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PUBLIÉ LE 09/01/2024 PAR Cyrille PitoisAqui!: Vous incarnez la huitième génération d’une famille de Saint-Emilion. Comment avez-vous eu l’idée d’explorer le vin désalcoolisé ?
Coralie de Boüard: A l’origine, c’est une demande précise des Qataris du PSG au Parc des Princes. Ils aspiraient eux aussi à de jolies flacons sur une joie table. Par ouverture d’esprit, j’ai promis d’essayer sous réserve de se rapprocher qualitativement de la plus haute qualité de mes vins, le Château Clos de Boüard. C’est un travail personnel de plus de deux ans, partagé uniquement avec mon bras droit, le directeur technique, Stéphane Poirier. Désalcooliser, c’est toucher au charme et à la gourmandise. Il faut donc se projeter dans le résultat escompté pour rééquilibrer le produit. Tout le process de vinification est respecté.
Bousculer les traditions
@!: Comment a réagi votre entourage professionnel lorsque vous avez entamé la démarche ?
CdB: Tous n’ont pas compris ni accepté y compris dans ma propre famille. La viticulture est un milieu imprégné de traditions. Aujourd’hui la démarche de diversification est comprise. C’est un vin à part entière qui a franchi les mêmes étapes que les vins traditionnels. Il garde les marqueurs du vin, la trame tannique, le nez, la structure en bouche. La seule chose qui lui manque c’est la chauffe de l’alcool qui donnerait une perception plus importante de longueur en bouche. Mais c’est un vin que je revendique entièrement sans aucun arôme ni conservateur ajouté.
@!: Comment est-il perçu par le consommateur ?
CdB: Le vin désalcoolisé est capable de générer du plaisir pour tous, à partager à sa table avec une femme enceinte, un grand sportif, quelqu’un qui a des convictions religieuses ou des pathologies particulières. A noter qu’il est faible en calories : 11 calories par verre, contre 85 calories pour un verre de vin. Bien sûr, l’alcool donne du panache au vin et les saveurs ne sont pas les mêmes, avec davantage de sapidité qui surprend un peu pour l’appellation. Mais c’est un produit très agréable à la dégustation. J’ai des clients qui m’achètent les deux gammes. Désalcoolisée pour boire en semaine; traditionnelle pour le week-end.
Une nouvelle gamme pour de nouveaux besoins
@!: C’est dire que vous ne devenez pas militante d’une nouvelle chapelle ?
CdB: Dès le premier épisode au Parc des Princes, j’ai vendu 35 000 bouteilles désalcoolisées. En trois saisons, nous atteignons 50 000 bouteilles par an alors que nous vendons 220 000 bouteilles de vins traditionnels. La France est très demandeuse en vin désalcoolisé, l’Allemagne, la Suisse, les Pays-Bas, et aussi le Japon et les Etats-Unis nous en achètent. Les chefs étoilés nous demandent des échantillons de Prince Oscar pour préparer des accords mets-vins. Le 5 étoiles Intercontinental à Bordeaux le sert comme vin d’accueil. Je le considère comme une nouvelle gamme qui répond à de nouveaux besoins. Et comme chef d’entreprise, je ne vous cache pas qu’en période de crise, il prend toute sa part dans la diversification du domaine.
@!: Plus cher ou moins cher ?
CdB: Après plusieurs essais auprès de différents industriels, ce vin part jusqu’à la frontière allemande par camion, pour être désalcoolisé par distillation sous vide et à froid ce qui augmente le coût de production. Pour autant nous le commercialisons un peu mois cher pour renforcer son attractivité et accompagner la métamorphose du consommateur depuis deux ans. J’avais l’habitude de dire : je fais du vin pour vous. Maintenant, je fais du vin pour tous, sans me détourner de mon métier de viticultrice qui est de partager une passion et générer du plaisir à travers des vins de terroirs.
Masterclass autour des vins sans alcool
Conférence-dégustation autour des vins sans alcool avec Coralie De Boüard et Frédéric Chouquet-Stringer, spécialiste du vin sans alcool et prestataire de la désalcoolisation La Zènothèque; jeudi 11 janvier à partir de 19h, au Dock du Vin, 165 Av. du Général de Gaulle, à Saint-Médard-En-Jalles. Entrée gratuite sur inscription
