Transition énergétique dans les Pyrénées-Atlantiques, une voie venue d’Alsace


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Transition énergétique dans les Pyrénées-Atlantiques, une voie venue d'Alsace

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 25/10/2017 PAR Solène MÉRIC

Si l’agence d’urbanisme avait voulu créer un électrochoc auprès des collectivités des Pyrénées-Atlantiques quant à leur marge de progrès possible en matière de transition énergétique, elle ne s’y serait pas prise autrement. Elle n’aurait pas fait autrement non plus pour leur rappeler (plus ou moins) subtilement que la transition énergétique, c’est surtout et avant tout affaire de volonté politique… Le cas du village d’Ungersheim, désormais labellisé « Village en transition », entre autres mille labellisations et certificats, en est l’exemple a priori parfait. Une réussite que Jean-Claude Mensch attribue à « une politique des petits pas » fondée en réalité sur trois piliers mis en place depuis 20 ans dans son village de 2200 habitants sur des thèmes qui dépassent largement celui de la transition énergétique.

La « philosophie » Ungersheim en trois piliers
Le premier d’entre eux est « l’autonomie intellectuelle, qui vise à nous sortir de la position de consommateur perpétuel à laquelle la société nous renvoie sans cesse », explique-t-il. Un concept très concrètement traduit dans sa commune par la mise en place d’une véritable démocratie participative, avec un conseil participatif, un jury citoyen (qui depuis a périclité reconnaît-il) et un conseil des sages. « Le conseil municipal suit à 95% les réflexions et idées issus du conseil citoyen. Dans le même ordre d’idée, sont mis en place des chantiers participatifs auxquels les habitants volontaires participent bénévolement, ou encore l’élaboration d’un atlas de la biodiversité de la commune, la promotion du commerce équitable et local, et la création d’une monnaie locale complémentaire « le radis », utilisée par 6% des foyers. Ce qui est en la matière un très bon score.

Deuxième pilier de la « philosophie Ungersheim », « l’indépendance énergétique », et depuis les années 2000, les initiatives et projets sont légion en la matière : 120m2 de solaire thermique ont été installés sur la piscine permettant 10 000€ d’économie par an, une chaufferie bois a été installée en 2006, permettant un réseau de chaleur, alimentant la piscine, le groupe scolaire, l’espace culturel et sportif (30 000€ d’économie par an), le passage en éclairage LEDS de l’ensemble du parc lumineux communal (soit 5000 à 6000 € d’économie par an), installation d’un parc photovoltaïque sur toitures d’une puissance de 5,3MW sur la friche industrielle d’une ancienne mine de potasse, dont la mairie a préempté le foncier, et désormais, avec une commune voisine, un projet de 3 centrales d’une puissance de 9MW est en cours, le tout sans oublier les campagnes d’économie d’énergie auprès notamment des élèves de l’école, ou des membres des associations communales. Ajoutons à cela, l’expérimentation de collecte de déchets verts par hippomobile ou bien encore, la réalisation d’un éco hameau « zéro carbone » de 9 maisons dont la deuxième tranche de 15 maisons devrait être livrée en 2018…

« Une démarche de solutions locales aux problèmes panétaires »
Sans oublier toutes les actions menées dans le sens d’une « autonomie alimentaire » du village, troisième pilier de la transition de la commune, avec la création d’une exploitation maraîchère Bio avec chantier d’insertion sur 900 ha de terre agricole, la création d’une régie municipale, la création d’une cuisine collective bio fournissant 550 repas par jour(« avec des repas 100% BIO chaque jour »), une micro brasserie, une conserverie etc…

Une liste à la Prévert incomplète qui frappe par la cohérence et la complémentarité de l’ensemble des initiatives mises en place. Pour l’expliquer, Jean-Claude Mensch précise que le village a « simplement choisi d’avoir une démarche de recherche et d’expérimentation de solutions locales aux problèmes planétaires de réchauffement climatique », le tout animé par la conviction « que si chacun fait sa part, nous y arriverons. Ungersheim fait la sienne », ajoute-t-il modestement… et plutôt deux fois qu’une pour n’importe quel observateur extérieur.

Des financements sans formules magiques
Quant à la question sur toutes les lèvres de l’assistance des financements de ces différents projets, il y répond volontiers. « Selon les projets nous avons su mobiliser les soutiens de l’ADEME, de la Région ou de notre département, pour la centrale photovoltaïque, nous avons été accompagnés par des investisseurs privés, dont une banque allemande, puisque les françaises ne voulaient pas s’y risquer, glisse-t-il; quant à la cuisine collective par exemple, elle n’est pas gérée par la Mairie, nous l’avons confiée à une association d’insertion qui nous verse un loyer… » En bref, il n’y a pas de formule magique, mais l’utilisation des moyens et dispositifs existant, de l’imagination et de la curiosité souvent, et une pointe de malice règlementaire… Au total, rien d’inaccessible à des communautés de communes qui sont désormais bardées de services juridiques ou de services de marchés publics… « Le plus long, admet-il, a été la maturation initiale du projet global ». Ensuite, « les choses se sont mises en place, les unes après les autres, parce que ce que l’on entreprenait fonctionnait, donc personne n’avait vraiment de résistance à poursuivre cette transition. Au final, assure-t-il, tout cela est simplement rempli de bon sens paysan. »

Une intervention à la fois motivante sur la marge des possibles, mais aussi peut-être un brin « assommante » d’exemplarité, suite à laquelle il était sans doute difficile de prendre le relais. Monique Sémavoine à qui le micro était justement tendu a ainsi avoué se sentir « ultra-débutante » face au maire alsacien avant de citer les initiatives menées par la Communauté d’agglomération de Pau Béarn Pyrénées en matière de politique de transition énergétique. Parmi elles: l’installation de deux chaufferies bois, le financement d’un fonds de concours pour aider les communes dans leurs investissements pour des travaux d’économies d’énergie sur les bâtiments publics, ou encore le lancement il y a 18 mois d’un Plan Climat Air Energie Territoire… Des éléments comme preuves d’une intention, mieux d’une « ambition forte » de la CAPBP dont elle s’est fait la voix, sans oublier de citer la labellisation de la CAPBP en Territoire à Energie positive pour la croissance verte en 2013.

Cela dit, en matière de labellisation, mieux vaut ne pas tenter de rivaliser avec la commune Ungersheim… Le petit village alsacien est clairement hors catégorie, sans doute, aussi, parce que plus encore que l’ambition, il a l’utopie comme moteur de son action concrète. Sur le thème de l’utopie, espérons qu’une telle démonstration, n’aura pas nourri les complexes mais bien plutôt libéré les volontés locales. En tout cas de nombreuses pistes d’actions et d’innovations ont été ici résolument ouvertes.


Sur le village modèle d’Urgersheim et son maire Jean-Claude Mensch, voir le film « Qu’est-ce-qu’on attend ? » de Marie-Monique Robin (2016) qui s’y consacre.

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