Le Cannelé, ce mystère nommé désir…


David Nakache

Le Cannelé, ce mystère nommé désir...

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 05/05/2008 PAR Piotr Czarzasty
Mais alors, un « n » ou deux « n » pour Can(n)elé ? Nombreux se posent certainement la question. Selon l’auteur, Isabelle Bunisset, le nom originel porterait deux « n », que l’on retrouve dans le mot « cannelure ». Et c’est en 1985, lorsque voit le jour la Confrérie du Canelé de Bordeaux, que ses membres décident d’en changer l’orthographe. « Ce qui était un coup plus médiatique que linguistique pour relancer le produit. » nous explique l’auteur, qui revient de manière intentionnelle à l’écriture originelle du Cannelé, par « nostalgie » et souvenir de « ses douces cannelures ».

Le Cannelé vu par… une Professeur de Lettres Modernes

Un autre mystère reste cependant à résoudre. Comment se fait-il qu’une universitaire, qui n’a jamais écrit de livres sur la gastronomie dans sa vie, et qui se désigne elle-même comme « une inculte de la cuisine» fut, néanmoins, la première à se pencher sur un produit aussi emblématique de Bordeaux que le Cannelé ? «J’étais assise avec mon futur éditeur dans une brasserie très bordelaise… » raconte Isabelle Bunisset « …on nous a apporté un café, accompagné d’un petit cannelé. C’est à ce moment là que je me suis demandée si on avait déjà écrit quelque chose à ce sujet. « Pas à ma connaissance » m’a répondu l’éditeur, donc je me suis lancée.» Une histoire peut-être ni belle ni originale, mais ce qu’on en retiendra, en fin de compte, c’est le résultat. Et celui-ci est surprenant. Un ouvrage qui donne vraiment envie, en faisant titiller nos sens et émotions à la simple évocation du mot « Cannelé ».

Le Cannelé – entre légendes et vérités

L’auteur cherche à traquer, dans un premier temps, les origines du flan caramélisé, en essayant de distinguer entre légendes et vérités. On pourrait être surpris mais des origines « il y en a des milliers. » affirme Mme Bunisset. La première remonterait au XVIII s., celle des soeurs du couvent de l’Annonciade, qui, à partir des restes de farines laissées sur les quais de Bordeaux par les navires, auraient inventé la recette. D’autres parlent du cannelé en tant que possible descendant de la canole de Limoges. Il n’existe cependant nulle trace, ni écrit qui pourraient confirmer l’une ou l’autre de ces hypothèses. Les découvertes archéologiques entreprises dans le couvent semblent d’ailleurs avoir dissipé le doute, puisqu’aucun objet ressemblant à un moule de cannelé ne fut retrouvé. C’est seulement en 1937 que l’on notera une première référence littéraire au Cannelé ; dans un livre de Jean Balde, un ami de François Mauriac.

Une mise en bouche érotique

Isabelle BunissetTout un chapitre de l’ouvrage se voit, de même, consacré à une certaine « rêverie littéraire » autour du Cannelé. L’auteur nous emmène vers un monde lyrique et sensuel qui fait parler notre imagination. Elle éveille nos sens et émotions les plus fortes, en ne faisant que monter en nous le désir de croquer dans les parois croustillantes du cannelé et « le sucer pour en extraire son intimité. » Une mise en bouche presque érotique, que l’auteur n’a pas du tout l’intention de cacher. « Selon un vieux dicton, le cannelé ressemblerait à une élégante bordelaise qui se refuserait le premier soir pour en être que plus désirable le lendemain. » raconte Mme Bunisset.

« Une sensation, plus qu’un goût »
Alain Delon en était fou ; Catherine Deneuve exigeait cette spécialité bordelaise à la fin des tournages. Qu’est ce qui rend donc le cannelé si incontournable, objet de presque tous les désirs ? « Le charme de sa rusticité, sa forme assez singulière ; mais surtout cet antagonisme entre l’extérieur croustillant et son intérieur très moelleux. » explique, pour sa part, Mme Bunisset. « Le cannelé est une sensation plus qu’un goût. » remarque de son côté Jean-Luc Poujauran, pâtissier. Le cannelé serait même devenu un « bon compagnon », que ce soit au petit déjeuner avec un café; au goûter; ou dans un cocktail avec un verre de champagne; « il nous va très bien ». De plus en plus de chefs-cuisiniers cèdent à son charme.

La beauté et l’élégance du geste

Et c’est justement quelques recettes ainsi que les confidences de plusieurs maîtres-pâtissiers et chefs-cuisiniers que nous fait partager l’auteur, plus loin dans son ouvrage. On y apprend que le cannelé ce n’est pas seulement un goût ou une sensation, mais aussi « la beauté, l’élégance du geste qui va avec. » C’est en observant le travail de ces maîtres-cuisiniers qu’Isabelle Bunisset découvre l’importance accordée à la perfection, au questionnement. « Ce sont des gens passionnés, leurs yeux brillaient en évoquant simplement le mot ; ils s’enthousiasmaient comme des enfants ; et c’est cela qu’il m’a semblé important de raconter. » explique Mme Bunisset. « Toute cette sensualité dévouée à la cuisine doit se reproduire dans les mots. »

L’auteur nous emporte donc dans de nombreuses fantaisies érotiques, nostalgiques et drôles autour du Cannelé, en nous montrant que c’est un plaisir qui, non seulement, se laisse admirer, croquer ou savourer ; mais aussi écrire. « Tout part d’un ravissement des yeux. » avoue Isabelle Bunisset « Et si le produit provoque du plaisir aussi sublime que le cannelé, on se doit de le pérenniser par des mots. »

Piotr Czarzasty

Isabelle Bunisset
« Le Cannelé, ce mystère nommé désir »
Photographies : David Nakache

sortie en librairie le 7 mai 2008

Editions Féret
24 allées de Tourny, Bordeaux
Tel : 05 56 13 79 95
www.feret.com


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