Entre les lignes: La bouleversante intimité de deux infirmiers de campagne


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Entre les lignes: La bouleversante intimité de deux infirmiers de campagne

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Temps de lecture 2 min

Publication PUBLIÉ LE 06/11/2020 PAR Joël AUBERT

A Saint-Perdon où il a fondé, en 2011, son cabinet Ludovic qui y vit avec son garçon de cinq ans dont la maman a quitté le domicile familial a bien essayé d’attirer quelques collaborateurs ; peine perdue. « A la campagne note Fanny Cheyrou, le métier plonge l’infirmier dans une immense solitude. Il est tout à la fois, médecin, gastro-entérologue, assitant social, aide-ménagère, cuisinier, mécano, assitant informatique, coiffeur… » Ce n’est pas faute d’avoir été mis en garde par le docteur Falcinelli, du village voisin, qui justement prend sa retraite, mais Ludo le dit à son fils de cinq ans qui déjà s’inquiète de le voir tant accaparé : « tu reçois à mesure que tu donnes, Naël, tu n’es jamais perdant quand tu donnes, tu comprends ? » Encore heureux que Ludo ait finalement été rejoint depuis mai 2018 par Max l’alsacien son cadet de dix ans, ce qui lui permet de consacrer du temps à son fils dont ila la garde alternée.

La toilette de Mayou

Un tandem qui en a des histoires de vie à partager car la confidence des personnes soignées est à la mesure du lien qui se noue, au fil des jours, entre elles et leur infimier. Ainsi en est-il de Marguerite, de Mayou, l’extraordinaire vieille dame de 94 ans qui accueille Max au son du Quatuor en sol majeur de Mozart et dont la toilette, grandeur nature est bouleversante de vérité avant qu’il ne l’habille avec lenteur, la parfume, apprête son chignon, épingle après épingle, avant de la saluer et de filer, dare dare, au cabinet laisser les échantillons de prises de sang effectués de bon matin.

Ludo et Max qui, au fil des jours et des soins, ne pourraient se passer le relais sans prendre le temps d’un tiap, de partager, chaque vendredi, les informations essentielles à la continuité des soins qu’ils prodiguent à leurs patients. Et puis il y a ces disparitions qui sont comme des déchirures, celle de Marie 97 ans qui a tout appris du pays à Ludo, à trouver l’eau avec un bâton au jardin, comme le faisait ce sourcier de père Dartigas, à couper le feu, à soulager les maux au seul magnétisme de ses mains…Touchants témoignages de la communion d’un infirmier avec l’âme d’un village, de cette Lande de Gascogne riche de vies en osmose avec la terre.

Dans ce récit qui épouse le rythme des saisons surgit, un certain mois de mars dernier, un virus importé de Chine. Change-t-il le métier de nos deux infirmiers ? Les habits assurément, au moment de pousser la porte, et cette distance si dure à faire accepter, à Marguerite qui attend un baiser sur le front, ne peut enlacer Max comme d’ordinaire, mais sera heureuse de ce front qui viendra se poser sur son épaule… Cette Mayou qui s’en ira bientôt de vieillesse et dont Max redoutant le départ écrit, en larmes, à sa tante une lettre pour lui faire partager son chagrin immense.

Ils sont infirmiers de campagne, Fanny Cheyrou, illustrations de Jeff Pourquié; les éditions du Palais, 18 euros

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