Une vingtaine de participants, tous sourire aux lèvres, découvrent ou redécouvrent la sensation de la course. Mardi 9 avril, malgré la pluie, des patients de tous âges ont sillonné le stade US Talence et ses alentours.
L’organisateur de cet évènement : l’entreprise Proteor, qui développe des solutions d’appareillages et de composants orthopédiques afin d’aider les personnes amputées à mieux vivre avec leur handicap. L’objectif ? Organiser une journée d’essais encadrés de lames de course pour les personnes amputées tibiales et fémorales. Car les prothèses de la vie quotidienne ne permettent pas de courir, contrairement aux lames spécifiques développées par la société.
Au niveau des sensations, ça n’a rien à voir
« J’en ai pleuré », sourit Nicolas Perrier-Basly. Le jeune homme de 20 ans, amputé de sa jambe droite en janvier dernier suite à un accident de moto, a redécouvert la sensation de faire de la course et de s’entraîner. Très sportif, il était, avant son accident, en formation pour intégrer l’armée de l’air et devenir pilote de chasse. Toujours en rééducation au Centre de la Tour de Gassies, à Bruges, non loin de Bordeaux, ce sont les équipes de ce dernier qui l’ont poussé à participer à l’évènement. « Mais je savais que ça allait me plaire », rit-il. « Au niveau des sensations, ça n’a rien à voir. Tu passes d’un équipement fait pour la vie quotidienne à un équipement fait pour la performance ». Le jeune homme souligne « la propulsion » et « le rebond », possibles grâce à cette lame, encore plus efficaces qu’avec une jambe valide.
Composée en fibres de verre et de carbone, la lame testée à Talence est destinée aux personnes amputées qui souhaitent retrouver une activité sportive, quel que soit leur niveau. Proteor, entreprise familiale basée en Bourgogne, organise régulièrement ce type d’évènement dans toute la France. « À Bordeaux, on en organise quasiment tous les ans », explique Alexandra Houiste, responsable marketing de la société. Comme Nicolas, la plupart des patients qui s’y rendent, y ont été envoyés par leur centre de rééducation ou leurs orthopédistes.
Entre 7 000 et 16 000 euros
Les potentiels utilisateurs font cependant face à un problème de taille. Contrairement aux prothèses de la vie quotidienne, ces équipements dédiés au sport ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale, car non considérés comme nécessaires. Et il faut compter environ 7.000 euros pour une prothèse tibiale et 16.000 euros pour une prothèse fémorale dans le cas de Proteor.
Afin de permettre aux mieux les patients à acquérir ces équipements, l’entreprise met en relation les patients avec des associations ou des fonds de dotation comme Génération Avant-Garde. Ce projet de solidarité bordelais vise à donner accès au sport au plus grand nombre, et s’adresse aux personnes valides ou handicapées. Pour fournir des fonds aux patients qui ont recours à leurs services, Génération Avant-Garde organise des évènements, ou compte sur le soutient d’entreprises ou de particuliers. Mais les procédures sont longues, et les dossiers ne sont pas toujours acceptés.
« Pouvoir se reconstruire »
Thomas Garcia, 41 ans, s’est rendu à l’évènement pour « essayer de trouver des financements auprès de Génération Avant-Garde ». Après un accident du travail en juin 2022, alors qu’il était « chef d’entreprise dans le bâtiment », sa jambe droite a du lui être retirée « en urgence ». « Très sportif » de nature et compétiteur, le quarantenaire aurait également besoin d’une lame, afin de pouvoir performer dans les meilleures conditions. S’il avait déjà participé à une journée organisée dans sa ville d’origine Clermont-Ferrand, il a pu cette fois courir « 5 ou 6 kilomètres » avec la lame. Bien plus que le simple « test » de la première fois.
« Ces journées sont très importante pour nous », affirme Sophie Loubet, marraine de Génération Avant-Garde, également présente lors de la rencontre. « On attend tous les patients pour pouvoir essayer les prothèses […] Il y en a beaucoup qui sont venus sans même savoir qu’ils allaient pouvoir arriver à courir. Et il faut pouvoir leur donner cette prothèse, pour qu’ils puissent continuer à se reconstruire ».