Grand entretien : Léonore Moncond’huy, maire de Poitiers « Il faut que l’on reprenne notre destin en main »


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Temps de lecture 18 min

Publication PUBLIÉ LE 16/10/2020 PAR Julien Privat et Solène Méric

@qui! : On est à un peu plus de 100 jours de votre élection, comment vous sentez-vous dans vos nouveaux habits de maire ? Comment s’est passé votre début de mandat ?

Léonore Moncond’huy : Je me sens bien ! C’est très intense parce qu’il y a à la fois un gros travail de structuration interne à faire, et des urgences à gérer. Il a fallu d’abord accompagner l’équipe dans sa prise de fonction avec des élus qui, pour la plupart, ne ne l’ont jamais été. Il y a donc eu tout un temps d’appropriation de la fonction, et, en même temps, il était important pour moi de me rendre disponible pour rencontrer des associations, des acteurs du territoire pour montrer que la municipalité reste à leur écoute, même après l’élection.
Ces premiers mois de mandat ont aussi été fortement marqués par la gestion de l’urgence, dont en premier lieu la Covid, et un été post-confinement pour lequel il nous a tenu à cœur de faire un plan vacances pour tous. Il y avait une priorité à permettre aux familles et aux jeunes de sortir, tout en aidant les secteurs du tourisme et de l’éducation populaire qui étaient en difficultés économiques. Ce plan vacances a été le premier pas d’une politique qui va être structurante pour le mandat, mais c’était important pour moi qu’elle puisse commencer vite.
Il a aussi fallu préparer la rentrée avec des protocoles sanitaires très changeants, et la rentrée universitaire a été un défi car on voulait à la fois permettre un accueil des étudiants dans des conditions conviviales et festives, tout en faisant respecter les règles de sécurité pour protéger les habitants.
Nous avons également accompagné les acteurs face à la covid, c’est à dire piétonniser des rues, étendre et mettre en place la gratuité des terrasses des cafés et restaurants. Une piétonnisation dont est on en train d’envisager la pérénisation, avec une consultation auprès des commerçants. Aucun commerce n’a fermé à Poitiers centre, directement à cause des effets de la crise. Ceux qui ont fermé pendant le confinement étaient déjà fragiles. En revanche le secteur touché de plein fouet, à Poitiers comme partout, c’est le secteur de l’événementiel: les traiteurs, restaurateurs, boîtes de nuit… On a essayé de maintenir le plus d’animations possible dans l’espace public pour soutenir les acteurs de la sécurité, les acteurs de la culture,… Mais malheureusement on a du en annuler certaines ; par exemple la fête de la musique, que l’on voulait faire le 21 septembre, a du être annulée.

@! : Si on revient à ces élections, vous aviez eu une approche citoyenne et collective, sans avoir forcément prôné un étendard vert, même si, parlant de vague verte, vous en faites bien sûr partie… C’est une démarche assez singulière, comment est-ce que vous maintenez cette dynamique collective avec les citoyens poitevins ?

L.M. : Effectivement, l’enjeu est de dupliquer en interne de la collectivité, le fonctionnement collectif que l’on a eu pendant toute la campagne, et ce n’est pas la même chose…! Désormais, il faut arriver à concilier ça avec le rythme de l’administration, le rythme démocratique des conseils municipaux… Mais, du fait d’une structuration d’un groupe qui se connaissait déjà bien, on a réussi à maintenir le même niveau de décision collective dans la municipalité, avec une organisation des réunions permettant d’avoir des décisions les plus collectives possibles. Et il y a aussi une forte délégation en confiance envers les élus sur la base de feuilles de route issues du programme. Désormais, chaque élu a une délégation pour la mise en œuvre d’une partie du programme. Et chacun est au travail, personne n’est à la traîne.
Ensuite, sur la dynamique Poitiers collectif dans sa dimension militante, il y a une association qui est en train de se monter. Elle n’est pas portée par des élus mais par des gens qui ont envie de s’approprier cette vague citoyenne pour la faire vivre durablement. L’Assemblée générale hier soir (le 12 octobre, ndlr) a rassemblé du monde. C’est vraiment positif. Celà dit, on est encore dans une phase de structuration. Que ce soit en interne ou en externe, il va falloir encore quelques semaines, quelques mois, pour qu’on retrouve pleinement l’état d’esprit Poitiers collectif, dans nos manières de faire.

