Cancers : « Un tiers des cas pourraient être évités »


A l'occasion de l'exposition "Cancers", à la Cité des Sciences de Paris, Fabrice Denis, cancérologue, explique les innovations actuelles pour la lutte contre ces maladies. En Nouvelle-Aquitaine, 37 000 nouveaux cas sont diagnostiqués par an.

Manon Gazin | Aqui

Fabrice Denis à l’UIC-P Espace Congrés, à Paris, le 23 novembre 2022.

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 10/01/2023 PAR Manon Gazin

Sur les 37 000 nouveaux cas répertoriés chaque année dans la région, 56% concernent des hommes, et 44% des femmes, selon l’ARS. L’exposition « Cancers », présentée à la Cité des Sciences et de l’Industrie, à Paris, jusqu’en août 2023, donne à voir les nouveaux traitements et innovations mis en place. Interrogé en tant qu’expert scientifique dans le cadre de cette exposition, le Professeur Fabrice Denis, oncologue radiothérapeute et président de l’Institut National de la E-Santé, fait le point sur la situation en France.

aqui! : Qu’en est-il des cancers aujourd’hui en France ?

Pr Fabrice Denis : Il y a quasiment mille nouveaux cas diagnostiqués par jour. Ce qui fait un peu moins de 400 000 par an. Quatre millions de personnes vivent avec un cancer actuellement. Et le nombre de décès annuels est d’environ 160 000.

@! : Quels cancers sont les plus répandus ?

F.D. : Chez les hommes, ce sont ceux du poumon, du côlon et de la prostate. Chez les femmes, ce sont ceux du sein, du côlon et du poumon. 

Le nombre de cancers a tendance à augmenter

@! : Quels sont ceux qui présentent les meilleurs taux de guérison ? 

F.D. : Dans le cas du cancer du sein et de la prostate, le taux est proche de 90%. Si l’on passe par du dépistage, il est de près de 100% pour le cancer du côlon pour les formes précoces.

@!  : Et les pires ?

F.D. : Le cas du cancer du poumon s’est un peu amélioré, surtout avec les nouveaux traitements. Si on est opéré, le taux de guérison est entre 60 et 70%. Mais si des métastases apparaissent, il chute à moins de 15%. Et il y a des cancers pour lesquels les traitements sont moins efficaces. C’est le cas de celui du pancréas, de l’œsophage, de la gorge, ou des tumeurs cérébrales. 

N.Breton

L’exposition « Cancers » vise à sensibiliser la cause autour de ces maladies.

@! : Est-ce que l’on constate que les cas de certains types de cancers augmentent ou baissent ?

F.D. : Ils ont tous tendance à augmenter. Mais il faut savoir qu’on les dépiste plus souvent, plus facilement, et que la population augmente et vieillit. Le cancer du poumon fait face à une augmentation régulière de 3 ou 4% chaque année (on constate une augmentation régulière chez la femme et une stabilisation chez l’homme). De manière générale, c’est une augmentation assez lente, mais relativement constante. 

L’activité physique permet de réduire l’incidence des cancers de pratiquement 15%

@! : Comment définissez-vous précisément cette maladie ?

F.D. : Il s’agit de l’existence, au sein d’un organisme, d’une multiplication désordonnée et anarchique de cellules anormales, en théorie à l’infini. Et qui iront, avec le temps, faire d’autres tumeurs ailleurs, en détruisant les tissus. C’est ce qu’on appelle les métastases. Et tous les organes peuvent en donner. Il y a pratiquement autant de cancers que de patients. Avec la même tumeur, certains vont développer des formes très graves, et d’autres non. 

@! : Pouvez-vous m’en dire plus sur l’exposition “Cancers” ?*

F.D. : J’y ai participé en tant qu’expert interrogé sur la partie “Innovation numérique en santé”. L’ exposition est destinée au grand public, elle permet de comprendre comment apparaît un cancer et comment il se développe. Et prendre connaissance des traitements que l’on peut proposer.

