Fin de vie : Olivier Falorni ne veut pas « procrastiner »


Le député PRG de La Rochelle/Ré, à la tête de la mission d'évaluation de la loi Claeys-Léonetti, porte le combat pour une nouvelle loi sur la fin de vie. Il livre son ressenti tandis que se tient une convention citoyenne sur cette question.

Portrait du député d'Olivier FalorniVirginie Valadas | Aqui

Olivier Falorni, député de la 1ere circonscription de Charente-Maritime avant une rencontre débat sur la fin de vie le vendredi 9 décembre.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 13/12/2022 PAR Virginie Valadas

aqui! : D’où vient l’antériorité de votre combat sur la fin de vie, un combat dans lequel vous vous êtes engagé dès votre première élection en tant que député en 2012 ?

Olivier Falorni : Mon engagement sur la question de la fin de vie, il est d’abord d’ordre philosophique. Je me suis toujours interrogé sur l’incapacité de notre République laïque à nous donner la liberté du choix de notre propre mort. Pour moi, c’est même une question républicaine. Et puis j’ai été confronté comme beaucoup, malheureusement au drame du départ d’un proche qui est décédé dans des conditions difficilement supportables. Cela n’a fait que conforter mon engagement, mais il est important de préciser qu’il ne relève pas d’une expérience personnelle, mais d’un postulat préalable, celui du droit de disposer de sa mort. 

@! : Aujourd’hui nous sommes à un instant clé de ce débat, puisque vient de s’ouvrir la convention citoyenne sur la fin de vie, comment voyez-vous les choses vous qui « planchez » sur le sujet depuis longtemps ?

O. F. : Je n’étais pas et ne suis toujours pas défavorable à une convention citoyenne. C’est bien que les citoyens puissent débattre, s’emparer du sujet, même si cela fait des années qu’on en parle dans toutes les familles, car c’est un sujet qui concerne tout le monde. Je craignais simplement qu’elle soit une sorte d’alibi pour « procrastiner », c’est-à-dire pour reporter aux calendes grecques une décision politique, de nouveau. Puis je me suis entretenu avec Emmanuel Macron sur ce sujet.

Il m’a dit que s’il devait y avoir une loi, ce serait en 2023. Ce que je souhaite, c’est que cette convention citoyenne puisse exprimer un point de vue. Un point de vue qui viendra en complément de ce qu’a produit le Comité national d’éthique. Ainsi que de la mission parlementaire d’évaluation de la loi Claeys-Léonetti*, que j’ai l’honneur de présider. Tout cela devrait amener fin mars à une décision sur une loi ou… pas une loi. J’espère évidement qu’il y en ait une, qui sera débattue au Parlement en 2023.

@! : Quelle est la feuille de route pour vous à la tête de la mission parlementaire d’évaluation de la loi Claeys-Léonetti ?

O.F. : Les dix-neuf députés de cette mission parlementaire m’ont fait l’honneur de me nommer président. Ces collègues sont de toutes sensibilités, il y a dix-neuf députés qui représentent les dix groupes parlementaires de l’Assemblée nationale. Notre objectif, c’est d’évaluer la loi actuelle. Sur le plan philosophique, sur le plan médical, sur le plan juridique et sur le plan humain. C’est-à-dire que je souhaite que l’on entende la parole des malades et des familles sur la réalité de la fin de vie confrontée à la réalité de la loi, avec ses avancées et ses insuffisances.

Aujourd’hui, nous avons des euthanasies clandestines qui sont pratiquées chaque jour en France.

Il ne s’agit pas, dans le cadre de cette mission, d’engager un débat sur l’aide à mourir mais d’évaluer la loi actuelle. J’ai réuni le bureau de la mission mardi dernier (le 6 décembre, ndlr), nous nous sommes réunis en plénière mercredi. Nous avons défini les objectifs ainsi que le cadre de nos auditions et de nos déplacements. Je souhaite que nous nous déplacions dans des hôpitaux, dans des centres de soins palliatifs, pour écouter les soignants, les malades et les familles. Nous commencerons les auditions début janvier. Nous allons rencontrer les représentants des cultes, des juristes, des médecins, des représentants d’association engagés sur le sujet. Et nous essaierons à l’issue de ces trois mois de remettre un rapport le plus exhaustif possible.

@! : Vous avez souvent dit que les services de soins palliatifs sont indissociables de la fin de vie et même complémentaires ?

O. F. : Oui, ils ne sont pas opposables. C’est un symptôme franco-français que cette opposition récurrente entre, d’un côté, les soins palliatifs et de l’autre, l’aide active à mourir. Moi je considère que les deux constituent une alternative possible pour le malade en fin de vie. Je suis un militant des soins palliatifs. Mais il y a un certain nombre de situations où les soins palliatifs ne peuvent pas suffire. Parce qu’il y a des souffrances réfractaires aux traitements, parce qu’il y a les maladies neurodégénératives face auxquelles il est difficile d’apporter une réponse. Je considère qu’il n’y a pas d’opposition entre les deux. Regardons vers la Belgique où 50% des aides à mourir ont lieu dans des centres de soins palliatifs.

On vit une situation aujourd’hui en France sur la fin de vie qui me rappelle celle que l’on connaissait à propos de l’avortement avant la loi Veil de 1974. Aujourd’hui, nous avons des euthanasies clandestines qui sont pratiquées chaque jour en France.

Il y a, outre la Suisse et la Belgique qui sont les seuls pays à accueillir des ressortissants étrangers pour cela, beaucoup de pays qui ont légiféré : le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, onze états fédéraux américains. En Europe l’Espagne, les Pays-Bas, l’Autriche, le Portugal bientôt. Il y a un mouvement mondial et la France ne doit pas être une désolante et navrante exception.

*La Loi Claeys-Léonetti (2016) permet à chaque patient d’exprimer sa volonté via les directives anticipées. Elle permet la sédation profonde et continue jusqu’au décès.


Zoom sur la Convention citoyenne sur la fin de vie

Elle réunit 185 français tirés au sort représentatifs de la société française. Elle a été installée le vendredi 9 et s’est réunie jusqu’au dimanche 11 décembre, lors d’un premier week-end de travail à Paris. Venus de toute la France, les participants doivent se retrouver à 9 reprises sur 4 mois au siège du Cese (Conseil économique, social et environnemental) et préparer un rapport destiné à la Première ministre, Élisabeth Borne.

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