 » Contribuer à ce que Poitiers soit connue pour autre chose que le Futuroscope « 
@! : Vous êtes passée d’élue régionale à élue municipale, avec, comme vous l’aviez annoncé, votre démission du Conseil régional, formellement actée le 5 octobre dernier. Cette relation avec la grande région vous la conservez cependant à travers votre fonction de vice-présidente aux partenariats à Grand Poitiers. Quelle sera la place de Poitiers dans cette grande région ? Votre prédécesseur Alain Claeys, parlait de Poitiers « porte d’entrée au Nord de la Nouvelle-Aquitaine », gardez-vous ce même état d’esprit ?

L.M. : Il y a là plusieurs dimensions. Ma vision de ce premier mandat à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, c’est que c’est une fusion qui a conduit à une forte centralisation, vraiment. En début de mandat on nous avait annoncé qu’il y aurait un équilibre entre les différents pôles, et en fait on se rend compte que la centralisation c’est vraiment faite à marche forcée, et que Bordeaux est devenue le centre et les autres la périphérie. Il y a un double mouvement à mettre en œuvre selon moi. La Région elle-même doit revenir vers les territoires, comprendre que les citoyens attendent la proximité qu’ils ont le sentiment d’avoir perdu durant ce mandat. Et, en même temps, du point de vue des villes et notamment, de la ville de Poitiers qui était une ancienne capitale de Région, on doit aussi faire avec ce nouveau schéma. Je pense qu’il y a eu une forme de passivité, de sidération face à cette nouvelle région qui nous a aussi un peu surpris par ses effets. Aujourd’hui, il faut qu’on reprenne en main notre destin.
Selon moi, nous ne sommes pas une « porte d’entrée » ; on est une composante à part entière de la Nouvelle-Aquitaine, et je pense que chaque ville de la Nouvelle-Aquitaine, chaque territoire, doit trouver une place équilibrée qui ne soit pas l’annexe de la capitale. Il faut entériner le fait qu’on ne pourra plus faire concurrence avec Bordeaux sur certains sujets. C’est à dire qu’il y a une capitale de région, et c’est clair, qu’il y a des atouts de centralité que l’on n’a pas ou que l’on n’a plus… Mais, du coup, ça laisse la porte ouverte à un autre modèle de développement en complémentarité avec Bordeaux et avec d’autres villes de la région. Je pense que les projets que nous portons sont vraiment à même de redonner à Poitiers une identité à part entière et une place plus équilibrée dans cette grande région.

@!: Ces projets, justement quels sont-ils ? Où en est par exemple, le projet de rendre Le Palais des Ducs d’Aquitaine aux Poitevins qui s’inscrit dans votre idée de « rendre Poitiers aux Poitevins »?

L.M.: Il va y avoir une phase de travaux qui va être très longue, et notamment parce que les fouilles ça prend du temps. Mais il nous tenait à cœur que ça puisse être un lieu accessible aux poitevins pendant le temps des fouilles, pour déjà commencer à ce que les personnes se le réapproprient. Cette première phase d’ouverture nous permet aussi à nous, d’observer ces usages pour voir ce que pourra être le Palais des Ducs demain. Est-ce que les gens viennent travailler, se restaurer, faire la fête?… Ça nous donne une indication sur ce qui est attendu. Actuellement il est ouvert de 10 h à 22 h, et ça marche, les gens s’en servent, ils viennent y travailler, se poser… et en plus il y aura bientôt internet ! Il y a encore le côté passage qui mérite d’être réaffirmer car on peut vraiment faire du Palais un lieu traversant dans la ville.
Ce projet va être véritablement structurant pour notre mandat, il va donner un lieu culturel, touristique, un lieu de vie très symbolique au cœur de Poitiers, et va aussi contribuer à ce qu’elle soit connue pour autre chose que le Futuroscope.
Un autre projet structurant du mandat, ça va être la requalification du quartier de la gare, qui est, pour le coup, « la porte d’entrée » de Poitiers, Grand Poitiers et, pour de nombreuses personnes qui viennent de Paris par exemple, de la région Nouvelle-Aquitaine. C’est vraiment important que ce quartier soit à l’image du dynamisme qu’on veut donner à la ville. L’un des projets phare ce sera la caserne Pont-Achard, qui est juste à côté de la gare et que les pompiers viennent de quitter. On voudrait en faire un tiers lieu qui permette de mobiliser des acteurs, économiques, culturels, et qui soit un lieu de vie et de pratiques associatives et citoyennes pour les poitevins et les poitevines. Un lieu à proximité de la gare pour se mettre au service des réseaux associatifs, des réseaux d’entreprises et des acteurs de l’ESS qui auraient besoin de faire des réunions entre des collaborateurs de Paris, de Bordeaux par exemple, avec des salles de visio conférence de pointe adaptées à leurs besoins. On n’est pas forcément sur une stratégie d’aller chercher des grosses entreprises pour qu’elles s’installent ; il y a beaucoup d’entreprises, de réseaux associatifs et d’acteurs de l’ESS qui ont fait le choix de maintenir un siège à Poitiers et le premier enjeu c’est de les garder, qu’elles ne cèdent pas à la tentation d’aller au plus près des lieux de décision bordelais. Le deuxième enjeu, c’est de créer les conditions pour que celles qui veulent venir s’y implanter ou en tout cas venir y travailler, puissent le faire. Ce qui compte c’est qu’il y ait de la vie économique, culturelle, associative à Poitiers.