@! : Dans quelle mesure la prévention est-elle efficace ?

F.D. : Environ un tiers des cas pourraient être évités par des mesures de prévention autour du tabagisme, de l’alcoolisme, de l’exposition au soleil… On pourrait même aller plus loin avec une réduction de la sédentarité, car l’activité physique permet de réduire l’incidence des cancers de pratiquement 15%. Et concernant l’alimentation, il serait possible d’inciter à réduire sa consommation de viande, de plats dits industriels (sans nécessairement l’annuler) et augmenter nos rations de fruits et légumes.

De nouveaux traitements

@! : Peut-on imaginer découvrir de nouvelles formes de cancer ?

F.D. : On ne découvre pas réellement de nouveaux cancers mais par contre, tous les ans, nous découvrons des nouveaux profils biologiques des cancers, avec des nouvelles cibles qui sont atteignables par de nouveaux médicaments. Car ces maladies sont de plus en plus caractérisées autour de leur sensibilités aux traitements, et non plus exclusivement autour des organes qui leur donnent naissance.

Romain Moretto

Les causes, les traitements et les impacts des cancers sont abordés lors de cette exposition.

@! : Quelles ont été les dernières innovations pour la lutte contre ces maladies ?

F.D. : De nouveaux traitements ont vu le jour ces dix dernières années. L’immunothérapie, par exemple, vise à réveiller l’immunité de l’organisme endormie par les cellules cancéreuses.  Les thérapies ciblées, elles, sont des médicaments qui détruisent des cellules cancéreuses de manière très précise, car elles ont une caractéristique que les cellules normales n’ont pas. La radiothérapie stéréotaxique consiste quant à elle à envoyer des rayons de façon très ciblée à forte dose pour détruire des tumeurs. Dans le domaine de l’imagerie, il existe maintenant le PET Scan. Il consiste à injecter au patient du glucose marqué avec de l’antimatière, qui permet de révéler les tumeurs partout où elles sont. Ces nouvelles techniques révolutionnent complètement la prise en charge, et donnent des résultats fantastiques. Des patients auraient été condamnés par le passé, et peuvent aujourd’hui voir les tumeurs disparaître en dix jours grâce à une thérapie ciblée.

@! : Avez-vous un exemple d’innovation plus récente ayant fait ses preuves ?

F.D. : Les applications de télésurveillance ou de télésuivi sont très récentes, et s’installent progressivement. Un patient utilise son ordinateur ou son téléphone pour répondre chaque semaine à des questionnaires. Les réponses sont envoyées à l’établissement de santé. Des logiciels analysent les réponses et donnent des alertes au travers d’algorithmes, en cas de détection de complications, d’effets secondaires ou de rechute. De là, les médecins contactent les patients et les prennent en charge rapidement. Cette méthode s’adresse à des patients déjà atteints d’un cancer, ou qui ont terminé leur traitement et sont en surveillance. Elle marche très bien, et devient un standard de soin. Dans les mois et années qui viennent, ça sera quasiment obligatoire. 

@! : Y a-t-il d’autres projets en cours qui semblent prometteurs ?

F.D. : De nouvelles thérapies ciblées vont arriver. On peut citer les CAR-T cells, des médicaments très particuliers qui sont arrivés récemment en France. Ils permettent la modification génétique des propres lymphocytes T [cellules tueuses essentielles dans la réponse immunitaire contre les virus et les cancers, ndlr] d’un patient, afin qu’il soit en mesure de reconnaître et détruire les cellules cancéreuses. En revanche, cela reste très cher : environ 300 000 euros le traitement.

En mars 2021, Fabrice Denis a été désigné « personnalité française santé de l’année », pour ses travaux réalisés afin d’aider à la gestion de la pandémie de Covid-19, et la création de MaladieCoronavirus.fr. 

Infos pratiques !

Exposition « Cancers », à la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris.

Du 6 septembre 2022 au 8 août 2023.

Plus d’infos : www.cite-sciences.fr

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