Alain Anziani, nouveau sénateur PS de Gironde plaide la primauté de la politique sur le marché


Le vice-président chargé des questions d'économie à la région , adjoint à Mérignac, vient de faire son entrée au Sénat à 57 ans. Il y fait figure de jeunot. Il voulait les finances. Ses camarades ont estimé que son profil de juriste - il est avocat -

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Alain Anziani, nouveau sénateur PS de Gironde plaide la primauté de la politique sur le marché

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 20/10/2008 PAR Marie Paule Memy

« Tu as ton bureau? Et l’ordi, il fonctionne? C’est le canapé qu’on a commandé, je pourrai dormir dessus »… Alain Anziani emménage au Palais du Luxembourg. Ses premières impressions sont celles d’ « une bonne maison où la courtoisie est dominante » et où « on ne travaille pas là où l’on nous attend. La séance publique est un spectacle bien huilé, mais c’est dans les réunions de commissions que s’élabore le vrai travail ».

@qui! : vous venez d’être nommé membre de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. L’intitulé n’a pas de quoi secouer les enthousiasmes.
Alain Anziani : C’est pourtant une commission qui touche à de nombreux domaines. Pour donner une idée, le premier rapport sur lequel je vais me pencher est celui du budget de l’Etat dans les régions. Cela n’a pas l’air très passionnant, mais, pour prendre quelques exemples, c’est là que se pose la question de savoir si l’Etat doit ou pas fermer des sous-préfectures; de la façon dont il s’implique dans tout ce qui est culte, de la lutte contre les sectes au financement des mosquées; ça touche aussi à la réforme électorale: le redécoupage des circonscriptions relève de cette commission.

Garder les départements mais redistribuer les compétences et la fiscalité

@! : Sénateur, vous représentez les collectivités locales. Estimez vous que la France compte de trop nombreux échelons: communes, communauutés de communes, pays, départements, régions. Etes vous pour la suppression du département par exemple?
A. A. : La question n’est pas tant celle de la multiplicité des échelons que celle des compétences de chacun. Aujourd’hui tout cela est devenu illisible; tout le monde s’est mis à financer un peu de tout. Alors on ne sait pas à qui l’on paie ses impôts locaux, ni pourquoi et qui fait quoi exactement. Si je prends le centre d’appels de Bouygues à Mérignac : l’Europe a versé des aides, l’Etat aussi et encore la Région, le Département, la Communauté urbaine et Mérignac. Ces financements croisés, ce sont six dossiers qui mobilisent des personnels dans six administrations. Voilà une source de confusions, parce que ça devient illisible pour les gens, et de surcoûts aussi. Je plaide pour que chaque collectivité ait son bloc de compétences et sa fiscalité.

@! : A la Région les compétences en économie et en enseignement, du collège à l’université par exemple? Ce qui supposerait de transférer les collèges, actuellement sous la responabilité des départements, aux régions?
A. A. : Pourquoi pas? Le département pourrait devenir un centre de ressources pour les communes et les communautés de communes, garder tout ce qui relève de la proximité, l’action envers les personnes âgées, les handicapés, les routes mais aussi les questions d’équipements publics.

@!: Ce n’est pas la piste envisagée du côté du gouvernement, où l’on réfléchit plutôt à une fusion et à faire l’économie d’un niveau en ayant des conseillers par départements qui seraient aussi conseillers régioaux?
A.A. :
Ca, c’est le modèle de Paris où l’élu municipal est aussi conseiller général. Je suis contre l’idée qu’il y aurait trop d’élus. Il faut réhabiliter le politique , et se rendre compte qu’un élu est le premier maillon du service public. Si vous supprimez beaucoup d’élus, vous supprimez aussi beaucoup de relais. Non, je penche plutôt pour une clarification des lois Defferre de décentralisation. Elles ont 25 ans, il faut les remettre à plat , redéfinir des compétences claires pour chaque niveau.

@! : Souhaitez-vous que le l’on réforme le mode de scrutin du Sénat, qui surreprésente le monde rural?
A. A. : Il ne faut pas opposer les mondes rural et urbain, ils sont complémentaires. Mais on pourrait aller un peu plus loin pour trouver un mode de scrutin qui rééquilibre les choses, en élargissant la base électorale.

« Ce qui m’intéresse, c’est ce qui va sa passer au-delà du congrès »

@! : La Parti socialiste prépare son congrès, vous avez signé , avec d’autres Fabiusiens, la motion portée notamment par Martine Aubry. Que pensez-vous de la position prise par Martine Lignières Cassou, députée maire de Pau, qui refuse de s’aligner en attendant un ressaisissement d’un parti dont elle trouve la démarche actuellement suicidaire?
A. A. : Le PS souffre d’un manque de clarté dans les idées. Ce n’est pas qu’il n’en a pas, c’est que chacun a les siennes, et les socialistes sont dispersés. Nous ne sommes pas audibles parce que nous ne parlons pas d’une voix forte et unique. Sur le fond les approches sont elles très différentes? Je crois que non. Il y a certes des points forts de désaccord, mais ils sont marginaux en nombre. La dispersion vient aussi du fait que nous ne travaillons pas assez ensemble. J’en prends pour exemple la Loi sur le financement de l’économie, qui vise à apporter 10,5 milliards d’euros aux banques à cause de la crise financière et économique que nous traversons, et de la raréfaction du crédit. Le PS a été incapable de rassembler ses élus. Les députés de leur côté ont pris position après un débat très animé au sein du groupe, mais nous n’avons pas eu un travail en commun entre parlementaires. Comment voulez vous être entendus?

@! : La dispersion est entre autre liée à la concurrence entre leaders dans la perspective des prochaines élections présidentielles. Mais sur le fond, savez-vous encore qui vous êtes?
A. A. : Un congrès , c’est fait pour bâtir et suivre une ligne politique. Pas pour sacrer un roi ou une reine. Nous aurons un autre congrès dans trois ans et là ce sera le moment de désigner le ou la candidate à l’élection présidentielle. N’usons pas nos excellents candidats! Là, il nous faut reconquérir l’opinion sur des positions précises. Je ne crois pas, hélas, que le congrès va servir à cela car il y a trop d’arrières pensées. Alors ce qui m’interesse, c’est ce qui va se passer a-delà de ce congrès, dans les années qui viennent. Je crois que Delanoë a commis un impair terrible en relançant l’idée du social-libéralisme. C’est quoi le social-libéralisme? C’est l’idée que l’on accepte pleinement les lois du marché. Il est comme il est, on n’y peut rien, et à côté le pouvoir politique doit jouer les infirmiers. C’était l’école de pensée dominante dans le traité européen qui a été rejeté. L’autre école dit d’accord, on accepte le marché, mais il faut des Etats forts pour le réguler, l’encadrer, parce que la loi du marché est celle du profit rapide et pas pour le plus grand nombre. C’est cette conception là qui m’intéresse, je reste profondément keyneisien.

Propos recueillis par Marie-Paule Mémy


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