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L'ÉDITO

 par Cyrille Pitois Cyrille Pitois
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03/03/2023

Des vaches qui tirent des larmes

Autant l'avouer, je ne pensais pas un jour sentir poindre les larmes en visionnant un documentaire sur un élevage de bovins. Mais "l'Amour vache", d'Edouard Bergeon dont on peut lire l'entretien accordé à Aqui,  auteur de films de cinéma (Au nom de la terre, 2019) et de films documentaires, est une émouvante plongée dans la vie ordinaire et pourtant mouvementée d'une ferme du Béarn. Le cinéaste, fils de paysan lui-même, a suivi pendant trois ans, les malheurs et les réconforts d'un couple d'éleveurs dont le troupeau est frappé par la tuberculose bovine.

Sylvie et Bernard Dahetze dont la ferme d'Ozenx-Montestrucq ressemble à beaucoup d'autres, vont devoir envoyer tout le troupeau à l'abattoir pour une seule bête détectée malade. Sylvie et Bernard ne sont évidemment pas des comédiens de cinéma, pas plus que Gisèle la mère de Bernard ou leurs enfants également atteints par cette galère qui surgit dans une vie de labeur, aussi droite qu'épuisante. Les bovins sont beaucoup plus touchants que des figurants.

Oubliez les confrontations stériles entre écolos et productivistes. Nous sommes ici loin des postures sur le bien-être animal et autres discours boboïsant de sachant tout. Edouard Bergeon capte sans artifice, la relation magnifique entre un éleveur et ses bêtes, la colère contre une décision prise hors sol mais que le couple ne va pas chercher à contourner parce que ces gens sont légalistes et font confiance, malgré tout, au système.

Ils se soumettent aux décisions violentes de l'administration, aux oukases de la banque, aux injonctions vétérinaires. Pas le choix. Une fois pourtant, ils résistent. Lorsque la fonctionnaire des services préfectoraux les menace par téléphone de tout annuler si le chargement des bêtes est filmé par l'équipe de tournage. On a juste envie de dire bravo et merci  d'avoir accepté la présence de la caméra dans tous les moments difficiles, d'avoir livré à Edouard Bergeon avec tant de dignité et de pudeur la réalité des tracas, des nuits sans dormir, des idées noires, du rouge à la banque, de l'avenir qui s'assombrit toujours davantage, de ces heures et ces heures de travail, de la solidité d'une famille unie, de la vie en milieu rural.

Ce documentaire trace un sillon beaucoup plus large que les difficultés d'un élevage. Il balaie le large périmètre d'une vie à la campagne dans les années 2020. Et nous les urbains qui idéalisons ou fustigeons la ruralité en croyant la connaître, cela nous remet sans violence à notre juste place.

Ce film c'est aussi des pépites de bonheur et des raisons d'espérer bien sûr, sans tout dévoiler. A consommer sans modération, ce dimanche sur France 5 et disponible sur france.tv jusqu'au 12 juillet.

Ne pas le visionner confère à la faute.

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