Les Choix d’Aqui ! Les derniers jours du monde vu par Arnaud et Jean Marie Larrieu : tactile, intriguant et apocalyptique


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Les Choix d'Aqui ! Les derniers jours du monde vu par Arnaud et Jean Marie Larrieu : tactile, intriguant et apocalyptique

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 23/08/2009 PAR Thomas Guillot

On se demande souvent si le cinéma français est audacieux. Avec son lot de chroniques sociales, de comédies dramatiques sur la bourgeoisie bohèmes ou les trentenaires en mal d’amour, sans compter les comédies boursouflées qui râflent pourtant la plupart des entrées. Dans un pays où Woody Allen c’est Claude Chabrol, les frères Larrieu sont peut-être nos frères Coen. Le parallèle est facile parce qu’eux aussi ils font leur films à deux, et qu’ils ne rentrent pas dans le moule. Audacieux sur le fond, Arnaud et Jean-Marie l’étaient déjà bien avant ce film, dans leur manière d’évoquer la sexualité, de la montrer aussi. Sur la forme, ce dont on se souvenait surtout c’était les décors naturels sublimes (les Pyrénées , le Vercor…) et l’impression que donnait les acteurs de bien s’amuser à l’écran. Cette fois-ci, sans quitter des yeux leur thématique habituelle, les frères Larrieu osent, en grand.

Robinson naufragé
L’apocalypse, chez Les Larrieu, elle est biblique. Les sept plaies sont modernisées (Pollution, virus, guerre nucléaire, hystérie, tremblements de terre…). Et on y croit, malgré l’absence de gros moyens, l’ambiance est parfaitement restituée. Il faut voir les rues de Toulouse ravagées, la place du Capitole envahie, les services de décontamination en arrière plan, la feria de Pampelune sous les bombes… La fin du monde, Robinson Laborde, le héros de cette épopée, lui, il s’en fout. Ou du moins il n’y fait pas vraiment attention. Il préfère se remémorer le contact de la peau de la féline Laetitia (Omahyra Mota, sublime mannequin dominicaine), amour d’été infidèle. De Biarritz à Paris, notre voyageur se lance à la poursuite d’un souvenir alors que tout le monde va dans l’autre sens, vers le concret, vers la famille. Rarement seul, toujours accompagné de son ex-femme (Karin Viard, le point de repère de Robinson), d’une rêveuse (Clotilde Hesme, complètement allumée), d’un boulet (Catherine Frot, en éternelle larguée envahissante) ou d’un ténor plein de testostérone (Sergi Lopez, dont on arrive à sentir l’odeur forte à travers l’écran). Mathieu Amalric est excellent comme à son habitude, un brin désabusé, cassé, amputé mais il continue à faire croire à l’histoire de son personnage. Les plus belles scènes du film sont pourtant celles qui montrent les séparations, souvent violentes, entre Robinson et ses conquêtes; il se retrouve alors esseulé dans une salle de classe déserte, un camping car ou au beau milieu de la neige.

Un film catastrophe où personne n’essaye de sauver le monde
L’alternance des situations parfois absurdes, parfois réalistes rend encore plus complexe une lecture définitive du film. La vieille France qui célèbre l’apocalypse dans un château dans le Lot, Toulouse devenue capitale de France, l’exode massif vers les montagnes, Paris dans le noir. Et tous les tabous qui tombent. La sexualité sous toutes ses formes, incestueuse, partagée… sans conséquences. De la nudité crue qui peut en rebuter plus d’un. Une intrigue parfois incohérente (pourquoi de l’eau dans une fontaine alors que tous les personnages passent leur temps à boire de l’alcool craignant un empoisonnement) et des personnages au comportement à première vue illogique vont finir par diviser les spectateurs. Donner une étiquette à ce film, qui continue à vous hanter plusieurs jours après la séance, semble bien difficile. Le conte est ce qui revient le plus souvent à l’esprit, mais aussi l’épopée, le road movie, l’anticipation, la science fiction, l’érotisme, le romantisme… tout est en filigrane dans Les Derniers Jours du Monde. Un film catastrophe où personne n’essaye de sauver le monde. Le meilleur film français de l’année? Peut-être. Le plus audacieux, c’est certain.

Thomas Guillot

Les derniers jours du monde, conte apocalyptique d’Arnaud et Jean Marie Larrieu, avec Mathieu Amalric, Karin Viard, Catherine Frot, Sergi Lopez, Clothilde Hesme et Omahyra Mota

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