Bordeaux Métropole : Inno Campus se préfigure


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Bordeaux Métropole : Inno Campus se préfigure

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Temps de lecture 7 min

Publication PUBLIÉ LE 20/01/2020 PAR Romain Béteille

Deux milliards d’euros. C’est le montant global du contrat de projet partenarial d’aménagement Bordeaux Inno Campus, signé ce lundi 20 janvier par la métropole, l’État et de nombreux acteurs institutionnels, au premier rang desquels les maires des communes concernées par cette vaste opération dont celui de Pessac, Franck Raynal. « Cela souligne la mesure de ce que nous sommes en train de faire. C’est un contrat qui n’est pas figé et qui court sur dix ou quinze ans, que nos successeurs feront vivre en fonction des projets », a commenté ce dernier. « C’est un contrat de dialogue, même si chacun a ses ambitions et ses projets. Le but de la signature de ce PPA, c’est une gouvernance partagée », a souligné le maire du Bouscat et président de Bordeaux Métropole, Patrick Bobet. L’opération est en effet vaste : 1500 hectares répartis sur cinq communes (Bordeaux, Mérignac, Pessac, Talence et Gradignan) de la métropole, sans compter la commune de Canéjan, et une feuille de route conduisant une politique globale jusqu’en 2035.

(D)évolution


En relisant le contrat dans le détail (45 pages), on peut y revoir la naissance de BIC (Bordeaux Inno Campus) en 2016 et son objectif initial : la création de 10 000 emplois nets. Pour arriver à ces chiffres, l’opération se base sur un certain nombre de projets dits « structurants ». Le premier est logiquement situé sur le campus et vient s’ajouter à l’Opération Campus sur Carreire (Pessac, Talence et Gradignan), dans un contexte où l’Université de Bordeaux a signé sa dévolution en 2019 pour devenir propriétaire de son patrimoine et où Bordeaux Montaigne s’apprête prochainement à faire la même chose. À l’intérieur d’un « schéma directeur immobilier » sur vingt ans, l’Université envisage donc de dégager des « recettes foncières et immobilières » de 320 millions d’euros. Elles passeront par la construction de 420 000 mètres carrés de logements (dont la moitié seront destinés aux étudiants et aux chercheurs) et d’immobilier d’entreprise et 10 000 mètres carrés de « locaux d’enseignement supérieur ».

Au moment de savoir dans quelle mesure le fait que l’Université soit propriétaire de ses bâtiments change la donne lorsqu’il s’agit d’évoquer les ambitions d’Inno Campus, les voix sont unanimes. Pour Hélène Velasco-Graciet, présidente de l’Université Bordeaux Montaigne, « la dévolution nous permet aussi de travailler à la valorisation de notre foncier. La perspective de Bordeaux Montaigne, c’est aussi de développer nos missions d’enseignement et de recherche par le lien avec le monde socio-économique, notamment à travers les industries créatives. Nous sommes, par exemple, en train de créer un master autour de l’illustration, avec l’objectif de mettre en place un incubateur, on peut permettre aux étudiants de monter des entreprises ». L’objectif semble partagé avec Manuel Tunon de Lara, président de l’Université de Bordeaux, pour qui « les démarches de valorisation et les compétences de l’Université se multiplient, qu’il s’agisse d’installation d’entreprises ou de construction de logements, notamment étudiants, qui sont une vraie préoccupation pour nous tout en essayant de maintenir la densité du campus qui emménage certains équilibres. Un certain nombre d’entreprises peuvent bénéficier de ce tissu de recherche et accueillir des étudiants plus directement. C’est l’un des objectifs qu’on souhaite atteindre à court termes, on en est aux actes notariés ». Parmi les entreprises ayant vocation à être accueillies sur le campus, des thématiques se dégagent, comme le précise le maire de Pessac : «  »la santé, le laser et l’optique parfois relié et le développement numérique. L’innovation environnementale est aussi en plein développement ».

