Guillaume Guérin, « La durabilité transpire  »


Guillaume Guérin a fixé un cap ambitieux pour atteindre un double objectif

Limoges dispose a été pionnière en matière de ressource en eau comme avec la retenue à Beaune-les-MinesLimoges Métropole - Mathieu Fontaine

Limoges dispose a été pionnière en matière de ressource en eau comme avec la retenue à Beaune-les-Mines

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Temps de lecture 8 min

Publication PUBLIÉ LE 31/01/2022 PAR Corinne Merigaud

Adopté à l’unanimité le 17 décembre, le projet de territoire de Limoges métropole fixe la feuille de route pour la décennie à venir voire plus… A la tête de cette aire urbaine de 208 000 habitants, Guillaume Guérin a fixé un cap ambitieux pour atteindre un double objectif, attirer des habitants, et des entreprises et porteurs de projets pour asseoir des bases fiscales qui s’érodent depuis deux décennies afin de pérenniser les services rendus à la population.

@qui!:  De quelle manière avez-vous élaboré le projet de territoire de Limoges Métrople ?

Guillaume Guérin : Toutes les intercommunalités de cette strate doivent se doter depuis une dizaine d’années d’un projet de territoire. Sur Limoges Métropole, cela n’avait pas été fait car le climat politique sur le mandat 2014-2020 n’avait pas permis d’établir ce document cadre. Il était urgent de se doter de ce projet de territoire qui définit les grandes politiques publiques que va porter l’EPCI pour la décennie à venir. Elles ont vocation à lui permettre de se développer et de maintenir un service public de qualité à sa population. Entre 2000 et 2020, le service rendu a été satisfaisant voire qualitatif eu égard à son coût mais en termes d’aménageur du territoire et de développement économique, il y avait fort à dire et de nombreuses critiques pouvaient nous être opposées. L’idée était de trouver un fil conducteur.

@! : Comment avez-vous déterminé ce fil conducteur ?

GG : Il a fallu faire un constat de nos forces et nos faiblesses puis dresser un bilan sans concession de cette aire urbaine de 20 communes et 208 000 habitants située à équidistance du Massif Central et de l’océan. Nous sommes une métropole d’équilibre, la 2ème grande ville du sud ouest. Nos faiblesses sont l’enclavement, l‘absence de liaisons ferroviaires, routières et aériennes vis à vis d’autres aires de même strate. Ces handicaps sont aussi nos forces, la qualité de vie est bien meilleure ici que dans des aires de taille identique avec trois aéroports dont deux internationaux, quatre rames TGV par jour et cinq nœuds autoroutiers. Un fil conducteur en est ressorti très vite, à savoir cette aire urbaine est durable au sens où ses atouts naturels, l’air, l’eau et la qualité de vie, sont beaucoup plus préservés. Cette notion de durabilité transpire à tous les étages de la fusée. L’idée est de faire une agglomération dynamique sur le plan économique et durable, les deux mots clés de ce projet de territoire. Dynamique cela veut dire qu’il faut mettre de l’argent sur le développement économique, le parent pauvre de ces vingt dernières années.

 

« Le développement économique est le pilier numéro un de ce projet »

@! : Le départ d’habitants a mis à mal les capacités d’investissement, avez-vous une solution ?

GG : Nous avons perdu des habitants depuis les années 2010 en lien avec la perte de l’armée, du statut de capitale régionale et le vieillissement de la population. Nous avons subi des réformes de gouvernements de droite comme de gauche qui ont affaibli notre solde fiscal. La priorité est de retrouver des bases fiscales solides, il n’y a qu’une solution la création de richesses car sans créations d’emplois, il n’y a pas de capacité à financer le service public et la solidarité. Le développement économique est le pilier numéro un de ce projet. Il ne faut aller que vers des secteurs où nous avons des avantages compétitifs sur nos voisins car tous les territoires sont en concurrence. Il faut identifier les secteurs où nous avons l’antériorité, le potentiel et le savoir-faire, c’est l’eau, le Douglas, la céramique, l’hyperfréquence, le numérique et la silver économie. Nous allons faire effet levier avec de l’argent public sur ces filières pour qu’elles se structurent. Un euro investi peut générer 3 ou 4 euros à la fin de l’année.

