icone plume

L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
10/04/2010

La fronde contre l’Etat monte des départements et régions

Les frondeurs sont des élus, pourtant en apparence responsables, dotés par les lois de la République d'un pouvoir exécutif dans leurs assemblées, les départements. Le geste spectaculaire de Claude Bartolone, président socialiste du conseil général de Seine-Saint-Denis, présentant un budget en déséquilibre, ce qui lui est interdit, a marqué ce 8 avril les esprits, et lui a valu le rappel à l'ordre du gouvernement.
Il témoigne, cependant, de la montée en puissance de cette fronde qui ne tient pas seulement au climat politique des lendemains d'élections régionales favorables à la gauche. Dans une délibération qui remonte au 9 mars dernier l'Assemblée des départements de France, à l'unanimité, droite et gauche réunies, approuvait une délibération demandant à l'Etat de respecter ses engagements. Les départements qui ont hérité de la gestion de nombre d'aides sociales décidées au nom de la solidarité nationale ne reçoivent plus les compensations que l'Etat doit assumer. Le manque de financement est estimé à huit milliards d'euros, une trentaine de départements étant ainsi en grande difficulté, contraints de réduire dépenses de fonctionnement et d'investissement. Et ceci, dans des proportions telles que le climat au sein des collectivités se tend, ici et là. Et quel'inquiétude grandit, y compris dans le milieu des entreprises qui commencent à réaliser que les marchés publics vont devenir plus rares, avec des conséquences inévitables pour leur activité.
Dernière initiative spectaculaire, celle de Philippe Madrelle, président du Conseil général de Gironde qui a fait déposer ce 9 avril une requête pour « contentieux indemnitaire » auprès du tribunal administratif de Bordeaux. Objet du différend : le préjudice estimé à près de deux millions d'euros pour les exercices 2007, 2008, 2009 lié à la non compensation par L'Etat de la mise en œuvre de la réforme de la protection de l'enfance décidée par une loi du 5 mars 2007. Le Conseil d'Etat a été saisi, notamment par le Conseil général de Saône-et-Loire présidé par Arnaud Montebourg, dans un dossier similaire et vient d'obtenir gain de cause. La Dordogne est d'ailleurs sur le point d'engager la même procédure.
Le différend est assez grave pour que le premier ministre ait jugé utile de la faire étudier au fond. Mais il n'aurait sans doute jamais pareille dimension si ne se profilait la réforme territoriale qui vise à réduire à néant l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et à supprimer la clause de compétence générale. Si cette réforme voit le jour c'en est fini de la liberté d'agir au service des territoires, des associations et, souvent, dans des domaines où il est notoire que l'Etat n'a plus le premier sou pour le faire.
Alain Rousset, le président du Conseil régional d'Aquitaine qui vient d'être réélu à la tête de l'Association des Régions de France a demandé audience à l'Elysée dans un contexte délicat pour Nicolas Sarkozy. Il ne peut rester sourd à la montée en puissance de cette fronde qui, de plus en plus, touche, aussi, les élus de sa propre famille politique. Mais il s'est personnellement beaucoup engagé à faire aboutir cette réforme territoriale et on l'imagine mal y renonçant. Le Parlement qui l'étudie, par bouts et morceaux, est appelé à jouer un rôle correcteur et certains rêvent même d'un Sénat basculant à gauche en 2011 pour arrêter ce qu'ils considèrent comme une machine infernale lancée contre « l'autre France ».

Joël Aubert

Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

A lire ! Éditos précédents