Agriculture : Il n’y a pas que la PAC dans la vie


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Agriculture : Il n’y a pas que la PAC dans la vie

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 19/05/2014 PAR Jean-Jacques Nicomette

@qui ! La PAC représente 45% du budget européen, et la France en est la première bénéficiaire. Quelle est l’importance de ces aides dans les Pyrénées-Atlantiques ?
Jean-Michel Anxolabehere
– Il faut d’abord rappeler qu’il s’agit de la seule politique actée au niveau européen, et le seul budget qui soit défini pour les cinq ans à venir. En 2011, dans les Pyrénées-Atlantiques, 10 332 personnes ont bénéficié des aides du « premier pilier » qui est consacré au soutien des marchés. Cela représentait un montant de 135 millions d’euros.

 Sur cette somme, la prime à la vache allaitante était de 18 millions d’euros. Elle a concerné 4221 agriculteurs. C’est un sujet majeur chez nous. Car pour bénéficier de cette prime, il faut avoir un troupeau. C’est une garantie d’occupation, et donc d’entretien, de l’espace rural.

En matière d’élevage ovin, on a dénombré 2 238 bénéficiaires pour un montant de 11 millions d’euros. Cela signifie 520 000 bêtes  présentes dans les champs. Ce qui n’est pas négligeable.

@qui ! Et pour le second pilier, qui est lié au développement des zones rurales ?
J-M.A
– Il y a deux mesures phares. Tout d’abord l’indemnité compensatrice de handicap  naturel, qui est censée soutenir l’activité agricole dans des zones considérées comme défavorisées. Son calcul tient compte du nombre d’habitants, de leurs revenus, du relief plus ou moins accidenté etc. Cette aide  a concerné 3 729 bénéficiaires pour 24 millions d’euros.

L’Europe accorde également une prime herbagère agroenvironnementale. C’est typiquement un soutien au maintien des prairies sur une exploitation. Chez nous, 1 950 agriculteurs en ont bénéficié pour 7,6 millions d’euros.  Sachant que toutes ces aides ont une contrepartie : il faut observer un cahier des charges destiné à préserver l’environnement et le bien-être animal.

@qui ! En France, un soutien accru a été envisagé en faveur de l’agriculture de montagne. Qu’en pensez-vous ?
J-M.A
– La prime herbagère va être intégrée dans l’indemnité compensatrice de handicap naturel, qui sera revalorisée. C’est un signe montrant qu’il existe bien un système destiné à compenser les difficultés liés à ces territoires. Cela dit, la situation des Pyrénées-Atlantiques est très complexe.

Si la montagne va bénéficier d’aides accrues, la situation est plus contrastée sur les coteaux, où l’on peut avoir un équilibre, mais aussi du négatif dans l’octroi des aides. Nous sommes beaucoup plus inquiets en zone de plaine. Des exploitations céréalières ou des élevages ne bénéficiant pas d’aide directe, comme la volaille, ne vont pas pouvoir compenser la baisse du soutien de la PAC. Cela peut aller jusqu’à une différence de 26% pour les céréales.

Autre problème : des bassins de production de bovins-lait situés dans les zones de plaine et de coteaux ont été fragilisés par la crise du lait survenue en 2009. Ils ne s’en sont pas remis. Le mouvement va s’amplifier avec la PAC. Pour la vache laitière en plaine, notre simulation prévoit par exemple  – 19% d’aides. Il faut donc relativiser les annonces faites le gouvernement. Tout dépend des productions et des territoires.

@qui ! La nouvelle PAC prévoit aussi d’encourager les jeunes à l’installation. Un domaine dans lequel les Pyrénées-Atlantiques n’ont pas à rougir. Jugez-vous cette mesure positive ?
J-M.A
– Depuis vingt ans, on dénombre 130 installations par an chez nous. Cela dit, la véritable dynamique d’une telle opération ne repose pas sur les aides, mais sur la vitalité économique d’une filière de production. Les jeunes doivent donc être très vigilants, et veiller à ce que l’aide qu’ils vont recevoir de la PAC, compense bien la baisse qu’elle connaitra dans certains secteurs, comme la plaine. Aujourd’hui, les deux tiers des installations ont lieu en piémont ou en montagne. Et iI faut savoir qu’en moyenne, les gens ne dégagent qu’un revenu un peu plus supérieur au SMIC.

Par ailleurs,  l’Etat va déléguer aux régions la gestion des crédits du second pilier, dans lequel les aides à l’installation sont inclues. Or, non seulement on ne connait pas leurs nouveaux montants, mais les changements importants que va connaître le mille-feuille administratif vont aussi modifier la donne. Des régions vont se regrouper, et les départements qui venaient compléter les soutiens à l’installation fournis par l’Europe vont disparaître. Résultat : on est dans le flou.Là aussi, attention aux effets d’annonce.

@qui  Une somme de 200 millions d’euros est prévue en France pour accroître la compétitivité des exploitations. Les normes techniques imposées par l’Europe aux agriculteurs ne sont-elles toutefois pas trop lourdes ?
J-M.A
– Elles sont souvent ou  bien inadaptées, ou bien exagérées, et motivées par des inspirations maximalistes dans la recherche de la préservation de l’environnement et de la protection animale. On demande énormément aux agriculteurs français, alors qu’il existe de grosses distorsions entre les pays européens. Que ce soit sur la mise en marché des produits vétérinaires et phytosanitaires, ou encore sur le coût de la main d’œuvre salariale.

Bien sûr, il n’y a pas que du négatif. Les 200 millions doivent nous permettre de structurer nos filières, de mettre en place des signes de qualité, d’améliorer les outils de transformation etc. Cela dit, c’est un peu un pansement sur une jambe de bois.

@qui ! Le gouvernement prévoit également d’augmenter le budget consacré aux mesures agroenvironnementales. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
J-M.A
– J’ai l’impression que certains politiques veulent se donner bonne conscience. Mais les cahiers des charges interdisent ou compliquent l’accès aux aides. Dans les Pyrénées-Atlantiques, on ne trouve que 419 bénéficiaires de ces soutiens financiers, pour un montant de 1,2 millions d’euros. Le fait qu’il y en ait aussi peu montre bien la difficulté des agriculteurs à s’adapter à ces exigences. A tel point que les exploitants estiment souvent qu’il s’agit d’une « prime au risque ». Il faudrait de la simplification.

@qui ! D’une manière générale, la nouvelle PAC va-t-elle dans le bon sens ?
J-M.A
– Au cours des cinq ans qui viennent, le montant des aides accordées par exploitation, dans le cadre du premier pilier, va converger vers une moyenne nationale. Cela présente l’avantage d’équilibrer un peu le soutien entre les différents territoires et les différentes productions. Mais après, il y a les cas particuliers, qui peuvent tronquer cette tendance. Il faut aussi considérer que ces soutiens de l’Europe ne représentent qu’environ 30% du chiffre d’affaires des exploitations. Le rôle d’une chambre d’agriculture est d’éviter des mouvements irrationnels basés sur la seule prise en compte de la PAC. Il nous faut aussi accompagner les agriculteurs pour les conseiller sur la rentabilité des exploitations, et les aider à  répondre à leurs aspirations sociales, pour ne pas tout limiter aux aides européennes.

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