A la rencontre des nouveaux maires de la CUB: épisode 4, des tensions avec l’opposition


Richard Duart
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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 25/08/2014 PAR Mathieu Presseq

Quelle situation ont-ils trouvé le premier jour de leur prise de fonction ? Pour le nouveau maire socialiste de Mérignac Alain Anziani, dauphin de Michel Sainte-Marie, la question ne se pose pas. En revanche, quand les successions s’accompagnent d’une alternance politique, les surprises peuvent être nombreuses. Le maire UMP de Pessac Franck Raynal dit avoir été frappé, en prenant les responsabilités de la mairie, de voir combien il y avait de décisions laissées en attente sur de grands enjeux, sous la mandature de Jean-Jacques Benoît (PS). « Il n’y a pas eu de très mauvaises décisions prises, il y a eu simplement une lenteur de la décision politique et de l’action administrative. La première année, le rythme était correct, un certain nombre de choses ont été faites sur la lancée de la campagne électorale. Puis il y a eu quatre années d’attentisme. Ce mandat, ça a été pas mal d’annonces, des choses qui démarrent et puis s’arrêtent, des choses mal assurées qui n’ont pas pu être réalisées. Comme, par exemple, le projet Save ou la salle sport événement de Bellegrave ». D’où l’accélération qui lui a été demandée dès sa prise de responsabilités en avril dernier. Pour Jean-Louis Haurie, conseiller municipal d’opposition et jadis adjoint de Jean-Jacques Benoît, Franck Raynal fait une très mauvaise analyse. Le socialiste défend le bilan de l’ancienne municipalité, exemples à l’appui. « Sur la question des rythmes scolaires, quand Franck Raynal a pris ses fonctions, le dossier était prêt car il avait été conduit pendant une quinzaine de mois pour pouvoir être mis en place en septembre. Aussi, le maire s’est fait photographier à la rentrée scolaire devant un tableau numérique installé dans les écoles. L’équipement de la totalité des écoles en tableaux numériques, c’est quelque chose qui a été acté sous l’ancienne municipalité. Effectivement, pour Bellegrave, la position qu’on a eu a été de dire : les finances étant ce qu’elles sont, et avec le désengagement partiel des banques, réduisons la voilure et gardons un projet ambitieux mais de moins grande ampleur que ce qui était prévu au départ ».

Des dérives…L’édile centriste de Saint-Médard-en-Jalles, Jacques Mangon, s’est plaint lui aussi que de grands dossiers aient été  encalminés pendant le mandat précédent. « Saint-Médard est une ville avec d’énormes atouts, qui étaient insuffisamment valorisés par l’ancienne municipalité. Sur le plan des grands chantiers, beaucoup d’erreurs ont été faites. En laissant passer la question du tramway, par exemple, mais aussi sur le plan de l’urbanisme. Sur le plan financier, ce n’était pas la catastrophe, même si on a découvert qu’on avait un peu moins dans les caisses que ce que l’on aurait aimé avoir ».

De son côté Anne-Lise Jacquet, nouvelle élue centriste d’Artigues-près-Bordeaux : « il y a eu une dérive au niveau des frais du personnel et du fonctionnement et un manque de rigueur dans la gestion financière ». Ce que conteste la socialiste Françoise Cartron, en charge de la commune de 1995 à 2012 (avant de devenir sénatrice et de céder sa place à Jean-Claude Bergougnoux). « Quand j’ai laissé la commune il y a deux ans, tous les clignotants étaient au vert. On était dans les cinq ou six communes les moins imposées et les moins endettées de la CUB. On était à peine à 4% d’endettement ». Elle reconnaît toutefois qu’il y a eu une augmentation des frais de personnel au cours des six derniers mois de mandat de son successeur, Jean-Claude Bergougnoux, qu’elle justifie par le remplacement de trois personnes en congés maladie.

