Pays-Basque: une exception culturelle au « choc de la démographie » agricole?


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Pays-Basque: une exception culturelle au "choc de la démographie" agricole?

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 13/03/2015 PAR Solène MÉRIC

Côté pyramide des âges et « choc de la démographie » agricole, le Pays-Basque ferait presque figure d’exception au regard des autres territoires aquitains. Pour preuve les chefs d’exploitation basques ont en moyenne 46 ans quand leurs aînés girondins en comptent 10 de plus. Pour autant, et malgré un dynamisme reconnu sur l’installation agricole, la question de la démographie reste, ici aussi, importante. En effet, selon les chiffres de la DRAFF, 20% de la Surface Agricole Utile basque est appelée à changer de chef d’exploitation dans la décennie à venir, soit 23000 ha. Or dans 41% des cas (soit 20% de la SAU libérable), les exploitants de plus de 55 ans, ne savent pas encore quel sera l’avenir de leur exploitation, à leur départ en retraite.
Parmi les particularités basques, on note que seul 1% des exploitations reprises se destinent à des hors cadre familiaux, et que le nombre d’éclatement d’exploitations avec reprise partielle est par contre plus important qu’ailleurs sur le territoire de la SAFER Aquitaine Atlantique Par ailleurs, c’est dans la filière des herbivores que les reprises sont le plus anticipées par les futurs cédants, puisque c’est la destinée d’ores et déjà assurée de 82% de ces exploitations.

Anticipation très en amontUn chiffre que confirme Daniel Lartigue, éleveur ovin en Pays basque, même s’il appelle tout de même à la vigilance, notant que « chaque année on perd des producteurs, soit parce qu’ils arrêtent soit par ce qu’ils se regroupent en société ». Un regroupement en société qui porte un certain nombre d’avantages, et pourrait d’ailleurs faciliter le renouvellement des générations. D’abord pour les cédants, car ici comme ailleurs en Aquitaine, les perspectives de reprise sont meilleures pour les exploitations sociétaires que pour les exploitations individuelles. Ensuite aussi pour les nouveaux installés, considérant avec Daniel Lartigue que la forme sociétaire permet une meilleure organisation du travail, et donc aussi un peu plus de temps libre. Une dimension liée à la qualité de vie, qui tout autant que la question de la rentabilité ne laisse pas indifférent les candidats à l’installation, et sur laquelle, d’ailleurs, l’éleveur confie volontiers qu’il y a un effort à faire sur le discours : « nous avons tendance nous-même à parfois noircir un peu trop un métier que nous-mêmes ne sommes pas prêts à lâcher ».
Ce sentiment de « ne pas vouloir lâcher » est d’ailleurs aussi selon lui, un peu en cause dans l’impréparation des agriculteurs à céder leur exploitation. « Dans le cadre des diagnostics et repérages menés sur les futurs cédants pour les accompagner dans leur réflexion autour de la transmission, on s’aperçoit que beaucoup, y compris chez ceux qui voudraient céder, ne sont pas prêts. Soit que les habitations sont sur l’exploitation, soit qu’ils ne sont pas prêts à franchir le pas de voir se poser un regard nouveau sur un système d’exploitation qu’ils ont mis en place depuis 40ans. Et c’est tout aussi vrai dans le cadre familial.» Au programme donc une dose de psychologie et surtout « un travail de longue haleine à mener », et donc d’anticipation très en amont avec les cédants, pour préparer ce cap.

Pression urbaine et concurrenceMais fort de la dynamique d’installation existante en Pays basque, la question de l’anticipation compte ici encore beaucoup, prioritairement dirons certains, sur le maintien d’un foncier agricole, face notamment à « une pression urbaine toujours très forte », souligne Jean-Claude Saint-Jean, Président du Comité technique de la SAFER Pays Basque. Une priorité partagée par l’éleveur ovin qui au delà de la sauvegarde des espaces de production laitière, souligne aussi, au-delà des zones strictement agricoles, les questions à se poser sur les zones de montagne qui sont collectives mais indispensables à la transhumance.
Une concurrence des usages que subit aussi l’aire d’appellation d’origine protégée du Piment d’Espelette. C’est d’ailleurs en effet le principal souci pour Ramuntxo Lecuona, Président du syndicat de l’AOP Piment d’Espelette, dont la culture, (pour bénéficier de l’AOP) s’étend autour d’une dizaine de communes du Pays basque. Une production qui pourrait donc davantage être mise en danger par son caractère péri-urbain, que par l’absence de candidats à l’installation.
Car en effet, ce ne sont pas les vocations qui manquent pour cette production. D’une vingtaine de producteurs dans les années 90, ils sont 160 aujourd’hui répartis sur une SAU de 185ha. Et pour 2015, le président de l’AOP prévoit entre 20 et 25 producteurs nouveaux. Depuis le travail de relance de la production et l’obtention de l’AOP, « le développement est exponentiel », confirme-t-il. Il faut dire que les arguments sont nombreux pour travailler à l’attractivité : « pour une production de 20 000 pieds sur un hectare et un rendement de 500 g soit 10 tonnes de piments récoltés, le produit brut est de 30 000€, sans prendre en compte les différents leviers de valeur ajoutée. Or pour un hectare, l’investissement est d’environ 14 000 €…» Des chiffres pour le moins attractifs, qui expliquent aussi la diversité des producteurs: des pluriactifs, des reconversions, ou la pratique d’une culture complémentaire à une exploitation principale. Le défi de la production ici est donc de parvenir à ouvrir de nouveaux marchés au fil des nouvelles installations.

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