Le joli coup de « com » d’Anglet à l’occasion du naufrage du Luno


F.D.

Le joli coup de "com" d'Anglet à l'occasion du naufrage du Luno

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 21/02/2014 PAR Felix Dufour

Les compliments ont afflué de la part de professionnels pour féliciter la ville d’Anglet pour sa gestion de la communication lors du naufrage du Luno qui s’est disloqué le 5  février contre un épi rocheux d’Anglet à la sortie du port de Bayonne avec 12 hommes à bord. Il est vrai que ce feuilleton de quatre jours a été vécu quasiment en direct avec les nouveaux médias, dont les télés d’information continue, BFM Télé et I Télé.
« Je pense avoir vécu  la fin du communiqué de presse, commente aujourd’hui Liane Béhobide, la directrice de la communication de la Ville d’Anglet depuis 1992 en présentant deux ramettes de papier, trois cents pages de tweets qui sont tombés en permanence. « Avant ce fait divers,  le compte Facebook de la ville comptait 1391 fans. En six jours, le seul compte tweeter est passé à 1558 abonnés  nous avons recensé les mots dièse, (#) appelés hachtags sur l’événement sur 6 jours à partir du 5 février. #anglet, lieu du naufrage, 6 278 tweets ; #luno: 5 102; #cargoéchoué: 3 253, #pompage: 743, etc… Pour ce qui me concerne, c’est un tweet de Radio France à 10h30 qui m’en a informé. »
10h30, c’est quasiment le naufrage en direct. Mais la rapidité de l’information anticipée a une explication. Depuis la fin des années 80, les surfeurs professionnels américains et australiens ont été les premiers à utiliser internet pour communiquer avec leur famille, particulièrement lors des compétitions pros de Biarritz ou Hossegor. C’est inscrit dans les gênes des pratiquants et ils ont depuis un réflexe internet inné.
Ainsi Alain Bacalao Cassiède qui observe depuis l’Anglet Surf Club à la Chambre d’Amour au sud du littoral d’Anglet,  l’océan et la carte des vagues pour son site de Météo surf (www.angletsurfinfo.com) au petit matin avait repéré le Luno qui semblait avoir des problèmes. Un autre observateur, le photographe  Sébastien Marie installé à la Barre, à 4 kms au nord l’appelle pour lui dire vers 9 heures; « ce cargo est mal barré, il ne semble pas pouvoir entrer au port…. » Et le naufrage a suivi sous l’oeil de plusieurs témoins… avertis par des tweets.

Répondre au tweet par le tweet« Entre temps la Ville, sous la direction du maire Jean Espilondo et son adjoint Guy Mondorge, déclenche les opérations de secours et développe son organigramme de gestion de crise en animant des cellules de communication, de gestion et technique d’ordre publique et un PC d’organisation opérationnel direct. Appelé aussi plan communal de sauvegarde, un protocole précis de mobilisation.
Parallèlement, le sous-préfet Dalennes, la direction du port, déploient leurs moyens spécifiques…. Mais voilà, BFMTV fait intervenir un premier témoin occulaire et donne le coup d’envoi du direct. Les médias traditionnels et la presse écrite lui emboitent le pas. Les premières rumeurs se répandent sur les circonstances de l’accident, le chargement du cargo et déjà les risques de pollution. Les vidéos sont en ligne, les photos tombent. Comment réagir à cette profusion d’informations fulgurante pour la plupart non vérifiées? 
La réplique vient de Pierre Duhaut-Laurent,  responsable de la communication du maire Jean Espilondo pour les élections municipales. Comme pour la plupart des candidats Facebook et Twitter sont devenus des liens avec les « digital électeurs ».
« Répondons aux tweets par les tweets » propose-t-il. Le maire sait les vies en jeu et les risques de pollution et il ne souhaite pas qu’il se dise et s’écrive n’importe quoi sur le sujet d’autant que sur place, il relève l’inquiétude des gens qui affluent vers l’embouchure de l’Adour. Pierre Duhaut-Laurent lui suggère de rédiger les tweets lui même, ils auront plus de poids. Et c’est ainsi qu’apparait le premier: « on peut s’interroger sur la présence de ce cargo à l’entrée du port avec une mer si affreuse. » Que la CCI qui gère le port aura quelque mal à digérer…
« Il en écrira 140, poursuit Liane Behobide, jusqu’au dernier, le samedi pour annoncer vers 16 heures, le départ du dernier camion chargé de fuel. « Le problème de la pollution est écarté » conclut-il.

C’est au début des opérations aussi qu’entre en lice, sur le terrain, Florence Jullien-Baron chargée de communication de la Ville auprès de la presse. Tandis que Liane coordonne la communication depuis le PC de la mairie, elle accompagne Jean Espilondo sur le terrain et organise les interviews qui s’enchaînent comme des perles. Le premier jour dès 15 heures France 3-Euskal Herri enregistre de la bouche du maire tout le récit du naufrage avant l’arrivée du ministre Cuvellier.

Pendant quatre jours la fièvre ne baissera pas  et tous les soirs, à 18h30, un communiqué officiel de la situation est rédigé par Liane Behobide et Florence Jullien-Baron

« Nous avons adapté nos outils à cette rapidité »« Tous les quatre ou cinq ans, je participe à des rencontres des chargés de communications des villes et nous faisons le point sur les évolutions de la presse et je dois dire que nous l’avons vécue de manière un peu brutale. » explique Liane Béhobide.
Quelles leçons retire-t-elle de ce joli coup de com? « D’abord, il faut le dire, nous avons échappé à deux drames qui auraient pu détériorer le climat dans lequel nous avons travaillé. Un drame humain car il y aurait pu avoir des victimes, et un drame environnemental. Anglet possède  4,5 kms de plages et du gasoil sur le sable aurait posé bien des soucis. J’en retire aussi une fragmentation de l’information. C’est la première crise majeure du genre depuis le Prestige en 2002. On a pris de plein fouet la rapidité de l’information. C’est l’info continue qui donne le tempo et qui précipite tout le monde dans la nécessité de communiquer. On a vu les medias et les réseaux sociaux démultiplier les sources. Tout le monde partage les infos et donne la priorité à l’image, on ne se pose pas sur le commentaire ou l’analyse. Cette propagation a un aspect viral par sa rapidité et il faut le dire grâce à la vivacité des réseaux. Et nous, collectivité, qu’allions nous faire? Eh bien nous avons répondu et avons adapté nos outils à cette rapidité. Mais nous avons quand même la responsabilité de l’information que l’on divulgue, nous devions délivrer une information fiable, et c’est ce que l’on a fait en jouant le jeu de la transparence. Mais en matière de communication, j’ai vraiment l’impression, après ce que nous avons vécu, que le Prestige date de la Préhistoire. »
Florence Jullien-Baron renchérit: « L’époque du communiqué de presse a vécu pour informer en temps réel, en revanche cet épisode a montré quand même son importance, le soir, pour effectuer la synthèse de toutes les informations vérifiées. »

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