En outre, l’avantage avec ce projet, c’est qu’il y a déjà beaucoup d’idées qui existent. Des collectifs d’acteurs de l’Economie Sociale et Solidaires sont porteurs de propositions, et nous souhaitons nous appuyer sur ces propositions pour ne pas repartir de zéro. On souhaite que rapidement, ici aussi, les poitevins puissent s’approprier cette caserne pour ne pas laisser le lieu vide pendant longtemps, même s’il est sûr que le projet finalisé aura vu le jour à la fin du mandat.

 » Quand on parle mobilité et rénovation énergétique, c’est déjà de l’écologie ! « 

@! : Sur ce mandat justement, comment vous voyez ces 6 années à venir ? C’est une découverte, vous êtes jeune, et avez d’ailleurs fait à ce propos l’objet de nombreux articles dans la presse nataionale…

L.M. :
Ce qui compte pour moi, c’est l’action que l’on va être capable de mettre en œuvre. La couverture médiatique nationale, doit être au service de la valorisation de ce qu’on aura fait. C’est bien dans cette optique là que je réponds aux sollicitations : faire connaître Poitiers dans la région et en France. Mais plus ça va aller, plus ça va être dans la valorisation de l’action, c’est vraiment ma boussole : agir.
Pendant ces 6 ans, on a un programme très riche, et mon objectif c’est de mettre en œuvre le plus de projets possibles issus de ce programme là. Ca passe par une déclinaison à l’échelle de Poitiers mais aussi à l’échelle de Grand Poitiers. Parmi les priorités on s’était engagé à ce que le patrimoine municipal soit à énergie positive, ça veut dire engager le plus de réhabilitations possibles de bâtiments publics avec une performance énergétique maximale. On a déjà lancé les diagnostics, parce que ça s’inscrit forcément dans le temps long. Mais, à la fin du mandat on aura rénover un nombre important de bâtiments publics. En décembre, on va aussi annoncer un plan de végétalisation de la ville parce que ça fait aussi partie des actions visibles attendues des Poitevins. A la fin du mandat, c’est sûr, la nature aura repris sa place en ville, par une présence quotidienne de la nature dans les rues…
Autre sujet la mobilité, où il y a d’énormes attentes en la matière. On s’est engagé à ce que à la fin du mandat chaque habitant du Grand Poitiers, parce que ça passe aussi par là, ait une alternative à la voiture. Et clairement nous serons attendus sur les résultats que nous aurons été capables de produire. Un schéma directeur des mobilités va être lancé au niveau de Grand Poitiers qui va justement permettre d’articuler toutes les pièces du puzzle pour aboutir à cet objectif d’alternative à la voiture individuelle. Ca passe notamment par une révision en profondeur du réseau de bus… Le vélo va aussi se développer rapidement et massivement, en termes d’aménagement de la ville. Un plan vélo était déjà engagé par la précédente équipe sur lequel on va mettre un coup « d’accélérateur », si je peux dire… Notamment dans le cadre du plan de relance, on va faire financer des pistes cyclables massivement.