@! : Cela implique d’attirer des habitants, pas si évident vu la concurrence entre territoires…

GG : On va marketer, habiller notre communication, pour donner envie de venir à des populations vivant dans de grandes métropoles polluées et embolisées. Dans le marketing territorial que nous sommes en train de développer, je vise un public de jeunes actifs CSP + de 30 à 50 ans. Entre 800 000 et 1 million d’actifs, majoritairement Franciliens, veulent quitter Paris. Ils attendent d’abord des services dans une ville avec une qualité de vie incontestable. Et cela nous l’avons, que ce soit pour la petite enfance, les adolescents et les personnes âgées dépendantes mais aussi des associations, services culturels et sportifs. Il faut vendre nos atouts et permettre à cette population de situer Limoges à 2h30 de la montagne, 2h15 de l’océan et 2h30 de Bordeaux. Il ne faut pas rater l’aménagement numérique du territoire, les salariés ont appris à télétravailler. Un cadre qui télétravaille 3 jours par semaine va à Orly en 50 minutes. Il peut installer sa famille ici. Ce projet de territoire a aussi pour objectif de faire connaître Limoges. 

Des parcelles de 10 ha seront réservées pour accueillir des entreprises sur la zone d’activité de « La Grande pièce »Limoges Métropole

Des parcelles de 10 ha seront réservées pour accueillir des entreprises sur la zone d’activité de « La Grande pièce »

@! : Comment prêcher la bonne parole quand les emplois manquent ?

GG : Il manque surtout des emplois peu qualifiés, nous avons des postes d’ingénieurs non pourvus. Nous n’avons pas assez d’emplois dans le tertiaire, l’industrie ou les métiers liés à l’industrie pour des Bac/Bac + 2. Les politiques doivent faire un effort pour ramener ces postes. Nous n’avons pas non plus grand chose à proposer aux jeunes des quartiers prioritaires dans le cadre de la politique de la ville. Je travaille à l’implantation d’une grosse marque qui pourrait créer quelques centaines d’emplois peu qualifiés. Cela me tient à coeur de créer 150 à 200 emplois dans le tertiaire.

@! : Une force de frappe est-elle prévue pour promouvoir Limoges Métropole ?

GG : Nous avons créé l’association des Limougeauds de Paris qui a pour vocation de regrouper toute la diaspora limougeaude pour les mettre en réseau à l’image du patron de Coca Cola Europe, natif de Limoges. Il peut dire à ses cadres de quitter leur T 2 en banlieue pour habiter à Limoges ! Il nous faut des ambassadeurs. Nous allons créer également un service dédié, une force spéciale pour aller chercher des entreprises et des habitants. Je veux recruter quatre ETP, des gens qui ont déjà fait cela dans des collectivités de strate identique ou plus importante.

« Nous avons des atouts! »

@! : Les Parisiens veulent quitter la capitale mais pour quelles raisons choisiraient-ils Limoges plutôt que Tours par exemple ?

GG : Les gens qui partent ont le même profil, de jeunes couples trentenaires, des quadras et jeunes quinquas CSP+ très sensibles à la qualité de vie. Limoges est la seule ville de France sans perturbateurs endocriniens dans ses crèches. Ces trentenaires qui mangent bio et roulent à vélo sont très sensibles à cela. Nos cantines seront alimentées en circuits courts notamment grâce à notre ceinture verte. Les délais d’attente dans les crèches et EHPAD sont les moins longs du pays et deux EHPAD vont ouvrir. Limoges a été pionnière sur la ressource en eau avec un des réseaux de distribution les plus sécures de France voire d’Europe. Notre air est l’un des plus purs de France. Il faut aussi proposer les mêmes services et développer les mobilités douces, vendre cette notion de durabilité car ces éléments marquent l’imaginaire. La qualité de vie est plus forte ici et le coût de la vie moins cher qu’à Tours.

