Gaston Fébus, un Prince du XIVème siècle, cruel et subtil: exposition au château de Pau


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Gaston Fébus, un Prince du XIVème siècle, cruel et subtil: exposition au château de Pau

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 14/03/2012 PAR Olivier Darrioumerle

« L’époque romantique aimait se donner des frissons,mais le XIVème siècle est une époque difficile, traversée par des mouvements très variés », explique Paul Mironneau. La personnalité de Febus avait intégré ces mêmes débordements de cruauté et de subtilité. Il était méthodique et ordonné, ses écrits le prouvent, mais la manière dont il répudie sa femme et tue son fils montre qu’il était intransigeant.
« En son courroux il n’a nul pardon », écrivait Froissart dans ses chroniques. Mais en dépit de son avarice et de sa cruauté, il était très charitable. Pour quelqu’un qui comptait ses sous il donnait aussi beaucoup d’argent aux pauvres. « On perçoit aussi des notes d’humour qu’il faut comprendre en se rappelant l’orgueil dilaté des Princes de son temps », sourit Paul Mironneau lorsqu’il lit l’amusement de Febus par rapport au désespoir de ses proches avant qu’il ne soit touché par la grâce divine ! 

L’argent comme outil politique
Pendant la guerre de cent ans, Febus, seigneur et comte de Foix, veut conserver une indépendance par rapport aux grandes puissances que sont la France, l’Angleterre, mais aussi l’Espagne. Dans une période de forte pression politique et militaire, il veut constituer une principauté avec une épine dorsale de châteaux et de place fortes qui assurerait la continuité des domaines de Foix, du Béarn, du Gabardan et du Marsan. Il lui faut s’emparer du Comminges pour réunir la dernière pièce au puzzle, mais le roi de France et ses voisins s’appliquèrent à l’en empêcher.

La politique de Gaston Febus est une politique très construite. « Elle s’organise dans un programme robuste par comparaison aux Albret ou Armagnac qui sont versatiles, et agissent au gré des intérêts du moment, des sommes d’argent, des facilités et de l’accroissement territorial », explique Paul Mironneau qui défend l’idée que Febus était moins un homme de guerre, qu’un homme de paix. « Il ne prenait les armes que s’il était convaincu de gagner et de prendre des richesses. Ses armes n’étaient pas les épées et les bombardes, mais la stratégie et surtout l’argent. »

« Il avait compris qu’avec l’argent on pouvait tout faire, et qu’avec l’esprit chevaleresque, tout perdre, raconte Paul Mironneau. On pourrait dire que Febus était un prince financier. » Épargner, redistribuer, lever des rançons et les faire fructifier. Froissart disait qu’ « il n’y avait que petit feu dans sa cheminée ». Il était avare, mais savait entretenir des écuyers qui prêchaient la bonne parole, recevoir les hommes de lettre et les artistes qui faisaient l’opinion.

Un Prince lettré
Il existait une république des lettres à laquelle Febus avait accès. C’était un prince constamment en guerre, notamment contre son voisin le Comte d’Armagnac, mais il était lettré et raffiné. Il fut lui-même auteur de poésie, de dévotion et surtout d’un fameux livre de la chasse. « La chasse était l’activité aristocratique typiquement guerrière, mais le livre de la chasse de Phoebus est l’expression d’une pulsion pacifique qui le pousse à connaître et à décrire la nature », explique Paul Mironneau.

Dans un des manuscrits exposés au château de Pau, on peut voir des illustrations représentant un ours à l’effort et au repos. Il anticipe un peu les naturalistes du XVIIIème siècle. « Ce livre eut un grand succès et fut copié, puis imprimé et traduit en anglais et en espagnol. Il existe même des abrégés. L’essentiel de l’exposition est consacré aux plus belles éditions manuscrites dont celle qu’il avait sur son étagère. Sobre, illustré à Avignon en 1390, avec des grisailles précises et des textes de grande qualité. »

Il existe un nombre de productions qui le mettent en scène. Et l’exposition au château de Pau, guidée par le livre manuscrit, plonge le visiteur dans la civilisation des cours méridionales. On y voit des chroniques, des vers, des chansons de Troubadour et de beaux manuscrits dont une traduction occitane d’une encyclopédie scientifique avec une réflexion sur le savoir.

Une mort énigmatique
Gaston Febus avait tout prévu sauf la mort. Il avait amassé des richesses dont il gardait la clé, construit une principauté défendue par des places fortes, mais un soir, alors qu’il était en pleine forme malgré son grand âge, en rentrant d’une chasse à l’ours et avant de dîner, il s’écroule après qu’on lui a versé de l’eau glaciale sur les mains.

« Nous avons reconstitué cette dernière table avec des hanaps, des gobelets, des cuillères, des couverts qui proviennent du trésor d’Ariège et un calice du musée du Louvre. On est dans le contexte. Il y a aussi des gisants représentant des chiens pour lesquels il avait un amour immodéré. Et qui l’ont accompagné dans l’au delà. »

« Cette mort subite fut interprétée par ses ennemis comme un châtiment divin. Il était avare et maintenait une pression fiscale forte, il avait reconnu un pape plutôt qu’un autre et il avait tué son fils. Les raisons ne manquaient pas. Pour les autres, il avait rejoint un monde meilleur lors d’une évasion mystérieuse, lui que l’on pensait être un voyant pour sa clairvoyance politique. »

crédit : maison de l’histoire de France

Olivier Darrioumerle

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