Interview : Jean Dionis du Séjour – « Le conseiller territorial a du sens mais son mode d’élection est choquant


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Interview : Jean Dionis du Séjour - « Le conseiller territorial a du sens mais son mode d'élection est choquant

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 29/11/2009 PAR Joël AUBERT

@qui !: La suppression de la taxe professionnelle fait bondir la gauche et grincer des dents certains élus à droite. Pourquoi avoir voté le texte lors de son passage en première lecture à l’Assemblée nationale ?
Jean Dionis du Séjour :
Premièrement parce que je suis favorable à la disparition d’un impôt dont tout le monde sait qu’il est imbécile. Ensuite, parce que les principes sur lesquels se fonde la remplaçante de la taxe professionnelle, la cotisation économique territoriale (CET), ne me déplaisent pas. Cette nouvelle cotisation est assise sur la valeur ajoutée produite par les entreprises, c’est-à-dire sur leur dynamisme. C’est la meilleure assiette que l’on pouvait imaginer. Par ailleurs, le texte conserve le lien entre la localisation de l’entreprise et la commune ou intercommunalité bénéficiaire de la taxe. Et son produit sera réparti entre les différentes collectivités, même si les modalités de la distribution doivent encore être précisées.  

Des craintes…

@ !: Quels sont les points qui posent problème alors ?
J. D. du S. :
Le fonctionnement technique de la nouvelle taxe explique la crispation des élus : le plafonnement à 3,5% de l’imposition de la valeur ajoutée, le fait que l’impôt soit progressif en fonction des résultats de l’entreprise et l’exonération de celles qui se situent en dessous de 250 000 euros de chiffre d’affaires. Mais selon moi le principal problème de cette réforme est ailleurs. La vraie question est de savoir combien va produire la nouvelle taxe, et si cette somme sera supérieure à celle que rapportait la taxe professionnelle. Je crains que ce ne soit pas le cas et que, pour compenser la perte, les collectivités soient obligées d’augmenter le taux de la taxe d’habitation et de la taxe foncière, ce qui reviendrait à ponctionner davantage les ménages. Sur un budget de fonctionnement de 35 millions d’euros pour Agen, la taxe professionnelle représente tout de même 18,5 millions d’euros, s’il ne vient à manquer ne serait-ce que deux millions, ce sera problématique !

@ !: La crainte derrière tout cela, c’est de voir vos ressources diminuer…
J. D. du S. : Evidemment, je demande donc à voir, j’attends de prendre connaissance des décrets d’application et des simulations promises par le ministère de l’Economie en début d’année. J’ai vraiment l’impression qu’il y a un mélange d’intentions derrière cette réforme : une volonté louable de mettre fin à un système absurde mais qui va de pair avec l’idée moins vertueuse de vouloir maîtriser et contrôler les recettes des collectivités locales alors qu’elles sont de bien meilleures gestionnaires que l’Etat.

@ !: Pourront-elles le rester avec à leur tête un conseiller territorial unique en charge des politiques départementales et régionales, comme le prévoit la réforme des collectivités territoriales ?
J. D. du S. :
Jai déjà défendu cette idée d’un conseiller territoriale unique lors de la dernière campagne présidentielle de 2007, derrière François Bayrou. Pour moi, un tel conseiller a du sens et est réalisable concrètement. Il impose surtout que la région devienne la collectivité leader qui dispose de la clause générale de compétence – elle peut intervenir dans tous les domaines – aux dépens du département. Cela signifie que ce dernier abandonne la fonction d’aides aux communes, qui le fait finalement agir dans tous les champs, pour se centrer sur l’action sociale et les collèges, ses prérogatives de départ. Dans ce cadre là, je ne suis pas inquiet quant à notre capacité à mettre en place de nouveaux équilibres financiers entre collectivités. En revanche je me pose la question de la proximité. Peut-on gérer les politiques publiques agenaises, comme l’apprentissage ou la formation professionnelle, depuis Bordeaux qui est à plus de 140 kilomètres ?

Un scrutin qui fait l’unanimité contre lui

@ !: Partagez-vous les critiques violentes à l’encontre du mode de scrutin de ce conseiller territorial, bon nombre d’élus y voyant une manipulation du gouvernement en vue de faciliter la victoire de l’UMP aux prochaines élections locales ?
J. D. du S. :
Ce scrutin fait l’unanimité contre lui. Il s’agit d’un vote à un tour uninominal avec une faible dose de proportionnelle, pour les bulletins des candidats non élus. Bref c’est une bizarrerie, très choquante, créée pour faire gagner les grands partis aux élections. Si l’UMP pense pouvoir conquérir le local de la sorte, au lieu de réaliser sur le terrain une large alliance à droite, il se trompe. Pour que le scrutin s’appuie sur des principes sains, il faut suivre l’exemple allemand, qui a fait se preuves depuis longtemps : les électeurs y choisissent leurs représentants locaux pour moitié par un scrutin uninominal et pour moitié par un vote à la proportionnelle avec un bulletin différent pour chaque scrutin ce qui permet de savoir clairement où va chaque voix.

@ !: Tout est-il à jeter dans cette réforme, sachant qu’elle reconnaît sa place à l’intercommunalité, une entité que vous défendez ?
J.D. du S. :
Cette partie là fait consensus parmi les élus puisqu’elle met fin aux communes isolées et fait émerger une intercommunalité à la française large et forte. Je suis dans cette logique avec ma volonté d’agrandir l’actuelle communauté d’agglomération d’Agen pour réunir un bassin de vie de 100 000 habitants actuellement découpé en quatre. Dans cette optique, la réforme sera un bon instrument.

Recueilli par Estelle Maussion
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