Logement et économie

Mais ces deux institutions ne sont pas les seules à être concernées par Inno Campus. On peut ainsi lire que le Crous, l’Ensap (École nationale supérieure d’architecture et de paysage » ou BSA (Bordeaux Sciences Agro) « envisagent de rénover et développer leur site ». Le CHU, de son côté, a chiffré un plan d’investissements de 500 millions d’euros d’ici 2030 : transfert des urgences de Saint-André vers Pellegrin et Haut-Lévêque, regroupement des écoles d’infirmiers sur le site de Xavier Arnozan « rationalisation » du stationnement et « valorisation de certaines empreintes foncières » sont notamment au programme. Côté logements, le renouvellement urbain du quartier Saige à Pessac par Domofrance pèse, à elle seule, 167 millions d’euros. La Fab, elle, sera chargé de construire 330 nouveaux logements au Pontet. Ces nouvelles constructions ne se feront pas sur fonds propres des bailleurs, comme le précise le contrat lui-même : « Le Crous souligne que le développement d’une offre de logement étudiant à loyer abordable repose sur un modèle économique fondé sur la mise à disposition d’un foncier gratuit et un financement sous forme de subventions de l’ordre de 15 à 20% du coût total de l’opération. En l’absence de foncier gratuit, la recherche de subventions publiques complémentaires est indispensable ».  Toujours côté logements, les objectif sont là aussi quantifiés : 35% de logements sociaux, 20% en accession à prix maîtrisés et 45% en « logement libre ». Avec 2900 logements prévus, les étudiants constituent donc, derrière le volet « logement libre étudiant et familial » avec 4100 logements, l’essentiel de l’assiette. Avec 8800 logements conventionnés sur la métropole (7500 sont gérés par le Crous dont 5000 sur le campus de Pessac-Talence-Gradignan), le but de l’opération est de « produire au moins 1200 logements conventionnés pour rattraper le déficit et au moins 2000 de plus pour répondre aux besoins nouveaux pour dépasser le ratio national de référence d’un logement conventionné pour dix étudiants ». En sachant que l’effectif étudiant sur le campus métropolitain continue d’augmenter chaque année (actuellement, l’effectif étudiant représente 13% de la population métropolitaine), le retard est donc très net, et l’opération BIC pourrait absorber une grande partie de ces nouvelles constructions.

Sur le volet économique, la création nette d’emplois a été quantifiée par catégories et par type d’immobilier d’entreprise nécessaire : l’essentiel des emplois sera situé dans des bureaux (6800 emplois) mais la plus grande surface occupée par des PME et PMI (250 000 mètres carrés, 2500 emplois). L’hôtellerie et l’hébergement temporaire (350 emplois), les commerces et services (250 emplois) et la « logistique et les services urbains » (100 emplois) se partageront le reste. « Même si la plus grande partie des emplois, notamment industriels, sera créée dans l’extra-rocade, l’intra-rocade sera aussi concernée, notamment dans le Campus Pessac-Talence-Gradignan et dans le quartier de Saige. Les flux logistiques devront être pris en compte », précise ainsi le PPA. En extra-rocade, Bordeaux Métropole a ainsi récemment signé une opération d’aménagement actant le développement de 480 000 mètres carrés d’immobilier d’entreprise et de 850 logements sur un périmètre total de 553 hectares (190 millions d’euros).

Transports et patrimoine

Le document comporte aussi un important volet dédié aux transports, dont les actions essentielles sont listées. Par exemple, une nouvelle liaison Pellegrin-Thouars-Malartic permettrait, sur le même tracé que la liane 8, de relier trois sites de l’Université : Carreire, Haut-Carré et Arts et Métiers (où serait implanté un nouveau pôle multimodal) avec les grands sites du CHU de Bordeaux. La concertation est en cours pour une mise en service prévue entre 2025 et 2027, le choix du tracé devrait se faire cette année. On peut également citer une nouvelle branche du tram B pour relier le campus et le centre-ville de Gradignan (même délais), un nouveau bus reliant Le Haillan à Gradignan en passant par la Cité de la Photonique (prolongement sur Gradignan envisagé entre 2025 et 2030), la mise à deux fois trois voies de l’A63 « pouvant conduire à la mise en place d’un péage », la création d’un barreau routier à Canéjan pour relier le site de La Briqueterie (convention prévue pour 2020), « assurer les continuités cyclables entre les barrières de Bordeaux et le campus (2021-2024) ou encore le projet de RER métropolitain, notamment la réouverture de la gare de Talence-Médoquine dont la métropole finance les études techniques. Le PPA indique d’ailleurs que « toute mesure favorisant un report modal au profit des transports publics et des modalités douces est donc, sinon un préalable, du moins une nécessité pour assurer un développement harmonieux du territoire. Il faut y ajouter un besoin de désenclavement relatif du territoire, en assurant de meilleures dessertes nord-sud et avec les deux pôles majeurs de la métropole que sont l’aéroport et la gare Saint-Jean ». Autrement dit : Inno Campus ne se fera pas sans améliorer la desserte. 

