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L'ÉDITO

 par Cyrille Pitois Cyrille Pitois
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17/02/2023

D’urgence se réconcilier avec l’agriculture

Quelques jours après Paris, c’est Bordeaux qui voit passer le cortège des paysans en colère. La profession ballotée entre les crises des différentes productions n’est pas à l’abri de l’inflation sur les matières premières ou des augmentations de prix des ressources énergétiques. La guerre en Ukraine finit de brouiller les cartes.

Mais au-delà des crises conjoncturelles, il y a un modèle que se fendille. En témoigne le nombre d’agriculteurs qui se préparent à partir à la retraite. En région Nouvelle-Aquitaine, première région agricole de France, par la valeur produite, 40 % des exploitants auront atteint l'âge légal de départ en retraite d'ici dix ans. Soit la bagatelle de 20 000 hommes et femmes sur un effectif de 60 000 paysans de la région.

Le métier est difficile, la rémunération n’est pas du tout à la hauteur des efforts déployés, les risques financiers liés aux emprunts considérables ont de quoi effrayer, la dépendance à certains systèmes coopératifs obère l’autonomie. Et depuis quelques années, l’œil suspicieux de la société sur l’agriculteur pollueur ne rend pas serein. On pourrait encore évoquer les risques climatiques qui reviennent de plus en plus souvent sous forme de calamités météo. Comment ne pas comprendre les réticences d’une génération montante à épouser un tel parcours semé de pièges ?

Dans le modèle social du siècle précédent, les urbains avaient presque tous des origines paysannes ou une proximité avec le monde rural qui préservait une connexion entre ville et campagne. Aujourd’hui la fracture est consommée. La nécessaire modernisation de l’outil agricole a fait perdre aux fermes le charme qu’on y trouvait le temps d’une journée à la campagne pour « faire » les foins ou ramasser les oeufs.

Au travers des salons de l’agriculture à Paris ou à Bordeaux et grâce à de multiples opérations de communication, la profession ne lésine pourtant pas sur les efforts destinés à montrer ce qu’elle sait faire de mieux, à expliquer son rôle essentiel dans la chaîne alimentaire et l’animation de la vie des territoires. Mais quelque chose s’est cassé.

Toute la profession ne s’empare pas avec le même cœur des nécessaires obligations environnementales. Entre les bio radicaux et les tenants d’un développement quasi industriel de l’agriculture, il va bien falloir trouver des passerelles plutôt que de continuer à creuser des fossés pour ne pas dire des bassines. Même médiation nécessaire avec les riverains qui ne supportent plus d’inhaler des pesticides. Les débats en cours sont nécessaires. Mais ils doivent être productifs et permettre d'établir les règles d’un vivre ensemble.

Il est urgent de dégager une vision collective cohérente, pour écrire un modèle d’agriculture qui fasse consensus et qui sera encouragé par une politique de long terme. En défilant dans les villes, le monde paysan démontre que l’objectif n’est pas encore atteint.

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