L'ÉDITO
par Joël AUBERTNos estivales: De Lescun aux Aldudes par Iraty
Iraty et sa forêt de hêtre, la plus grande d'Europe qui, en cette année de grandes eaux, respire la santé. Nous avons décidé de poser notre sac dans l'un des 39 chalets du site. Un toit pour abriter notre escapade, une maison de bois équipée de l'essentiel où la nature, de plain pied avec vous, est une invitation à la balade. A moins que ne vous saisisse une irrépressible envie de sieste bercée par les sonnailles du troupeau de blondes d'Aquitaine, elles-mêmes en pleine forme. Ne laissez quand même pas passer l'occasion de gagner les crêtes d'Orgambidexka, de ressentir le frisson de la haute montagne, de saluer le Pic d'Orhy et d'admirer le ballet des vautours fauves.
Au delà de la carte postale, il faut ici prendre le temps, comme nous l'avons fait, de regarder à ses pieds, revivre la nature. Après un long hiver elle renaît, pleine d'ardeur à l'image de la bruyère et de ses limaces noires, parties en rangs serrés à l'assaut d'un improbable potager ou de quelques céréales tendres. Il faut laisser le soir vous gagner lentement, la nuit se glisser sur les sommets et la fraîcheur vous envahir : sans doute un don du ciel en ce lieu propice à la méditation. Pour peu que vous ayez fait une belle rencontre, alors vous succomberez aux délices de la parole infinie. Et, le lendemain, vous reprendrez la route qui, via Mendive, Saint Jean Pied de Port et Saint Etienne de Baïgorry vous conduira aux Aldudes. Cette autre vallée qui s'enfonce dans la Navarre en direction du Pays Quint.
Une bonne heure de route et, là, nous retrouvons l'ami Pierre Oteiza pour une autre balade, à flanc de montagne. De parc en parc, cette fois, où grandissent à l'air libre, selon une savante gradation d'âge, ces porcs basques, blancs et noirs qui enchantent les enfants de la ville, le temps d'un Salon de l'Agriculture. Ici, dans leur biotope, ils trouvent le terrain propice à leur croissance, gage de la qualité des jambons qu'ils deviendront, une fois abouti un affinage propre au lieu et à l'haize Hegoa, le vent du sud. Cette renaissance du porc basque, car c'en est une, véritable, doit beaucoup à la pugnacité de l'homme qui incarne ce coin somptueux de la montagne basque.
Depuis les crêtes, la vallée offre, au regard, la confirmation d'une rare vitalité. Parmi les fiertés légitimes de nôtre hôte, ce séchoir collectif que Pierre Oteiza nous montre du doigt. Fruit de son entente avec quatre artisans du Pays Basque, les Arrieta et Curutchet de Saint Jean de Luz, Accoceberry d'Espelette, Arruabarena de Hendaye, ( « se réunir pour avancer » selon le mot de Pierre), aidé par la Région et l'Europe, il est à la pointe des techniques et l'outil de toute une vallée. Sait-on que dans ce département des Pyrénées-Atlantiques qui installe plus de jeunes agriculteurs que dans le reste de l'Aquitaine, la vallée des Aldudes est, en la matière, championne d'Europe... Ici nous prenons la mesure, une fois encore, de la force créatrice de l'identité et d'un développement assis sur le meilleur de la tradition, allié à la modernité. Et, lorsque vient le moment de passer à table, les mots sont impuissants à décrire ce qu'est l'accueil chez les Oteiza. D'ailleurs, on vient de loin dans cette vallée de Baigorry, du Japon par exemple, tel ce couple d'éditeur et publicitaire, fier de montrer au maître de maison, les pages du magazine qui lui sont consacrées à Tokyo. Yuki Kano et Eriko Kano, dans leur périple européen sont venus, en effet, tout exprès visiter le charcutier des Aldudes. Séquence photos rehaussée, ce jour là, de la présence d'une figure du rugby bayonnais, Pépito Elhorga, charmant convive qui prépare sa reconversion au sein des Transports Lataste. Deux heures inoubliables; un vrai moment de fraternité avec, en guise d'au revoir, un doigt de manzana.