En continuant de décortiquer le contrat, on note quelques-unes des « actions permettant le développement territorial » listées dans le contrat partenarial : élargir le champ du comité stratégique et le remplacer par un « conseil d’orientation et d’innovation de BIC » auquel seraient ajoutés « d’autres acteurs de l’innovation » en plus des signataires; « constituer un réseau des acteurs de la santé : envisager une toile numérique partenariale » à l’horizon 2021, « créer un réseau de lieux labellisés d’interface » (deux sites baptisés Bic Box, qui serviront de « lieux d’interface » entre Inno Campus et les usagers); ou encore la valorisation du patrimoine de l’OIM (Opération d’Intérêt Métropolitain, autre titre d’Inno Campus). Cette dernière passerait notamment par un « guide du patrimoine bâti et naturel », une plaquette de recensement patrimonial, la création de nouveaux itinéraires piétonniers et cyclables ou encore la création de portes ouvertes à l’occasion des journées du patrimoine, le tout dès cette année. La durée du PPA est fixée à quinze ans avec une première période d’évaluation au bout de trois ans, puis « à minima tous les six ans » ensuite. Juste avant la page des signatures, le document conclue : « l’année 2020 sera consacrée à la mise en place des instances, à la réalisation des études techniques qui serviront de socles aux opérations et à engager la concertation et la mise en place des procédures d’autorisation des premières d’entre elles. A partir de l’année 2021, le projet partenarial d’aménagement pourra ainsi atteindre un « rythme de croisière ».

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Christine Darmuzey, vin sur vin


RB
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Temps de lecture 8 min

Publication PUBLIÉ LE 11/12/2016 PAR Romain Béteille

Le monde du vin et de la sommelerie serait-il un monde encore masculin ? Oui, si l’on en croit le titre de Meilleur Sommelier de France décerné en novembre dernier à un certain Gaëtan Bouvier, professionnel officiant à la Villa Florentine de Lyon (et déjà sacré « sommelier de l’année » lors des trophées de la gastronomie et des vins). Pour voir une femme en haut de la liste du premier prix, il faut remonter à… jamais. Même dans le titre de Meilleur ouvrier de France Sommelier, on ne retrouve que des hommes en remontant dans les dix dernières sessions. Pourtant, la professionnelle et mère de famille qui officie en tant que référente de la formation continue et responsable des programmes Worldsom à l’école BEST (Bordeaux École Supérieure de la Table) au sein du mini campus de la rue René Cassin est bien une femme. A cinquante ans tous ronds, Christine Darmuzey soigne son apparence autant que ses mots. Tenue noire et grise, veste en fausse fourrure, bureau rangé presque au carré, elle a la coquetterie et la maniaquerie apparentes. Elle nous reçoit dans une petite pièce personnelle entre deux tests d’alarmes incendies. Le mois dernier, elle a reçu le titre de « Maître Sommelier de France », dont elle garde dans son sac à main la grappe dorée pour accrocher à sa veste. Sa blondeur a quelques reflets mais les artifices, comme le collier qu’elle porte autour du cou, sont discrets. Sa stature en impose, mais sa discrétion intrigue. Qui est-elle vraiment ? 

Transformée

D’abord une ancienne jeune étudiante originaire de Pau, « assez rêveuse, un peu garçon manqué, casse-cou. J’étais le contraire de ma soeur, qui elle était très sage ». Sur sa formation initiale, non plus, elle ne mentira pas : « pas très passionnée par les études en formation générale », elle est plutôt branchée musique.  » Très souvent, on dit que ce genre de métier se transmet dans la famille de génération en génération. Je n’ai jamais eu cette éducation sur le vin de la part de mes parents », dira-t-elle. Le job de papa et maman, c’est plutôt l’or noir que le rouge.  En guise d’héritage, Christine ne revendique que des grands-parents bouchers-charcutiers et un parrain cuisinier dans la restauration. Elle commencera à rentrer dans le giron, comme souvent, par la petite porte. « Très tôt (au départ, c’était pendant les vacances quand j’avais 17 ans), j’ai commencé à faire des saisons pour gagner un peu d’argent ». Petit à petit, elle découvre le métier et une future vocation. Autant sa norme au lycée reste tout juste la moyenne, autant une fois intégrée au sein de l’École hôtellière, elle cartonne. « J’ai eu un professeur dans la partie oenologie, qui a su me passionner pour cette matière, il faisait passer un joli message autour du vin dans les cours qu’il donnait ». Une sorte de mentor qui ne dit pas son nom. 

