Naufrage du Grande America : Oléron prête à recevoir des oiseaux mazoutés


Anne-Lise Durif

Naufrage du Grande America : Oléron prête à recevoir des oiseaux mazoutés

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 20/03/2019 PAR Anne-Lise Durif

Une hécatombe qui ne devrait pourtant pas se reproduire au vu du peu de fioul contenu dans les cales du Grande America (2200 t), comparé aux dizaines de milliers déversés par les pétroliers qu’étaient L’Erika et Le Prestige. Si les résidus de fioul perdus par le Grande America devraient plutôt arriver sur nos côtes sous forme de boulettes (lire les dernières mises à jour), le mazoutage d’oiseaux par des flaques résiduelles ne reste pas exclu. Principe de précaution oblige, l’unique centre de sauvegarde des oiseaux sauvage de Charente-Maritime (celui de la LPO est à Audenge près d’Arcachon, ndlr) se tient donc prêt à accueillir jusqu’à 200 à 300 oiseaux selon leur envergure. « En cas de marée noire, les premiers touchés sont les alcidés (qui plongent dans l’eau pour se nourrir, ndrl) comme les guillemots et les macareux », explique Christian Bavoux, « puis les oiseaux limicoles qui se nourrissent sur l’estran, comme les bécasseaux, les courlis, les chevaliers et les huîtriers. Tout dépend comment le mazout va se déplacer ».

Le nettoyage du mazout : un protocole long et délicat

D’ordinaire, les oiseaux malades ou fatigués retrouvés sur nos côtes sont amenés au centre par des promeneurs. « L’idéal dans ces cas là, c’est de mettre des gants pour se protéger d’éventuels coups de griffes ou de becs, de mettre l’oiseau dans une couverture ou dans un carton fermé, avec des trous sur les côtés et du papier journal au fond, et de nous les amener », poursuit Christian Bavoux, « mais en cas de mazoutage, c’est différent. Tout dépend de ce que nous dira la préfecture maritime du niveau de toxicité du produit lorsque cela arrivera ».

Christian Bavoux et Catherine Lemarchand

Christian Bavoux et Catherine Lemarchand devant les volières du centre.

Une fois pris en charge, les oiseaux mazoutés ne sont pas immédiatement lavés. « On commence par les réchauffer en les plaçant dans un box muni d’une lampe à infrarouge, afin qu’ils retrouvent leur température corporelle. Puis on leur donne à boire et à manger », explique l’une des soigneuses, Catherine Lemarchand, « une fois qu’ils ont repris des forces, généralement au bout de deux ou trois jours, on les lave avec un savon très doux type savonnette pour bébé, car il n’existe pas de savon spécial pour oiseaux ! L’opération dure trente minutes, pas plus, car même en étant très précautionneux, le nettoyage stresse l’animal. Or, le stress est une des causes principales de mortalité. Il vaut donc mieux y aller par étapes. »  Les survivants du mazoutage restent généralement deux à trois mois en convalescence au centre. Mazoutés ou non, les oiseaux présentant des fractures ou des blessures nécessitant une intervention chirurgicale sont pris en charge par le vétérinaire bénévole du centre, le Dr Lagadec, basé à Le Château, commune limitrophe de Dolus. Malgré des normes d’hygiène digne d’un hôpital, le centre de sauvegarde ne possède pas d’agrément pour des opérations. « C’est un centre de soins et de bien-être de la faune sauvage, pas un cabinet vétérinaire », précise Christian Bavoux, dont le centre accueille aussi de petits animaux comme les hérissons ou les renards.

Les nouvelles volières du centre

Les nouvelles volières installées fin 2018 vont permettre d’accueillir des oiseaux de grande envergure, type rapace ou cormoran.

« Des champions olympiques de la survie »

Pour ce nouvel épisode de pollution maritime, les 5 membres de l’équipe de Christian Bavoux vont être renforcés par une soigneuse supplémentaire venue d’un autre centre, et de quelques bénévoles de la SPA de Saintes. « Sur le plan technique et matériel, nous sommes prêts », affirme Christian Bavoux, « depuis le naufrage, nous nous préparons : nous avons aujourd’hui tout ce qu’il faut en moyens de contention, de chauffage, de litières, de produits de soin et d’alimentation. » De nouvelles volières ont été fort heureusement installées fin 2018, permettant d’accueillir notamment des oiseaux de grande envergure. Le centre a relâché la plupart de ses convalescents la semaine dernière, aussi bien pour faire de la place que pour leur laisser le temps de partir avant l’arrivée d’une éventuelle marée noire. « Et aussi parce que c’est le printemps », précise Christian Bavoux, qui se réjouit de ce changement de saison : « Normalement, la plupart des oiseaux en migration sur notre territoire sont déjà repartis, ce qui devrait permettre de limiter les pertes ». Il ne se fait cependant aucune illusion : « Dans le cas d’une marée noire, seuls 7 à 10% des oiseaux mazoutés réussissent à survivre. Le démazoutage reste une opération longue et délicate ». Si le centre arrive globalement à sauver chaque année 20% de ses pensionnaires volants, le taux de survie reste très variable selon les espèces et l’état de santé de l’animal. « Les oiseaux marins sont des champions olympiques de la survie. Souvent, quand on les retrouve sur nos plages, ils ont déjà lutté un moment et ils sont épuisés, voire mourants. Les plus faibles meurent quelques jours après leur arrivée au centre.»

L’équipe du centre se réjouit néanmoins de l’intérêt grandissant du public pour les oiseaux. Depuis le naufrage, le personnel a reçu de nombreux appels pour des renseignements ou des propositions d’aides. Et la consultation de leur page Facebook est passée de moins de 5000 vues à plus de 15 000. Une veille téléphonique avec des amplitudes horaires plus larges a également été mise en place.

Note / Centre de sauvegarde de la faune sauvage du Marais aux oiseaux de Dolus d’Oléron, Tel :  05 46 75 37 54.

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