Entre les lignes: tu ne convoiteras pas… la cupidité, à la source de la crise


Jean-Philippe Larramendy

Entre les lignes: tu ne convoiteras pas... la cupidité, à la source de la crise

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 07/10/2013 PAR Joël AUBERT

A l’origine du mal, la cupidité. « La cupidité est à distinguer de la recherche du gain qui est une réalité anthropologique, un ressort essentiel de l’action de l’homme vers le développement de ses intérêts propres ». Et l’auteur d’entreprendre sa démonstration sous le double parrainage du pape Benoît XVI qui, en 2009, consacre une Audience générale à Ambroise Autpert, un moine bénédictin du VII° siècle qui « dénonce la cupidité comme la racine de tous les maux » et du prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz qui publie la même année « Le triomphe de la cupidité. »

Dix années follesJean-Philippe Larramendy ne manque pas de rappeler que la crise n’a pas surgi de nulle part mais qu’elle est née de ces dix années folles (1979-1989) où le système libéral semblait en quelque sorte avoir atteint son apogée, alors que s’effondrait le communisme du coté de Berlin et que Francis Fukuyama osait annoncer « The End of History », la fin de l’Histoire. Les vannes s’ouvraient pour l’avénement de cette trop fameuse « démocratie libérale » dont le bras financier armé s’appelait Alan Greenspan, le patron de la réserve Fédérale américaine, la FED. Liquidités à tout va, dérégulation systématique du cadre réglementaire mis en place pour sortir de la grande crise de 1929: voici que déferle la grande fraude à 50 milliards de dollars de Bernard Madoff, tandis que les agences de notation sont inopérantes… L’argent facile, l’endettement comme modèle de « l’Américan way of life », l’accélération déraisonnable du marché de l’immobilier… le marché se retourne alors et précipite les ménages et les banques dans la faillite. La chute de Lehman Brothers sonnera le tocsin, contraignant les dirigeants occidentaux à réagir, en toute hâte, pour éviter l’effondrement total du système. Ce rappel historique, très cursif, que l’auteur a nourri de quelques chiffres clés, outre qu’il est passionnant à « relire » est la porte d’entrée dans la partie la plus profonde et personnelle de l’ouvrage, celle qui entreprend d’explorer les racines de la cupidité.

L’exemple de la plus grande coopérative du mondeJean-Philippe Larramendy les trouve dans la pensée biblique et, singulièrement, soixante cinq fois dans la Bibe hébraïque. C’est  le « chamadh » . Et cette parole du prophète Ezéchiel:  » les chefs cupides sont comme des loups qui déchirent une proie, prêts à faire périr des gens pour en tirer profit. » Et puis vint Jésus, Jésus de Nazareth et cette phrase extraite des Béatitudes: » Heureux les pauvres de coeur: le Royaume des Cieux est à eux ». L’auteur puise alors, pour les besoins d’une confirmation, ses références dans les évangiles où les exemples abondent avant de faire appel, treize siècles plus tard, à Saint Thomas d’Aquin qui classe la cupidité parmi les sept péchés (ou vices ) capitaux. Enfin, il ne pouvait pas ignorer les derniers enseignements de l’Eglise d’aujourd’hui, tels qu’ils ressortissent de l’encyclique « Caritas in veritate », publiée en juillet 2009 « porteuse d’une critique radicale de la cupidité sous ses différentes facettes. » Mais, comme il ne saurait y avoir de constat d’impuissance, Jean-Philippe Larramendy met en avant, une nouvelle fois, le modèle coopératif, tant on sait qu’il est attaché à son Pays Basque (être basque aujourd’hui) et à une entreprise, un groupe, qui semble défier la crise, même s’il a aujourd’hui plus de mal à l’affronter: la grande coopérative de Mondragon…
Mondragon, du nom de ce petit village de la province du Guipuzcoa où, en 1956, un jeune prêtre, José Maria Arizmendiarrieta, l’a portée sur les fonts baptismaux. Mondragon, c’est la plus grande coopérative du monde, celle qui emploie 83.000 personnes dont 15.000 à l’international, un géant de l’électroménager entre autres qui porte des marques comme Fagor ou Brandt, une division ‘connaissance’ avec quatorze centres de recherches, de formation, d’apprentissage, une université… C’est, d’abord, un modèle de gouvernance unique à pareille échelle, celui des travailleurs-associés, les « socios » directement associés à la prospérité de leur coopérative. Un paravent contre les débordements du capitalisme financier mais pas une garantie absolue contre la rudesse du marché. Mondragon a du licencier des travailleurs non associés mais s’en sort beaucoup mieux que les autres entreprises d’Espagne.
Est-elle pour autant à l’abri des mutations de l’économie mondiale, et surtout des comportements humains? Les valeurs qu’elle défend, depuis l’origine, ne rencontrent plus forcément les mentalités d’une société qui change.  Jean-Philippe Larramendy n’élude pas ce redoutable nouveau défi, conscient qu’il est vital pour Mondragon de régénérer la philosophie qui anima son fondateur.

1.Tu ne convoiteras pas, De la cupidité dans la crise actuelle (15euros) www.editions-bayard.com


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