Au pied des Pyrénées, le bonheur n’est pas toujours dans le pré


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Au pied des Pyrénées, le bonheur n’est pas toujours dans le pré

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 04/01/2016 PAR Jean-Jacques Nicomette

Certes, tempèrent-ils, les Pyrénéens possèdent des atouts. Le dynamisme d’entreprises comme les coopératives Lur-Berri, Euralis, ou encore certains acteurs de la filière laitière est là pour en témoigner. Il n’en reste pas moins que le ralentissement économique constaté l’an passé  « traduit une difficulté à envisager une reprise rapide.» D’autant plus que des dossiers comme l’extension des zones vulnérables et les contraintes imposées par la mise en conformité des exploitations ne viennent pas conforter le revenu des agriculteurs.

Au moins 1 800 éleveurs en difficulté financièreLes chiffres parlent d’eux-mêmes. Une enquête à laquelle la Chambre d’agriculture a fortement contribué a montré que 1 800 éleveurs se trouvent aujourd’hui en situation financière « délicate » dans le département.
Un fonds d’allègement des charges a été mis en place par les pouvoirs publics pour leur venir en aide. Il représente 43% de l’enveloppe attribuée à l’ancienne région Aquitaine. C’est-à-dire  2 millions d’euros. « Nous avons demandé à l’État qu’un million supplémentaire soit attribué pour couvrir les besoins » explique Maryvonne Lagaronne, responsable de la filière bovins viande à la Chambre. « L’objectif est de faire comprendre à l’administration qu’elle a encore un regard très éloigné sur la réalité de l’élevage ».

Pour tenter de résoudre ces difficultés, un tiers des éleveurs s’adresse aujourd’hui aux banquiers. Un autre tiers pense à décapitaliser en réduisant son cheptel. Et un tiers fait appel aux fournisseurs. « Tout cela a une conséquence sur l’emploi dans le monde rural. Et encore ! Seuls 20% des agriculteurs ont accepté de répondre à notre questionnaire pour dire qu’ils sont mal. On estime en fait que, rien que pour ce qui les concerne, l’impact de la crise est de plus de 30 millions d’euros sur l’économie liée à l’agriculture dans le département. Cela donne une idée de l’ampleur du problème ».

Bovins : la rude bataille des margesUn tableau, pas vraiment rose, que vient conforter l’état des lieux établi filière par filière.
Chez les bovins-lait « on ne peut plus échapper au prix du marché », qui sont en baisse,  constatent les responsables agricoles. Ces derniers cherchent donc à retrouver des niveaux de charges permettant aux exploitations de rester compétitives. Ce qui n’a rien d’aisé.

Très exigeante en main-d’œuvre, la profession  connait chaque année une installation pour sept départs. Résultat :  l’année dernière, la production a diminué d’environ 2,5%. « Il faut freiner cette baisse.  Car il n’y a aucune raison que le sud-ouest n’ait pas sa place sur un tel  marché au moment où la demande mondiale augmente ».
La maîtrise des marges et des coûts de production fait également partie des priorités affichées pour les bovins-viande qui font vivre 4 700 éleveurs dans les Pyrénées-Atlantiques. Un département où la production de veaux a augmenté de 1,6% l’an passé alors que l’Aquitaine a vu ses effectifs de bovins régresser de 5%.
« Ici, 70% du territoire est en herbe » rappellent les agriculteurs, tout en soulignant la spécialisation opérée par la Blonde d’Aquitaine en  format boucherie. « Le but est de donner à la production locale une dimension très orientée massif pyrénéen ».

Le porc mise sur la qualitéSecouée par l’embargo russe, mais aussi par la concurrence qu’exercent nos voisins allemands et espagnols, la filière porc souffre pour sa part de plusieurs maux : l’engorgement du marché, la guerre livrée sur les prix et la fusion de grandes centrales d’achat.
« Nous voulons rester optimistes. Il y a des opportunités. Le marché n’est pas unique, mais pluriel » commentent les agriculteurs. Avant d’expliquer que la mise en place de  signes officiels de qualité (IGP jambon de Bayonne, IGP porc du sud-ouest etc.) permet de « résister un peu mieux à la crise ». Ce qui n’empêche pas cette dernière d’être sévère.

Depuis dix ans, la moitié des éleveurs a mis la clé sous la porte. Un plan destiné à conforter les fonds propres des éleveurs dans une région en net  manque de porcs a été mis en place pour tenter de pallier au problème.

 Palmipèdes : l’ombre de la grippe aviaireUne volonté d’aller plus avant vers les signes officiels de qualité est également manifestée par les éleveurs d’ovins dans un département où le revenu par actif est estimé à moins de 10 000 € par an (ce genre de chiffre mérite toujours d’être rappelé). Dans le même esprit, un effort important est réalisé par les éleveurs de palmipèdes afin de mettre aux normes leurs installations et soigner les parcours de prêt-à-gaver. « On souhaite qu’au moins 50% d’entre eux soient couverts par des végétaux ».

Les cas de grippe aviaire détectés en fin d’année dans le sud-ouest ont apporté ici une ombre au tableau. Sans pour autant constituer, estime-t-on, « un signe néfaste pour la production ». « Des mesures de protection ont été prises et l’influenza n’est pas transmissible à l’homme ».

Maïs : l’inconnue AbengoaAlors que les viticulteurs cherchent, non sans mal, à financer leur réseau anti-grêle, les grandes cultures ont pour leur part été marquées par la baisse des cours du maïs et une chute de 15% de la production en raison de la sécheresse estivale.

Une inquiétude se fait jour également. Elle concerne l’avenir de l’usine de bioéthanol installée par le groupe espagnol Abengoa sur le bassin de Lacq. Celle-ci utilise 550 000 tonnes de maïs par an pour fabriquer ce carburant.  Quelle conséquence la déroute financière d’Abengoa aura-t-elle sur cette entreprise ? Dans les Pyrénées-Atlantiques, on croise les doigts.

Quelles aides pour les jeunes ?Dans un tout autre domaine, l’installation des jeunes agriculteurs pose enfin question. L’année dernière, 96 d’entre eux ont mis le pied à l’étrier dans le département. Mais le dispositif, jadis complété par le Conseil départemental et désormais pris en charge par la Région, a été modifié, constatent les responsables de la Chambre d’agriculture.

 Les aides apportées aux jeunes sont désormais soumises à de nouveaux critères ( hors-cadre familial, agroécologie, valeur ajoutée emploi, signes officiels de qualité etc), remarquent-ils. Ce qui , au final, aboutit à des soutiens financiers moins importants. La baisse est estimée à 3 000 euros en zone de montagne, 4 500 € en zone défavorisée et 3 800 € en plaine. 

« Plus de contraintes pour avoir moins d’argent », résument les intéressés. En rappelant au passage qu’il n’y a pas eu d’installation depuis dix ans dans le Vic-Bilh.

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