Des relations avec l’opposition pas toujours au beau fixeAnne-Lise Jacquet regrette également ses relations tendues avec l’opposition. « Je veux associer l’opposition au projet mais pour l’instant, en conseil municipal, je ne les ai pas trouvés très constructifs. Ils s’en prennent plutôt à la forme qu’au fond. C’est un peu dérangeant quand on me reproche une virgule qui manque dans un texte, plutôt que de me dire que ce projet n’est pas assez bien pour les Artiguais. Mais je ne les traiterai pas comme moi j’ai été traitée quand nous étions dans l’opposition », rassure-t-elle. Ce qui a le don d’agacer Françoise Cartron. « Mme Jacquet pouvait venir à toutes les commissions, toutes. Elle avait dans le journal municipal et dans le flash sa tribune libre à elle, que je n’ai jamais censuré. Elle ne connaissait pas ses dossiers et ne faisait que de la polémique. On ne pouvait pas coopérer avec elle. Au conseil municipal, elle arrivait avec une déclaration écrite, toute prête et politicienne à l’excès et c’était tout. Il n’y avait pas d’échange », lâche-t-elle.

Jacques Mangon, maire de Saint-Médard-en-Jalles.Si Anne-Lise Jacquet a émis le souhait d’ « agir avec beaucoup plus de transparence que la gestion précédente », Françoise Cartron lui reproche de ne pas laisser de place à l’opposition. « Dans la lettre d’informations municipale qu’elle a fait paraître en mai, il y a des photos de tous les élus de la majorité mais pour les élus d’opposition, elle s’est contentée d’une phrase avec leurs noms ». On a pu vérifier, c’est exact. « J’ai été choquée, je n’ai jamais vu un tel boycott des élus d’opposition dans aucune commune ». Pourtant, la maire centriste l’assure : « je suis la maire de tous les élus, et les élus d’opposition ont leur place au sein du conseil municipal et dans les commissions municipales ».

Cette ambiance  au conseil municipal n’est pas non plus étrangère à Alain Turby, le nouveau maire centriste de Carbon-Blanc. S’il confie que les relations avec l’ancienne majorité socialiste de Nicolas Madrelle sont difficiles, il avoue toutefois avoir de très bons rapports avec la minorité communiste « A gauche autrement ». Et de noter un clivage au conseil municipal entre deux oppositions distinctes, à savoir deux nuances de gauche. « Mes adversaires maintiennent que nous sommes de droite, le disent et l’écrivent. Mais je ne combats pas au conseil municipal des idées de gauche. Il m’arrive très fréquemment de dire à Annick Becerro (N.D.L.R. : leader de « A gauche autrement ») : je suis d’accord avec vous. J’ai repris le principe de la cogestion de la CUB. Il n’y a pas d’opposition, je parle de minorité. On est dans une démarche où ils n’exercent effectivement pas de responsabilité mais où ils contribuent à l’effort et participent au débat ».

Mauvais perdants ?Cette amertume de l’ancienne municipalité, Alain Turby et Anne-Lise Jacquet s’accordent pour l’expliquer par une attitude de mauvais perdants. « Ils étaient dans la majorité, ils sont dans l’opposition. Je comprends que c’est compliqué pour eux mais il faut qu’ils digèrent certaines choses. J’ai un regard bienveillant envers eux », raconte Anne-Lise Jacquet. Franck Raynal ne dit pas autre chose. « J’avais d’excellentes relations avec les élus de la majorité quand moi-même j’étais dans l’opposition. Mais la nature humaine est ainsi faite. Les élus de l’opposition qui appartenaient à la majorité précédente semblent être particulièrement déçus de leur situation et sont beaucoup moins chaleureux avec moi que lorsqu’eux-mêmes étaient majoritaires et moi dans l’opposition. Moi, je n’ai pas changé d’attitude ». Pour Jean-Louis Haurie, conseiller municipal d’opposition à Pessac, ces tensions ne résultent en aucun cas de l’échec de l’ancienne municipalité à se faire réélire : « on a été battus et on assume notre défaite sans acrimonie car c’est la loi de la démocratie », plaide le socialiste. Mais au contraire de la pratique du nouveau maire : « le maire n’a pas vis-à-vis de l’opposition le respect qu’il devrait avoir ».

Seul Jacques Mangon, le premier magistrat de Saint-Médard-en-Jalles, avoue avoir gardé de très bons rapports avec l’opposition. « Je sais ce que c’est que d’être élu d’opposition et j’ai beaucoup de respect pour cette fonction. On leur a donné beaucoup d’outils qu’ils n’avaient pas, en termes d’accès, de présence dans les commissions. J’aurai à cœur d’éviter toutes les mesquineries que l’on peut faire à l’opposition. Le rôle de l’opposition en démocratie est absolument fondamental. S’il n’y avait pas d’opposition, la démocratie serait malade ».

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