Le grand virage de La Poste


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Le grand virage de La Poste

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 07/12/2006 PAR Joël AUBERT

Des comités de défense de la Poste qui fleurissent un peu partout en France, des élus ruraux qui s’inquiètent, des files d’attente qui s’allongent aux guichets, des horaires d’ouverture qui se réduisent, des protestations contre des hausses de tarifs, des salariés qui manifestent leurs craintes sur l’avenir du « service public ». Autant de signes qui, pour le moins, contrastent avec les sondages commandés par la Poste elle-même.

Ceux-ci indiquent tout le contraire avec des scores de satisfaction de l’ordre de 80 à 90% à l’égard des nouvelles solutions proposées (partenariats avec les communes, relais postes).
Où est la vérité ?

Chacun jugera en fonction de son propre vécu. Une chose est certaine: la Poste a amorcé le plus grand chambardement de son histoire, lequel lui est dicté par les impératifs de modernisation technique, par la contrainte d’équilibre financier vouluepar l’Etat, ainsi que parles directives européennes qui, elles-mêmes, découlent de la libéralisation économique et de la sacro-sainte mise en concurrence. Sur ce point, il faut noter que la Poste a déjà perdu le monopole du traitement du courrier de plus de 50 grammes, et que des discussions sont en cours à propos de l’incidence del’ouverture au courrier de 20 grammes en 2009.


 

Le pari de 2010

La distribution du courrier dans les campagnesEn régime de plein laisser-faire,il est probableque ,seules, les agglomérations les plus concentrées bénéficieraient de la livraison du courrier aux meilleures conditions alors que la notion de « service public » chère aux syndicats, et les textes nationaux et européens imposent la distribution de la moindre lettre dans le village le plus reculé de la Lozère. On remarquera tout de même que la notion de service public est bannie de la dialectique communautaire, et même gouvernementale, au profit de« service universel ». La loi française de régulation postale de mai 2005 garantit cependant aux usagers un point poste à moins de 5 km, et à moins de 20 minutes en voiture. Curieuse notion tout de même : en roulant pendant 20 minutes dans la campagne on fait beaucoup plus de 5km !….A moins que l’on se trouve sur un chemin de chèvre !

La Poste est engagée dans une véritable révolution pour chacun de ses quatre métiers avec, comme objectif annoncé, le renforcement desa présence de proximité et l’ambition de devenir l’opérateur européen de référence en 2010 .Elle a pour cela beaucoup de chemin à parcourir puisque, pour l’instant, ce sont les postes allemande et hollandaise qui sont les plus performantes. La Poste française a ainsi prévu d’investir 3,4 milliards d’euros, soit l’équivalent de 12 viaducs de Millaudans son programme « Cap Qualité Courrier » qui prévoit la construction de « plates formes industrielles courrier » équipées de machines à lecture optique et de toute la logistique adaptée complémentaire, l’objectif étant d’acheminer 90% du courrier à J+1.La construction d’une plate forme industrielle du courrier à Cestas (Gironde)et de plusieurs plates-formes de préparationpour la zone Aquitaine-Nord (Gironde, Lot-et-Garonne, Dordogne)doit entraîner un investissement de 95 millions d’euros.

 

Sans licenciement

Le service et le sourire de la poste en milieu rural.

Le service et le sourire
de la poste en milieu rural

 

Le chapitre Cap Qualité Courrier est doté d’un volet social de 800 millions d’euros au plan national « mais, souligne-t-onà la direction de la Poste, à Bordeaux, ce plan ne prévoit aucun licenciement ».Cette affectation doit servir à gérer les départs à la retraite etl’accompagnement à la mobilité des salariés, la formation et les équipements. Le programme « Cap Relations Clients » qui se rapporte au réseau de bureaux de poste,est doté d’un fonds de 770 millions d’euros, et d’un volet social de 150 millions. Il concerne l’immobilier et la modernisation des bureaux. La Poste dispose de quelques 17025 points de contacts avec le public, dont par exmple 390 en Gironde. A signaler également le programme « facteur d’avenir » qui, avec un budget de 700 millions d’euros, doit moderniser, voire élargir le métier de facteur, un métier que la Poste entend conserver et mettre en valeur.
D’autre part, depuis le début de l’année, les activités financières de la Poste sont du ressort de la filiale « La Banque Postale » qui, elle-aussi joue la proximité, et a l’ambition « d’être une banque comme les autres, mais pas comme les autres ». Entendez par là qu’elle entre dans le système concurrentiel,« avec les valeurs postales », notamment « l’accès à la banque pour tous ».
La Poste entend par ailleurs se positionner comme l’acteur principal en matière de colis, en particulier dans le domaine du commerce par Internet.

Le redéploiement du groupe de la Poste se traduitdonc par une réorganisation qui ne fait que commencer, mais qui a déjà des conséquences sur le terrain avec la fermeture de dizaines de bureaux, ce qui ne manque pas d’entraîner des réactions. « La Poste, expliquent ses responsables, doit repenser son organisation. Son réseau n’avait pas évolué depuis 50 ans » ! A la direction de la Poste on souligne cependant « qu’il n’y a pas fermeture de bureaux, mais transformation, et que le nombre de « points de contacts »demeure le même ».

 

816 euros : l’indemnité communale

La Poste ne prend pas toutefois de décisions unilatérales, mais seulement après concertation avec les élus, en particulier dans le cadre de la commission départementale de la présence postale territoriale. Elle s’efforce de maintenir une présence dans le cadre de relais poste installés chez un commerçant, ou à travers une agence postale communale mise en place en partenariat avec la municipalité. La Poste attribuealors une « indemnité » à la commune de 816 euros par mois. Dans le cas de relais poste installé dans un commerce, il est prévu une indemnité de base et un intéressement aux activités. « Ces formules de partenariat, assure-t-on à la direction de l’établissement, permettent de maintenir 95% des services d’unbureau de poste,y compris la possibilité de retraitsde dépannage en espèces ». Le relais poste est présenté « comme une solution adaptée au milieu rural ou péri-urbain,présentant à la fois un intérêt pour le commerçant et pour l’usager, avec unavantage important, celui d’un élargissement des horaires d’accessibilité ». Ilexiste déjà un millier de relais poste et 3000 agences postales communales en France.

Reste cependant une zone d’ombre : le financement du « service universel postal » dans le cadre de l’ouverture à la concurrence. La Poste, dont le statut est un EPIC (Etablissement Public à Caractère Industriel et Commercial ) qui s’autofinance se bat pour que les nouveaux et futurs opérateursassument leur part de la charge. Leprésident du groupe La Poste, Jean-Paul Bailly, déclarait dernièrement au journal « Le Monde » qu’il n’était pas question de financer le service universel par plus de productivité….

Gilbert Garrouty

Crédit photos – La Poste


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