Les maires de Dordogne ont le blues


Claude-Hélène Yvard

Les maires de Dordogne ont le blues

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 09/10/2019 PAR Claude-Hélène Yvard

C’était le dernier congrès de l’union des maires de la Dordogne avant les municipales, et quelque 300 maires (sur 505 communes en Dordogne) étaient réunis dans la salle de la filature à Périgueux. Un sur trois, en particulier ceux des petites communes rurales ne repartira pas. Beaucoup par lassitude. Et pourtant selon le sondage réalisé par Odoxa, il y a quelques jours, 67 % de nos concitoyens trouvent leur maire compétent mais 84 % d’entre eux ne souhaitent pas devenir maires. Le premier à s’exprimer à la tribune, Bernard Vauriac, président de l’Union des maires. Il a dressé la liste des sujets sensibles : le maintien de l’école rurale dans un contexte de baisse de démographie scolaire, la dotation globale d’équipement qui n’évolue plus, la désertification médicale, la sécurité de nos concitoyens qui demeurent une priorité. Il poursuit « le projet de redéploiement des centres de finances publiques s’apparente davantage à une bonne campagne de communication qui cache en réalité une baisse de moyens ». La suppression de la taxe d’habitation ne passe pas : « une dotation d’Etat statique remplace une taxe dynamique ». Le maire de Saint- Jory-de-Chalais insiste sur les règles d’urbanisme qui deviennent de plus en plus complexes. 

La question de l’urbanisme au cœur des débats

En effet, la plupart des communautés de communes viennent d’adopter leur Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), pour réduire la transformation des terres agricoles en zones commerciales ou constructibles, et ils s’inquiètent de nouvelles restrictions dans le Schéma régional d’aménagement et de développement durable et d’égalité  du territoire. « Le Sraddet va laisser les communes rurales sans possibilité d’avoir de nouvelles constructions susceptibles d’accueillir de nouveaux foyers. Les bourgs ruraux seront laissés à une mort douce mais certaine », poursuit Bernard Vauriac. « La vraie question est de savoir si l’on va pouvoir continuer à vivre dans nos territoires ruraux d’ici quinze ans. Nous aspirons à plus de liberté dans une République vraiment décentralisée.
Dans son intervention, le président du Conseil départemental, Germinal Peiro est revenu sur la complexité des règles d’urbanisme : « il ne se passe pas une semaine sans que je rencontre un maire qui me dise qu’en transformant la carte communale en PLUI, il a perdu 40 à 60 % de la surface constructible de sa commune. Cette affaire là est due à une volonté politique du gouvernement qui souhaite que l’on s’engage dans une gestion économe de l’espace. L’objectif est de préparer la zéro artificialisation des sols. Cela veut dire qu’on ne pourra plus construire en dehors des terrains privés sur des friches industrielles, des anciens bâtiments. Cette politique à terme c’est la mort du monde rural qui est annoncée : les territoires seront figés et plus rien ne s’y créera. Dans le même temps, les élus ont le soin de mettre en place un Schéma régional d’aménagement et de développement durable et d’égalité  du territoire. Ce document dit qu’il faudra réduire de 50 % de la consommation des terres, dans le but de préparer le zéro artificialisation des sols. Ce qui nous inquiète, c’est que les 50 % vont s’appliquer à l’échelle régionale. Vous croyez qu’on va arrêter le développement de la métropole bordelaise ? Ce sont les petites communes qui vont en pâtir et dans nos territoires, pas sur le bassin d’Arcachon ou sur la côte Basque. On ne peut pas laisser faire sans rien dire. » Arrivés en fin de congrès, Alain Rousset, président du conseil régional a tenté de rassurer les maires. Il a rappelé les engagements du Conseil régional pour les territoires ruraux ainsi que son attachement à l’ensemble des maires de notre région, maillons essentiels de notre démocratie locale. « Il ne s’agit pas de pénaliser les communes ». Il s’engage à mettre fin aux permis de construire pour des grandes zones commerciales en périphérie. « Il faut reconquérir les centres villes. J’espère vous rassurer. Je veillerai à ce que les services de l’Etat soient attentifs à vos besoins. » 

 « Faire plus avec moins

Au moment de lancer le débat avec l’assistance, les questions des maires fusent sur les sujets du quotidien : une élue évoque le manque de personnel dans les EPHAD, une autre la redevance incitative de la taxe d’ordures ménagères, un autre la compensation de la taxe d’habitation, un autre s’interroge sur la difficulté des associations communales de déposer ou de retirer des espèces  aux guichets de l’agence postale communale, qui a remplacé le bureau de poste. Le point commun entre ces interventions, c’est un sentiment de mal être, un sentiment d’abandon.
C’est Jacques Ranoux, le maire de Montrem qui résume sans doute le mieux le sentiment des maires.  » En 25 ans, j’ai vu partir en poussières les services de l’Etat. On nous demande de faire plus avec moins. Aujourd’hui, on constate que beaucoup d’entre nous ne se représenteront pas. Il y a trop de textes, de charges qui s’accumulent, on ne parvient plus à gérer tout cela. Il faut mettre de l’ordre dans ces réglementations, ces textes qui s’empilent et nous rendent au final la vie impossible. » Avant de conclure sous les applaudissements de l’assistance : « Aujourd’hui,  d’un côté, on nous dit que nous sommes très importants et de l’autre côté, on fait tout pour nous condamner. » 

Face à l’inquiétude des maires, les parlementaires de la majorité tentent de rassurer. Jean-Pierre Cubertafon, député Modem du Périgord vert voit dans l’agenda rural présenté par la ministre de la Cohésion des territoires et des collectivités locales, « un bon signe pour la ruralité. Les 173 propositions de l’Agenda rural vont produire des effets concrets dès 2020.  Avec des textes comme la loi engagement et proximité, il est la manifestation d’une prise de conscience, par l’exécutif et le Président de la République, de l’importance de la ruralité et de ses élus. » De son côté, Jacqueline Dubois, députée du Sarladais, assure que « la loi engagement et proximité renforcera vos droits, indemnisations et protections juridiques en tant qu’élu. » En conclusion, le préfet de la Dordogne a exhorté les maires à ne pas rester figés dans une posture, notamment en ce qui concerne le redéploiement des trésoreries. Compensation de la taxe d’habitation, créations des maisons France services, hausse des dotations pour les territoires ruraux, par ces exemples, il a tenté de démontrer qu’il n’y avait pas de « jacobinisme forcené. »

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