L'ÉDITO
par Solène MÉRICL’écologie du quotidien, quel défi…
Elle a cinq ans et supplie pour que sa mère la prenne en photo en train de se brosser les dents sans faire couler l’eau du robinet. Idem lorsqu’elle pense à éteindre la lumière en sortant d’une pièce. Son assiette, de plus en plus souvent vide à la fin des repas, mérite aussi le clic synthétique des photos de smartphone. « J’ai tout mangé ! », lâche-t-elle fièrement, « la photo ! ». Et on admire sur l’écran l’image de cette assiette vide, par ailleurs toujours posée sur la table. Fierté familiale.
Au sentiment du devoir accompli, un brin de malice vient soudain éclairer son regard. Le verre n’est, lui, pas tout à fait vide. Malgré les protestations parentales encourageant à avaler ces trois dernières gorgées, l’enfant se rue déjà vers la première plante en pot venue pour généreusement partager son eau précieuse, qu’elle a décidé de ne plus gaspiller. Cette fois, les parents n’ont pas couru derrière pour prendre une photo. Mais le plaisir du « jardinage » valait bien ça.
Ce roman photo écolo d’une petite élève de moyenne section de maternelle, c’est l’école qui en est à l’initiative. Les parents n’avaient certes pas attendu de devenir photographes professionnels d’assiettes vides pour tenter de poser quelques bases. Mais cette histoire de photos, en plus des félicitations familiales, ça marche. Ce projet pédagogique porté par l’école donc (redisons-le, nos enseignants sont formidables !), c’est une association à succès qui en est à l’origine. « Ma petite planète » propose à tout âge et à tous les milieux (votre entreprise peut s’y mettre) des défis environnementaux, adaptés bien sûr au public.
Les parents d'élèves partagent joyeusement les photos de leurs enfants nouvellement mais pleinement convertis à l’écologie, sur un réseau commun. La maîtresse note les points rapportés par les défis réalisés à la maison et en classe. Dans désormais 15 jours, on saura laquelle des 3 classes de l’école maternelle locale aura remporté ce challenge. Car chaque défi individuel réalisé ramène des points au collectif de la classe.
Le suspense est à son comble, même si on retiendra surtout que l’essentiel est de participer et que l’effort doit se poursuivre au-delà des trois semaines de défi. La petite graine de la responsabilisation individuelle dans le sort commun de notre planète, et surtout de la qualité de son environnement et de nos vies à venir, est plantée. Aux familles, à l’école, à la société de faire en sorte qu’elle continue à pousser.
Mais tout ne sera pas toujours facile. Et les agriculteurs qui réclament encore et toujours à cor et à cri l’application de la loi Egalim en savent quelque chose : l’alimentation est une des réponses clés à apporter à ce défi global et urgent auquel, en réalité, aucun de nous n’échappe. Sur ce thème, la restauration collective qui flirte avec près de 8 milliards de repas annuels en France, doit y avoir une place primordiale. Tant pour le revenu de nos agriculteurs que pour l’équilibre de notre planète, et la santé des convives.
En Nouvelle-Aquitaine, l’effort est important notamment du côté des lycées, embarquant la collectivité, les gestionnaires dans les établissements via la commande publique (qui n’est pas si facile à tordre dans le sens d’Egalim) et les producteurs locaux. En lien aussi avec les Départements et les territoires dans le cadre des PAT(projets alimentaires territoriaux), les choses avancent. Les lycées néo-aquitains ont atteint 40 % de produits locaux et 21 % de produits bio en 2023. La plupart des Départements encouragent aussi cette alimentation de proximité et donc de saison.
Mais, cette même semaine, en plein Défi pour sa planète, la petite écolo en herbe, a dit à sa maman au retour de l’école qu’elle s’était un peu étouffée à midi à la cantine.
« - En mangeant quoi ?
- Une tomate. »
La mère, aussi aura eu du mal à l’avaler, cette tomate du mois de mars, sortie d’on ne sait où, produite on ne sait comment. Les défis Ma petite planète à l'école ont encore du boulot devant eux, et pas uniquement dans les salles de classe.