Devenir conseiller prud’homal à 25 ans, l’idée peut paraître saugrenue. C’est pourtant le choix qu’a fait Jason Herbert, rédacteur web de profession. Ce mercredi 31 janvier, il fera sa rentrée au conseil d’Angoulême au côté des autres conseillers prud’homaux, parmi lesquels on trouve une majorité de nouveaux venus dans la fonction. Pourtant le jeune homme n’a pas fait dix ans d’études de droit social, ni même des années d’expériences dans un service de ressources humaines. Le parcours de Jason est plutôt atypique. A 18 ans, au moment où il obtient son bacalauréat professionnel en commerce, il a déjà créé sa petite entreprise car à côté de ses études, il exerce une activité de chargé de communication numérique. Au moment, où il hésite à intégrer la faculté, il est repéré par le quotidien la Charente libre où il exercera, aussi, la fonction de rédacteur web au desk pendant un peu plus de deux ans et demi. C’est malheureusement un premier dossier prud’homal le concernant qui lui fera découvrir de l’intérieur le fonctionnement d’un conseil des prud’hommes. « . Je me suis beaucoup impliqué dans mon dossier au côté de mon avocate. Je voulais comprendre les choses, les argumentaires des deux parties et sur quels textes législatifs ils s’appuyaient. Cette expérience que l’on peut juger mauvaise au début d’une carrière professionnelle m’a donné le goût pour la législation du travail, le droit social. En fait je me suis découvert une vraie passion pour ces questions dans un monde du travail qui se complexifie, » explique le jeune homme.
Pendant l’instruction de son propre dossier, Jason trouve appui auprès de la CFDT, qui va l’accompagner. Il adhère début 2016. A l’automne dernier, il apprend que les modalités de nomination des conseillers prudh’homaux sont modifiées : les candidatures sont désormais présentées par les syndicats. Il postule. La réaction de l’Union départementale de la Charente sera d’abord la surprise au vu de son âge. Pendant plusieurs semaines, Jason va participer aux permanences juridiques de son syndicat et s’impliquer. Sa candidature sera validée.
Seul le droit doit prévaloir
En décembre, il va suivre une formation en droit de 4 jours, proposée par le syndicat. Le 11 janvier dernier, Jason Herbert a prêté serment. Il siège dans la section encadrement du conseil. La durée du mandat est de quatre ans. A la veille de l’audience solennelle de rentrée, Jason se dit plutôt confiant. « Je sais que mon âge va surprendre. Certains pourraient se dire je vais être défendu par quelqu’un qui n’a pas ou peu d’expérience, je cours à la catastrophe. D’abord, on n’est jamais seul, il y a deux représentants du collège employeurs et deux représentants du collège salariés. Aux prud’hommes, certains demandeurs ont l’impression de jouer leur vie. L’impact psychologique est fort. La seule attitude que je dois adopter est de beaucoup travailler les dossiers et surtout de m’appuyer uniquement sur le droit. » Il ajoute avec une pointe d’humour, « il faudra aussi que j’adopte le costume pour gagner en crédibilité en terme d’image ». Dans les prochains mois, le jeune homme devra suivre, comme tous les autres conseillers, une formation obligatoire sur le fonctionnement du conseil, pour acquérir des bases en droit, réalisée par des magistrats professionnels de l’école nationale de la magistrature. « Ces formations sont une excellente chose. Nous sommes considérés comme des magistrats non professionnels mais c’est essentiel d’acquérir des bases juridiques. » Jason a le soutien de sa compagne qui est responsable d’un service de ressources humaines, même si celle ci se trouve parfois de l’autre côté de la barrière dans certaines affaires. « Il va y avoir des débats entre nous, c’est certain, mais elle va aussi m’aider à appréhender mes nouvelles missions. » La seule chose que Jason ne pourra pas faire, compte tenu de son âge au vu du réglement intérieur, est de présider une audience. « C’est dommage, mais c’est ainsi, regrette t-il. Jason a aussi conscience qu’il s’agit d’un tribunal de proximité dans une petite ville où tous les protagonanistes se connaissent « C’est le droit et uniquement le droit qui doit prévaloir dans le traitement des dossiers, quel que soit la qualité du demandeur. »