La jeune femme, son diplôme en poche, ne ressemble déjà plus vraiment à celle qu’elle était au départ. Elle qui naviguait entre deux eaux, voilà qu’elle veut se spécialiser dans les métiers du vin en plein milieu des années 80, date à laquelle les vraies formations sont encore rares. C’est ce qui la poussera d’ailleurs à faire ses cartons jusqu’à Talence, pour être parmi les candidats à intégrer la première mention complémentaire en sommelerie. « Sur 14 étudiants, j’étais la seule fille. Dans ces métiers, on n’avait pas une présence féminine très importante, ce qui a changé aujourd’hui puisqu’on remarque, depuis une quinzaine d’année, un certain engouement des femmes ». Christine découvre la face cachée de la liqueur des dieux : son histoire, sa géographie, son approche de la dégustation. Un peu comme un nouveau monde, mais un monde encore et toujours masculin. Elle démarre vraiment son métier en poste de commis-sommelier au sein du « Vieux Bordeaux », ancien établissement reconnu ayant eu les honneurs du macaron, rue du Buhan. « Quand j’allais à la table du client, il croyait que c’était une blague. Il y avait toujours des questions test pour voir si j’avais la connaissance nécessaire, ce qui a été récurrent pendant pas mal d’années », avouera Christine.

Un cru de caractère 

Elle ne confessera pas avoir voulu tout laisser tomber, s’être énervée contre un de ses clients, pour la bonne et simple raison que Christine pense qu’elle est « d’humeur égale au travail, ce qui peut embêter beaucoup de gens ». Être une « femme dans un métier machiste », mieux vaut s’y habituer. Elle officiera en restaurant gastronomique pendant encore deux ans sur Pau et Aire-sur-Adour avant de trouver chaussure plus durable à son pied au sein d’un grand groupe hôtelier où elle gravira peu à peu les échelons jusqu’à être nommée responsable des vins au sein du restaurant gastronomique. Comme toujours dans une carrière professionnelle sans ratures, l’amour finit par se mêler de ce qui ne le regarde pas. C’est lors d’une dégustation qu’elle rencontrera l’ancien sommelier qui partage toujours sa vie. La Réserve de Pessac, le Château Lascombes ou celui de Lasterrat, son parcours à lui non plus n’a pas à rougir. C’est la naissance de sa fille qui a obligé Christine a changer de domaine. En quittant son véritable coeur de métier, elle devient sommelier-formateur, exécute des travaux ponctuels, notamment pour Vinexpo. Pendant celui de 1993, elle y rencontre Franck Chausse, directeur des études au sein de CAFA, organisme créateur de l’École Internationale des Vins et Spiritueux en 1986. 

Elle y aura un rôle majeur. « Franck cherchait une sommelière pour travailler dans la formation et monter tous les programmes de mention complémentaire en sommelerie mais en alternance, en contrat de professionnalisation ». L’oenologue et la sommelière formeront un tandem professionnel dont ils seront les seuls témoins pendant une dizaine d’années. Pour Christine, avoir fait se choix de se ranger derrière la casquette de formatrice juste avant ses trente ans a été un bon virage. « Je pense que je m’en sentais le profil. Ce qui était important pour moi, c’était de faire passer un message et de former les jeunes à ce métier. Il y a vingt ans, ça n’était pas vraiment une profession en vogue. Aujourd’hui, on en parle un peu plus, mais toujours pas autant que les métiers de la cuisine qui ont vraiment le vent en poupe. On est un peu bridés sur le métier du vin, on ne peut pas communiquer autant que sur la cuisine. Ca n’était pas un abandon au niveau de la sommellerie, c’était une reconversion professionnelle qui me ressemblait plus dans le côté transmission ». 

Terre de rigueur

Dans le choix de ses mots, tout semble positif, mais la réalité de la vie rattrape parfois son discours. « C’est un métier de rigueur, de service, qui demande un investissement personnel important que l’on fait quand on est jeune et qui devient difficile quand on commence à prendre de l’âge où avoir une vie de famille ». Après un passage par la faculté d’oenologie de Bordeaux en 1996, elle donne des cours de dégustation, d’oenologie, de technique, de gestuelle ou encore d’accords mets-vins, l’une de ses grandes marottes dans laquelle elle se spécialisera. « Ce n’est pas courant, d’habitude, chacun reste à sa place. J’ai un peu fait le caméléon ». On retrouvera, sans la chercher vraiment, cette importance de l’apparence chez elle, qu’elle ne reniera jamais et qu’elle prend même plutôt comme un compliment. « C’est un peu comme un acteur qui rentre sur scène : pendant deux heures il joue son rôle en laissant tout le reste au vestiaire. Je n’étais pas la même personne devant les clients et dans la vie, je devais avoir deux personnalités différentes ».