@! : L’écologie est une marque fabrique chez vous, un engagement de longue date… Comment le transposez-vous plus précisément dans la mandature ?

L.M. : Quand on parle de mobilité, quand on parle de rénovation énergétique, c’est quand même déjà de l’écologie ! Parmi les marqueurs les plus attendus des citoyens envers les municipalités écologistes, il y a le fait de verdir la ville, et en décembre il y aura ce plan de végétalisation de la ville qui permettra de redonner une place à la nature en ville, en particulier au centre ville mais pas seulement. L’idée c’est vraiment de faire un avant / après sur la place de la nature en ville.
Nous avons aussi un axe fort qui me tient particulièrement à cœur en matière d’éducation nature. On est déjà en train d’impulser la dynamique avec les acteurs éducatifs de Poitiers. On parle aussi beaucoup de l’éducation dehors pour en faire vraiment une marque du projet éducatif du territoire pour Poitiers. Ca passe par le fait de former, en partenariat avec le Rectorat, les équipes éducatives à ces pratiques d’éducation, mais aussi d’avoir des lieux phares dédiés à cette question-là.
C’est notre ambition avec le bois de Saint-Pierre. C’est un lieu qui appartient à la municipalité, mais qui a été laissé en déshérence totale ces dernières années. Nous voulons en faire vraiment un lieu immersif dédié à l’éducation nature. Le comité de pilotage est déjà lancé. Dans la même idée, tous les projets de construction d’école devront intégrer structurellement la place de la nature, avec des cours végétalisées, un accès à la nature pour les enfants, et un projet pédagogique qui va avec…

@!: Sur l’éducation, en général, c’est un sujet important pour Poitiers. Une dimension qui lie aussi le numérique… Poitiers « capitale de l’éducation numérique, de l’éducation au numérique », vous vous inscrivez dans cette ligne là ?

L.M. : Poitiers, « capitale de l’éducation » tout court. Il y a beaucoup d’opérateurs de l’Education nationale qui sont basés à Poitiers, CNED, IH2EF, Canopée,… De fait, ça imprime une marque sur le territoire. Et effectivement, il y a un écosystème de l’éducation numérique qui est assez fort à Poitiers. Du point de vue de la formation et de la recherche d’abord. On va avoir prochainement le siège d’un Campus des Métiers et des qualifications dédié au numérique basé à Poitiers piloté par le LP2I, mais l’Université a aussi des laboratoires de recherche dédiés à ce sujet. En plus, il y a aussi un écosystème d’entreprises qui y est favorable. Je pense au réseau des professionnels du numérique de Nouvelle-Aquitaine basé à Poitiers, il y a des startups… Bref, des acteurs et un état d’esprit du territoire qui s’est développé.
D’ailleurs, Poitiers accueille deux grands événements prochainement. Les Etats-Généraux du numérique en novembre qui est un événement d’initiative ministérielle dont on va se servir pour mobiliser dans la ville des débats autour du numérique et de l’éducation, que ce soit éducation populaire, ateliers, débats dans les écoles… Poitiers accueille aussi le Forum des acteurs numériques et éducatifs qui se tiendra en juin prochain, décalé d’un an en raison de l’épidémie. C’est également un lieu de rencontre international des acteurs du numérique éducatif, mais, notre enjeu à nous politiques locaux, c’est que ce soit le plus ancré dans le territoire possible pour former les enseignants, faire du réseau, en faire bénéficier les acteurs économiques du territoire. Poitiers est vraiment le centre de ses enjeux là au niveau national et nous, politiques locaux, on souhaite s’en saisir pleinement.

 » Poitiers renvoie à la France l’image d’une ville qui fait confiance à la jeunesse « 
@!: Vous évoquiez l’Université… Justement Poitiers a été mise en valeur récemment par une radio nationale comme « ville jeune » et donc (?) dynamique…

L.M.: Démographiquement parlant c’est vrai, on est presque à un tiers de la population qui est étudiante, donc jeune. Mais ça fait aussi partie de l’identité de notre ville, et en particulier depuis le 28 juin dernier (date du second tour de l’élection municipale, ndlr) où Poitiers renvoie à la France l’image d’une ville qui fait confiance à la jeunesse, et donc à un certain dynamisme. J’associe tout à fait l’image de la jeunesse, du renouvellement au dynamisme des projets qui sont portés pour la ville.

