périmètre du futur RER métropolitain. Le futur site de Flying Whales, conçu par le cabinet d’architectes Goudchaux, devrait dévoiler ses contours dans les prochains mois. Pour Sébastien Bougon, le PDG de Flying Whales, des cinq régions approchées pour l’implantation, la Nouvelle-Aquitaine était « la plus dynamique et la plus performante dans l’exécution ». 

« Je ne viens pas de l’aéronautique au départ, j’étais un peu froid sur le sujet. C’est un programme qu’il a fallu dé-risquer et sur lequel nous avons analysé les problématiques et opportunités de marchés entre 2013 et 2017. Aujourd’hui, plus de 30 entreprises accompagnent ce programme, dont plusieurs sous-traitants en Nouvelle-Aquitaine ». C’est le cas, par exemple, de l’entreprise Epsilon Composite, basée à Gaillan en Médoc, qui sera chargé de construire la charpente des appareils, autant sur le site néo-aquitain que sur les autres implantations de Flying Whales de REEL (basée à La Rochelle) pour le levage de charges ou d’Air Liquide pour fournir l’hélium destiné à faire voler ces gros engins de 154 mètres de long, 40 mètres de haut et 60 mètres de large. Selon le responsable, la solution est innovante, principalement en raison de son plan de vol. « On pourra charger et décharger en vol stationnaire, ce qui signifie aucune empreinte au sol en opération, nous n’aurons besoin d’énergie que pour nous déplacer. On consommera 50 fois moins d’énergie qu’un avion ou un hélicoptère pour le même tonnage transporté ». 

Enjeux économiques

La région, actionnaire de la société à hauteur de 10,35 millions d’euros, compte bien sur cette nouvelle implantation industrielle pour appuyer sa réflexion sur l’écologie des transports (que ce soit sur l’hydrogène pour les trains ou la motorisation des bateaux). Ce « marché de niche », comme le définit son PDG, verra, à termes, la création de 200 à 300 emplois sur le site de Laruscade, au fur et à mesure de la montée en puissance de la fabrication des engins (au départ deux par an puis dix à long terme). « Nous sommes en train de finir l’ingénierie du programme », a affirmé Sébastien Bougon ce lundi. La première machine, pour laquelle la commande auprès des sous-traitants serait déjà bouclée, devrait être produite en 2023 et effectuer son premier vol entre la fin 2023 et le début 2024, avant d’obtenir sa certification auprès de la DGAC. Interrogé par le JDD, un responsable de l’entreprise évoque la prévision d’une flotte de 150 à 160 dirigeables « dans des dix ans qui suivront l’entrée en service du premier ». « Nous travaillons aussi avec plusieurs pays sur des projets de désenclavement économique. C’est le cas au nord du Canada, en Indonésie qui compte plus de 2000 îles qui ont besoin d’être connectées et n’ont pour l’heure pas une activité économique suffisamment développée pour accueillir un aéroport ou un port en eaux profondes. On travaille aussi avec le Congo et le Gabon sur des problématiques de fret », a souligné le PDG de Flying Whales, dont l’investissement total représente « environ 450 millions d’euros ». 

Comme dit plus haut, ce site néo-aquitain (qui prévoit de s’implanter sur une cinquantaine d’hectares) fait partie d’un plus vaste projet de développement économique local. Pour le président de l’intercommunalité, Éric Happert présent ainsi que M.Labeyrie le maire de Laruscade, « on doit encore parfaire les acquisitions foncières pour réaliser ce site de 160 hectares. On prend ce projet parce qu’il nous semble être un étendard. On ne négligera pas les autres priorités du parc, c’est à dire un développement agricole avec du commerce de proximité et la sauvegarde des originalités économiques du site. On a déjà eu des discussions avec Flying Whales pour éventuellement faire de l’agriculture sur les surfaces servant à l’aire d’envol. Un éleveur de poulets est déjà présent, on espère le garder, peut-être en lui donnant une chance d’avoir de la surface supplémentaire ou développer une autre activité. J’espère qu’on arrivera à transformer cet inconvénient de masse en intérêt architectural pour que les gens voient ça comme une chance et pas comme une verrue ». Il reste donc encore beaucoup d’inconnues avant que la Nouvelle-Aquitaine ne puisse voir voler dans son ciel le plus gros dirigeable du monde, qui envisage déjà une seconde génération de dirigeables fonctionnant à l’électrique, après une première génération se servant de carburant classique pour faire fonctionner ses génératrices thermiques. L’usine de Laruscade devrait commencée à être construite dès 2021.

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