@! : Vous oubliez les a priori négatifs qui collent à Limoges, ce verbe qui ne donne pas envie de venir…

GG : Il faut s’appuyer sur les témoignages de personnes extérieures qui vivent ici, ce sont les meilleurs ambassadeurs de Limoges. Je dis aussi à tous les habitants « Aidez-nous à promouvoir le territoire, devenez des ambassadeurs, arrêtez de vous flageller tout le temps ! ». Nous avons des atouts comme le tissu associatif le plus dense de France sur Limoges Métropole avec plus de 500 associations à Limoges. L’accès à la culture est moins cher, trois fois moins pour le conservatoire par rapport à celui de Bordeaux. Sur l’offre culturelle, sportive, de loisirs, sur la qualité de vie et sur le coût, il n’y a pas photo.

Vingt millions d’euros engagés sur cinq ans sur la Technopole ESTERLimoges Métropole

Vingt millions d’euros engagés sur cinq ans sur la Technopole ESTER

@! : Si de nouveaux habitants affluent, le prix de l’immobilier va s’envoler non ?

GG : Il faut arriver au juste point d’équilibre, suffisamment pour pérenniser nos bases fiscales afin de maintenir le service public mais sans tomber dans l’excès. Cette aire urbaine est stable entre 200 000 et 230 000 habitants. Elle a vocation à accueillir de nouvelles populations pour arrêter la baisse de la démographie avec, je l’espère, 5 000 habitants de plus d’ici 2033.

@! : Avec ce projet de territoire, avez-vous atteint votre objectif de cogestion apaisée ?

GG : C’est une avancée historique, la première fois que nous réunissons tous les élus d’obédiences politiques et de tempéraments différents sur un projet commun. Cela ne s’est pas fait tout seul, j’ai eu une cinquantaine d’heures de discussion en tête à tête avec les vingt maires. Il a fallu que les communes rurales comprennent que, sans Limoges, il ne pouvait pas se faire. Et il a fallu que Limoges comprenne qu’une agglomération c’est, certes une ville centre avec sa force et ces charges de centralité qui coûtent, mais aussi toutes les communes du périmètre. C’est une vraie satisfaction personnelle et je remercie les élus qui se sont engagés. Le premier vice-président Robert Thalamy a facilité les rapports avec des maires dont le côté politicien ressortait parfois. J’espérais un vote, il y a eu l’unanimité, c’est rassurant pour le territoire.

 

 » Des répercussions à dix, quinze ou vingt ans, que je sois là ou pas »

@! : Ce projet comprend 54 actions, un mandat voire deux ne suffiront pas pour les réaliser ?

GG : C’est un travail formidable mais je ne suis engagé que sur un mandat. Je ne veux pas donner l’impression d’influencer la vie de Limoges Métropole jusqu’en 2035. Les politiques publiques amorcées durant ce mandat auront des répercussions à dix, quinze ou vingt ans que je sois là ou pas. Pour les finacer, le budget investissement va augmenter de 15 millions d’euros par an, soit 60 à 63 millions pour un réalisé de 52 à 55 millions la première année. L’augmentation est très significative notamment à destination du monde économique.

@! : Quelles seront les premières mesures économiques ?

GG : Nous mettons 2 millions d’euros sur l’aide à la transformation numérique des entreprises. Le Covid a fait surgir deux catégories, celles qui ont raté le coche et qui sont entrain de couler et celles qui l’ont pris avec un chiffre d’affaires qui croît. Nous accompagnons les PME et PMI de moins de 10 salariés passées entre les mailles du filet régional. Par ailleurs, l’objectif est d’avoir des pôles économiques structurés, d’arrêter le développement commercial et artisanal touffu. Nous renforcerons le rôle central de la zone d’activités de « La Grande Pièce ». Si une entreprise me demande 10 ha, on est incapable aujourd’hui de les fournir. Je veux cinq ou six terrains de 10 ha ou plus sanctuarisés, aménagés ou aménageables rapidement. De plus, il faut faire de la technopole ESTER un véritable lieu d’innovation, arrêter d’y mettre tout et n‘importe quoi, y concentrer les start-up, entreprises innovantes, incubateurs, tout ce qui touche à la biotech et au sanitaire. Vingt millions seront investis en cinq ans pour sa remise aux normes, pour créer une salle de conférences de 200 places et un restaurant inter-entreprise.

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