@!: Avec un conseil municipal qui a un âge moyen assez jeune ?

L.M.:
En effet, pour ce qui est de la majorité en tout cas, c’est autour de 40 ans. Après on n’est pas non plus dans le jeunisme. Ce qui compte, c’est plutôt le fait de renouveler les générations politiques, avant tout du point de vue des idées. Et notre conseil municipal est certes marqué par le renouvellement, mais il est aussi très intergénérationnel. Il y a de la transmission avec des anciens élus plus âgés, des personnes retraitées. Ce qui compte c’est que les générations puissent se parler et qu’on n’ait pas une sur-représentation des générations les plus âgées dans la classe politique.

@!: A propos du conseil municipal, quelles sont les relations avec l’ancienne équipe en place, et notamment avec votre prédécesseur socialiste Alain Claeys. Ayant été élue dans le cadre d’une triangulaire, vous avez aussi un autre groupe d’opposition mené par Anthony Brottier (LREM) comment le gérez-vous dans la pratique de la politique municipale ?

L.M.: Pendant toute la campagne on a souhaité porter le message selon lequel on incarnait la relève, plutôt que la rupture. On reste dans cette optique. Il y a beaucoup de projets pour lesquels on a respecté à la fois les engagements et le calendrier qui étaient prévus par l’équipe précédente ; parce que quand ça va dans le bon sens, il faut savoir le reconnaître.
Mais par ailleurs, on a vraiment l’intention de travailler en coopération avec les groupes d’opposition. Là encore on casse les codes, ce n’est pas naturel d’avoir une approche coopérative plutôt qu’une posture politique dans un conseil municipal. C’est aussi un état d’esprit qui se travaille, et on est encore dans le début de mandat. C’est une relation de confiance qui se construit au fur et à mesure, d’où l’importance de laisser la place à chaque groupe pour leur laisser un espace tout en étant autant que possible dans un approche concertée. C’est ce qu’on a fait pour la Covid par exemple avec la mise en place d’une cellule de crise qui associait aussi les élus de l’opposition. Autre exemple, on a voté hier (ndlr lundi 12 octobre) la fusion du CHU avec le GHNV de Châtellerault : la délibération a été travaillée en concertation avec l’opposition.. Donc on est encore dans la structuration, mais l’intention de faire ensemble est là.

 » Il y a une solidarité à trouver entre les villes de Poitiers et Châtellerault »

Léonore Moncond'huy : première magistrat de Poitiers à 30 ans.

@! : Il y a en effet aussi un hôpital à Poitiers qui fait partie des plus grands employeurs de la ville…

L.M. : C’est le plus grand employeur de la Communauté urbaine et du Département

@! : Ca montre bien l’importance de l’infrastructure pour Poitiers qui a aussi sa renommée autour de ce CHU, mais aussi plus globalement de l’enjeu d’un rapprochement avec Châtellerault…

L.M. : La fusion entre le Groupe Hospitalier Nord Vienne, qui comprend les hôpitaux de Loudun et de Châtellerault, et le CHU de Poitiers est un projet qui était engagé depuis 2018, et hier le Conseil municipal a validé cette orientation, avec des points de vigilance. De même que la centralisation ne nous convient pas à l’échelle régionale, de même on ne souhaite pas reproduire ce schéma centralisateur à l’échelle du département avec la fusion autour du CHU de Poitiers. C’est important pour maintenir une offre de soin au public sur les territoires, mais c’est important aussi d’être attentif aux risques que peut entraîner une fusion et une centralisation.
Ensuite, c’est vrai que dans les messages politiques que nous avons portés au niveau de l’agglomération, notamment, le rapprochement entre Poitiers et Châtellerault nous semble essentiel. On parlait de la place de Poitiers dans la grande région. Pour moi, aujourd’hui on n’est plus dans le même espace territorial. Si on veut s’en sortir du point de vue emplois et dynamisme économique, il faut qu’on se rapproche avec Châtellerault qui est un pôle économique extrêmement proche de Poitiers, et d’autant plus si on prend le focus grande région.
Il y a des rapprochements à faire au niveau des entreprises ; par exemple Châtellerault souffre d’une crise industrielle majeure aujourd’hui parce qu’ils étaient très dépendants des emplois liés à l’aéronautique, nous avons une université qui forme beaucoup de jeunes. Nous avons un secteur économique industriel qui se porte plutôt bien à Poitiers; je pense qu’il y a une solidarité à trouver entre ses deux villes pour avoir un soutien à l’emploi. Ca passe par la Technopole qui pourrait être un outil de rapprochement… Il y a des enjeux économiques et la question de la mobilité qui va avec. Il y des flux de mobilité journaliers très importants qui ont été assez peu pensés en termes d’alternative à la voiture individuelle.

