L'ÉDITO
par Joël AUBERTLes drôles de débat au sein des instances du foot français
En publiant le verbatim d'une réunion interne à la Fédération où était discutée l'idée de quotas pour limiter le nombre des joueurs africains ou maghrébins dans les centres de formation, notre confrère Médiapart a provoqué une vraie tempête. Raciste la Fédération française de Football, raciste Laurent Blanc, lui qui a joué sur tous les terrains de France d'Europe et du monde côte à côte avec les Desailly, les Thuram, et autres Zidane ? On ne le croit pas un seul instant ; d'ailleurs son attitude en tant que sélectionneur, à aucun moment, ne le donne à penser ; le choix d'un capitaine à Bordeaux ou en équipe de France, un Alou Diarra ou un Samir Nasri plaide pour lui.
Alors ? Où débusquer une intention de discrimination ? Il semble bien qu'elle se soit nichée dans un débat que les techniciens du foot peuvent entendre mais que la société française, aujourd'hui, ne peut pas accepter. Un débat, à la fois politiquement incorrect et pour le moins maladroit.
D'une part, le foot français formerait trop de jeunes joueurs qui ayant ensuite le choix de porter le maillot des « bleus » opteraient par exemple pour leur pays d'origine, le Maroc ou le Sénégal, le Mali ou l'Algérie...
D'autre part, le gabarit des joueurs de couleur finirait par prendre le passur celui de nos jeunestêtes blondes bien nées dans nos contrées provinciales .
Le débat révélé par Médiapart a bel et bien existé. Laurent Blanc d'abord « outré » d'être soupçonné de quelque propension à jouer la discrimination en est venu à s'excuser. Dont acte.
N'empêche, comment ne pas être désolé qu'à l'heure de la mondialisation, alors que les clubs professionnels vont faire leur marché sans vergogne en Afrique, les instances du foot français suscitent, sans probablement penser à mal, à un débat naguère lancé par une certain Jean-Marie Le Pen. Il y a bien assez des ambiguïtés de nos politiques au pouvoir, des débats sur l'identité nationale, de l'instrumentalisation de l'immigration en provenance de Tunisie pour que le foot, sport populaire et ouvert à la diversité, ne se mette pas à jouer à ce jeu-là.
Joël Aubert