Ligne Oloron-Bedous : une porte entrouverte sur l’Espagne


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Ligne Oloron-Bedous : une porte entrouverte sur l'Espagne

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 26/06/2016 PAR Jean-Jacques Nicomette

Quel feuilleton, tout de même ! Réalisée par une majorité d’ouvriers espagnols et ouverte en 1928 à travers la chaîne des Pyrénées, la ligne reliant le Béarn à ses voisins aragonais a transporté voyageurs et fret jusqu’à ce qu’un déraillement de train et l’affaissement d’un pont la condamnent en 1970.

Déclarée non rentable, elle sombre dans le silence, mais pas dans l’oubli. En 1999, un an après l’élection du socialiste Alain Rousset à la présidence du Conseil régional, une étude de remise en état de cette liaison ferroviaire est décidée par les représentants de l’Aquitaine. Un long combat commence alors dans cette partie des Pyrénées-Atlantiques où un bras de fer s’engage entre la route – qui va bénéficier du percement du très moderne tunnel du Somport – et le rail.

Soutenu dans un premier temps par Lionel Jospin, « qui ordonne à Bercy que le conseil d’administration de Réseau ferré de France accepte que les travaux se fassent », Alain Rousset  ne lâche rien. Sans cesser de tempêter contre « ce côté insupportable » d’une machine administrative décidant de « choix qui ne sont pas ceux de la Région ».

Finalement, un chantier impressionnant s’engage en 2014 sur une partie du trajet : 25 kilomètres de voie à rénover entre Oloron et Bedous, mais aussi 17 passages à niveau à rétablir et 31 ponts à conforter ou reconstruire. La facture, lourde de 102 millions d’euros, est entièrement payée par la Région.

« Une chance à saisir »« Regardez le bonheur des gens » confiait Alain Rousset, dimanche, en descendant du train.
Jusqu’au 25 septembre, 8 allers-retours quotidiens vont être assurés par un TER entre les deux communes béarnaises. Des parcours en bus sont également organisés jusqu’à Canfranc, dont l’imposante  gare devrait  être réaménagée à terme au sein d’un ensemble hôtelier, de services et de résidences.

A la descente du train, Alain Rousset, le président du Conseil régional, n'a pas caché son plaisir

Ce retour du train en vallée d’Aspe, même partiel, sera fêté officiellement le vendredi 1er juillet. Côté béarnais, il offre une belle opportunité touristique à  une vallée de montagne dont la beauté n’est plus à dire. Mais la chance à saisir est beaucoup plus vaste, estiment les partisans de la prolongation de la ligne vers Canfranc, tant Français qu’Espagnols.

« On est ici sur un itinéraire européen susceptible de générer un trafic de fret  de longue distance » rappelle Michel Rodes, qui porte les couleurs de la SEPANSO et du CRELOC, le comité militant pour la réouverture complète de l’axe ferroviaire .  » Quand on est reçu à Saragosse, c’est par la Maison des entrepreneurs, avec des industriels comme Opel qui fabrique la Meriva, Arcelor-Mittal pour le métal, ou la papèterie Saica qui est la plus importante d’Espagne. »

«  Pour le moment, la  marchandise qu’ils utilisent passe par Irun au Pays-Basque ou Port-Bou en Catalogne, avec des changements d’essieux pour les trains, ou encore par le port de Bilbao. Les chefs d’entreprise vous expliquent qu’ils reçoivent chaque jour des bobines en acier venant de Dunkerque et des pièces détachées arrivant de la Ruhr.  Sans oublier les 3oo ooo tonnes annuelles de maïs qui sont envoyées vers l’Espagne ».

Mêmes échos chez Jean Frilleux, un géographe de formation, membre de l’association de Défense des usagers des transports (DUT) qui vient de lancer une pétition pour la poursuite des travaux.

Selon lui, une manne de voyageurs est également à saisir avec les énormes bassins de population de Saragosse et de Madrid. « En 4h30, on pourrait aller du Béarn vers la capitale espagnole. Autant que pour se rendre à Paris. Et de ce côté-ci des Pyrénées, il y a aussi Lourdes qui n’est pas loin, ainsi que tout un bassin de vie. Cette ligne ferroviaire, ce serait la porte ouverte sur le Sud. Il y a là outil de développement dont il faut se servir ».

 » Des solutions techniques déjà connues « Les contraintes techniques, elles, sont évoquées sans complexes. Pente à gravir, wagons à accrocher, configuration des tunnels à traverser sur les 33 kilomètres restant à aménager etc. « Tout peut être résolu. Il faut appliquer les solutions que l’on connait déjà » affirme Patrick Marconi, un ingénieur adhérant au CRELOC. Ce qui amène par exemple son association à rappeler que le tunnel hélicoïdal de Latour de Carol, dans les Pyrénées-Orientales, monte jusqu’à plus de 1500 mètres alors qu’en vallée d’Aspe, le point de passage le plus haut pour le train se trouve à 1212 m.

Beaucoup de monde sur le quai, tant Français qu'Espagnols

«  En fait, un seul tunnel ne va pas ici : celui du Peillou, qui se trouve sur un cône d’éboulis et dont la voute se déforme. Soit il faut le refaire, soit on le dégage à ciel ouvert ».

Quant à l’écartement des rails, différent en Espagne et en France, « il est aux normes européennes jusqu’à Huesca et les Espagnols sont prêts à poursuivre jusqu’à Canfranc».

Un appel aux partenaires potentielsReste à trouver l’argent. Aujourd’hui, la poursuite du chantier jusqu’en Aragon est estimée à 400 millions d’euros. Sans parler d’une électrification éventuelle de la ligne que le CRELOC évalue à 1 million d’euros le kilomètre. Ce qui, explique-t-on, permettrait aux trains de monter plus rapidement.

« Il faut trouver un autre montage » indique Alain Rousset, qui n’entend pas en rester là. « L’appui du gouvernement, et surtout de l’Europe, est essentiel. On va faire appel à tous les partenaires, dont Renfe et la SNCF, pour nous aider à porter le projet. Toutes les entreprises ferroviaires pourront participer. Nous avons déjà reçu des propositions ».

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