Plutôt réservée dans la vie de tous les jours, elle avoue que son travail la rendait plus expressive. « Le vin, c’est un métier viscéral, c’est la climatologie qui décide. Pour un sommelier, c’est important d’aller en propriété pour sélectionner les vins à la rencontre des vignerons et le servir en faisant passer un message de manière un peu plus humaine. On a pris peu à peu conscience de l’importance d’un sommelier dans un restaurant, c’est le dernier maillon de la chaîne. Au début, les propriétaires n’en voulaient pas trop en propriété de peur qu’ils racontent un peu n’importe quoi. Aujourd’hui, on leur déroule plutôt le tapis rouge ». Elle arbore un cliché lointain comme une parenthèse qu’elle referme aussitôt : l’alcoolisme. « Il a du poids dans une entreprise, il véhicule une image. Ca peut être un risque dès le départ quand on apprend à faire ce métier, d’où la rigueur nécessaire ». Ce mot, on l’entendra sortir de sa bouche une bonne dizaine de fois. Ca n’a jamais été un problème pour elle : la rigueur, elle a visiblement su la garder, y compris dans la vie de tous les jours : les dossiers sur le bureau sont droits, le portable est posé à l’horizontale, chaque chose à sa place. 

Destination finale ?

Mais alors, que reste-t-il du garçon manqué amateur de voile et de variétés ? Pas grand-chose, en fait. Les responsabilités ont pris le pas sur les rêves, bien qu’elle avoue avoir plusieurs fois souhaité avoir son propre domaine si elle gagnait aux jeux. Christine Darmuzey est aujourd’hui à la tête d’une école, responsable des formations continues et du programme de l’école de sommelerie Worldsom, on l’a dit. Elle a fait une boucle complète. « Je suis au service des professionnels de la restauration pour monter des thématiques courtes, ciblées permettant de perfectionner des connaissances dans les métiers de la restauration, le plus près possible des restaurateurs pour connaître leurs demandes. J’ai carte blanche ». Membre de l’association régionale des sommeliers de France depuis 1989, tout dans sa vie semble liée à son métier. Même sa fille, a qui elle a visiblement appris très jeune le goût du vin. « On l’a initiée à la dégustation. On a essayé de lui faire comprendre que ça fait partie du patrimoine, c’est quelque chose que l’on partage et dans lequel il y a une culture. Ce que nous n’avions pas eu de transmission dans la culture du goût, on l’a transmis à notre fille. Aujourd’hui, elle est spécialisée en oenotourisme ». Les chiens ne font pas des chats diront certains, elle répondra que c’est un choix délibéré et assumé et qu’elle aurait pu choisir un chemin tout à fait différent.

En dehors du vin, que reste-il pour définir la femme qu’elle est devenue ? Un club d’oenologie à Eysines ? Trop relié. Un peu de basket sur les bancs de la fac, de l’aquabike pour maintenir la forme. Et puis cette récompense de « Maître sommelier ». Comment l’a-t’elle pris ? Bien, forcément. « C’est très valorisant, c’est une reconnaissance par rapport à ses pairs, pas une revanche. Ce titre avait été fait pour les gens qui n’avaient jamais fait de concours, à la base. Je n’ai jamais voulu avoir des étoiles de partout, je suis plutôt discrète ». Réaliste mais pas rancunière, Christine est visiblement à l’endroit où elle aimerait être. Reste que sur le site internet de Worldsom, les quatre « meilleurs sommeliers du Monde » mis en avant au sein du comité pédagogique restent, à ce jour, tous des hommes. Le programme, renouvelé en 2017, va prendre une grande part d’oenotourisme dans ses bagages, mais fera visiblement un peu plus que simplement surfer sur la vague. Christine, elle, continuera de voyager un peu partout et de faire de la plongée à la recherche d’une ivresse qu’elle peut facilement revendiquer, celle des profondeurs. « Il faut savoir changer de bouteille de temps en temps ! ». 

Christine Darmuzey, vin sur vin from Aquipresse on Vimeo.

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