Pourquoi les taxis préparent aussi une mobilisation à Paris?


Ils étaient près de 1000 taxis à Bordeaux et dans d’autres villes de Nouvelle-Aquitaine, lundi dernier. Mais leurs coups de klaxon n’ont pas suffi à les faire entendre. Pourquoi les taxis sont si en colère et prêts à monter à Paris en février?

manifs taxisDR Aqui

Après les opérations escargot autour de Bordeaux, les taxis de Nouvelle-Aquitaine envisagent de poursuivre la route jusqu'à Paris.

Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 01/02/2024 PAR Cyrille Pitois

Les réunions au ministère des transports et avec la Caisse nationale d’assurance maladie s’enchaînent à Paris. Mais sans résultat probant pour tous ces artisans qui depuis les territoires ruraux transportent chaque jour de nombreux malades vers les hôpitaux et les cabinets médicaux spécialisés, pour des consultations, des dialyses, des chirurgies, des protocoles de chimiothérapie…

Qu’est ce qui motive cette mauvaise humeur qui prend de l’ampleur? Explications de Baptiste Ondarts, taxi à Hasparren et Hélette, vice-président de l’Union nationale des taxis (UNT) en Pyrénées-Atlantiques et membre de l’Union des entreprises de proximité.

@aqui!: Au lendemain de la manifestation quasi historique de Bordeaux, avez-vous obtenu des avancées?

Baptiste Ondarts: C’est vrai que nous avons connu lundi à Bordeaux, un mouvement unitaire réunissant 750 véhicules venus de huit départements; tandis que trois autres départements de la région se mobilisaient aussi dans d’autres villes. Pour se souvenir d’une telle mobilisation de taxis, il faut remonter quinze ans en arrière. Malheureusement, le franchissement de ce premier cran n’a rien donné. Il va falloir passer un deuxième cran et préparer une mobilisation nationale à Paris, début février.

@!: Tous les taxis ne font pas exactement le même métier. En quoi ce mouvement concerne davantage ceux qui exercent en milieu rural ?

B.O.: C’est vrai qu’il y a les taxis de station en milieu urbain et ceux qui sont conventionnés pour le transport assis professionnalisé. L’impact est différent pour les deux catégories mais à terme, tous seront concernés. Aujourd’hui les taxis conventionnés travaillent selon deux tarifs. Celui fixé par chaque préfet, pour les courses ordinaires, par exemple 2,25 euros du km en Pyrénées-Atlantiques et le tarif sécu à 1,86 euro du km. On voit déjà qu’il y a un différentiel important.

Il ne faut trop nous mépriser. Alors que la caisse d’assurance maladie négocie les tarifs avec toutes les professions de santé, médecins, kinés, psychologues, ambulanciers… aucune concertation avec les taxis!

La sécu est un gros apporteur d’affaires mais pas le seul. Par exemple, pour les rapatriements, les assureurs paient le tarif préfectoral avec une remise de 10 %. Aujourd’hui, la caisse d’assurance maladie veut nous faire signer une nouvelle convention pour cinq ans, sans fixer de tarif. Comme si on faisait signer un contrat de travail à un salarié sans fixer son salaire.

@!: Quel est le risque pour vos entreprises artisanales ?

B.O.: On s’achemine vers une perte de la marge. Pour conserver son chiffre d’affaires, le taxi va chercher à faire plus de courses alors que la plupart d’entre nous sommes déjà complets. Nous allons donc rogner sur la qualité du service. Il faut savoir qu’aujourd’hui nous réalisons des tâches qui ne sont pas facturées : accompagner le patient jusque dans la salle d’attente, remplir les formalités d’admission, le rassurer. Nous avons choisi ce métier parce que nous aimons les gens. Mais il ne faut trop nous mépriser. Alors que la caisse d’assurance maladie négocie les tarifs avec toutes les professions de santé, médecins, kinés, psychologues, ambulanciers… aucune concertation avec les taxis.

@!: On évoque aussi une obligation de covoiturage. De quoi s’agit-il ?

B.O.: A côté de la bataille sur la tarification, menée avec la caisse d’assurance maladie, l’État établit une nouvelle règle obligatoire : le co voiturage des patients. Le plus lésé dans l’histoire ce n’est pas le taxi, mais le malade. Vous imaginez un patient qui sort d’une séance de chimiothérapie à qui on va imposer d’aller chercher deux autres malades sur d’autres sites de santé, avant de le reconduire chez lui. Au lieu de 30 minutes de transport, on va doubler ou tripler le temps de trajet à un moment où il a surtout besoin de repos.

@!: Cette nouvelle organisation permettrait aussi de substantielles économies.

B.H.: Que l’on cherche à faire des économies, ce n’est pas illogique et nous sommes prêts à y participer. Mais prenons l’exemple d’une opération en ambulatoire qui devient la règle aujourd’hui. Il y aura peut-être quatre transports à 100 euros entre le jour de l’opération et la visite post opératoire. Mais on évite deux ou trois nuits de chirurgie à 10 000 euros. Il faut lever le nez d’une logique strictement comptable et regarder les choses plus globalement. Une prise en charge qualitative des malades c’est aussi agir pour leur santé. Et nos patients ce sont les familles de tout le monde. Les taxis assurent 75 % des transports assis de malades! Si le covoiturage devient la règle, nous favoriserons une médecine à deux vitesses. Ceux qui auront les moyens ou les bonnes mutuelles paieront le supplément pour voyager seul.  Nous ne sommes pas là pour mener des actions dures, mais pour discuter et faire entendre la voix raisonnable de gens qui ont besoin de préserver la viabilité de petites entreprises qui irriguent de nombreux territoires ruraux.

Ça vous intéresse ?
Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

On en parle ! Hasparren / Pyrénées-Atlantiques
À lire ! MOBILITÉS > Nos derniers articles