@! :  Il y a le train.. ?

L.M. : Le train est insuffisant, toutes les entreprises le déplorent, ce n’est pas un moyen de transport que les salariés utilisent parce que les horaires sont mal pensés. L’arrêt au Futuroscope n’est pas du tout pensé en fonction des horaires des travailleurs non plus. Avec la LGV, les dessertes se sont extrêmement appauvries. Je pense que les élus de l’époque n’ont pas été assez vigilants sur les engagements de la SNCF en matière de dessertes à Châtellerault et à Poitiers. L’axe Poitiers-Futuroscope-Châtelleraut, c’est stratégiquement majeur en termes de politique économique et de politique de mobilité.

@! : Il y a beaucoup de co-voiturage sur l’A10 aussi
L.M. : Oui c’est vrai. Les gens sont obligés d’emprunter l’autoroute pour aller au travail, ce n’est pas normal selon moi.

« Nous sommes prêts à travailler en partenariat avec l’Europe mais aussi avec la Région, et l’Etat »
@! : La boucle est bouclée, évoquer ces questions de mobilité c’est revenir à la question des transitions écologiques que vous avez déjà abordée plus haut. A ce propos, vous êtes signataire d’une tribune, parue dans le JDD, le lundi 12 octobre sur le rôle de l’Europe dans l’accompagnement des collectivités dans la transition environnementale. Etre maire, c’est aussi discuter avec l’Europe ?

L.M. : Il me tient vraiment à cœur qu’on puisse saisir les opportunités qu’offre le Plan de relance, c’est à dire qu’on puisse dégager rapidement des projets pour les financements desquels on pourrait s’entourer de partenariats, et l’Europe fait partie des partenaires les plus importants que nous souhaitons mobiliser sur ces projets de transition écologique pour le territoire. Il y avait un double message dans cette tribune ; d’une part le fait de dire que les financements de relance européens doivent massivement intégrer l’écologie et qu’on ne doit pas faire une relance de l’économie « comme avant » mais, au contraire, se saisir de ce moment pour réorienter l’économie vers des secteurs responsables d’un point de vue écologique. Ca, c’est l’orientation politique à donner à ce plan de relance, mais il y a aussi le fait de dire, que nous, territoires, nous sommes prêts à nous saisir de ces financements là. C’est en particulier mon rôle à Grand Poitiers en tant que Vice-présidente en charge de la contractualisation et des partenariats. Il faut aller voir tous ces interlocuteurs pour les convaincre de nous aider à financer nos projets . Il faut envoyer le message que les territoires et Grand Poitiers en particulier sont prêts à travailler en partenariat avec l’Europe mais aussi avec la Région, et l’Etat pour que rapidement on puisse transformer le territoire par des projets d’ampleur.

@!: Enfin, puisqu’on évoque Grand Poitiers, ne pas avoir candidaté à la présidence de la communauté urbaine, c’est une certaine ouverture aussi aux communes limitrophes de Poitiers ?

L.M. : Oui tout à fait, c’était un engagement de campagne qu’on a respecté. C’est la volonté d’avoir une gouvernance différente dans laquelle la ville centre ne décide pas de tout pour les 40 communes, et donc ça passe par des actes forts comme le fait d’avoir une présidence de Grand Poitiers qui soit exercée par une autre commune, en bonne intelligence. Et ça se passe très bien. Ce choix n’est pas forcément gravé dans le marbre, mais démonter qu’une autre gouvernance est possible, ça fait clairement partie des piliers de notre approche politique.

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