Le combat des anciens soldats d’Outre Mer : le temps presse pour sauver l’honneur


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Le combat des anciens soldats d'Outre Mer : le temps presse pour sauver l'honneur

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 13/12/2008 PAR Joël AUBERT

L’un de leurs accompagnateurs s’est improvisé traducteur : « Ils sont obligés de faire des allers-retours, entre le pays d’origine et la France, pour venir chercher leurs indemnités. C’est déjà usant, vu leurs états de santé, mais en plus il faut respecter des délais de voyage précis. Et quand l’un d’entre eux tombe malade ou se met en retard de quelques jours, il faut payer une sorte d’amende à la Caisse des dépôts et consignations ». Parce qu’ils sont tous d’un âge avancé, ces anciens combattants. C’est pour ça que le « combat » presse.

Un déni moral
Les conférenciers ont multiplié les démonstrations : historiques, juridiques, politiques. Chaque personnalité présente a donné dans la persuasion. Le général Pierre Lang a récapitulé à l’assemblée l’évolution de la décristallisation des pensions militaires. « Le système de la cristallisation est discriminatoire. Il consiste à geler le niveau financier, à un moment donné, d’un type de pension. La retraite du combattant étranger, sa pension militaire d’invalidité et sa pension civile de retraite ont subi cette opération. » Le micro se coupe. Vaille que vaille : le militaire n’est pas général pour rien. Il donne de la voix et se fait entendre : « En 2003, un ancien combattant français touchait 420 euros de retraite. Un Algérien, 56 euros. Pire : un Vietnamien, 15 euros. Et pourtant, cette pension est déjà considérée comme une cerise sur le gâteau pour un Français. Alors que dire des étrangers. Ce n’est pas comme les rythmes musicaux où une note blanche vaut deux noires. Ici, c’est une blanche qui vaut quatre noires ». Le rire est jaune, l’humour acéré.
Il parle de « déni moral », dans l’auditoire des têtes acquiescent. Même si le Conseil National pour les anciens combattants d’Outre-mer a travaillé sur le dossier. Et même si le film « Indigènes » a contribué à la médiatisation de cette problématique. La situation des anciens combattants étrangers n’est toujours pas égale à celle des anciens soldats français. Bien sûr, il y a eu la décision de l’ancien président Jacques Chirac de lancer un processus de décristallisation. Mais elle ne concernait que la retraite de l’ancien combattant ramené aujourd’hui à 520 euros pour tous. « Reste encore à décristalliser les pensions militaires de retraite » ajoute le général.

Une question d’honneur
Le combat des anciens soldats d'Outre Mer au Mégarama« Une façon de régler les problèmes de banlieues aussi », lance t’on dans la salle. Exact. « L’honneur rendu aux grands-parents va jouer sur l’idée qu’ont les jeunes de la France », renchérit Pierre Lang. Encore faut-il y apporter une solution d’ordre juridique. L’avocate Christelle Jouteau a défendu une revalorisation à la hausse de la pension des tirailleurs marocains, devant le tribunal administratif de Bordeaux.
Elle est là pour témoigner des anciens combattants errants face à la discrimination dont ils se sentent victimes. Déposer leurs dossiers aura aussi été un combat. Les six avocats ont essuyé des refus de l’administration de la Rochelle et du Ministère de la défense. Finalement, les 59 cas obtiennent des accords de principe favorables. « Mais là, on ne parle que des tirailleurs marocains, pas des autres combattants étrangers », précise Naïma Charaï. La conseillère régionale déléguée à la politique de la ville et à la lutte contre les discriminations a fait figure de modératrice. En attendant l’arrivée du député Alain Rousset.

Proposition de loi
Visiblement touché par le sujet, Alain Rousset aura joué de la larme à l’œil pour son discours. « La dignité d’un homme ne se mesure pas au sang reçu, mais au sang versé. Je ne comprends pas que le gouvernement ne se saisisse pas de ce geste politique », dira-t-il. Si ce n’est pas l’UMP qui s’en saisit, c’est le député aquitain qui le fera. Quatre articles. C’est ce qu’il propose à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. « Le 29 octobre, j’y ai inscrit la décristallisation complète des pensions, l’amélioration des conditions de vie et d’accueil en France, mais aussi la suppression de la durée d’obligation de résidence en France pour avoir le droit au minimum vieillesse ». L’auditoire est enthousiaste. Le député vient de marquer un point. « Et si cette proposition de loi ne passe pas, j’en proposerai une autre. Et pourquoi pas la nationalité française pour tous les anciens combattants. On est tous d’accord avec cette idée, n’est ce pas ? A moins de lancer un référendum populaire. »
Populaire. C’est aussi dans cet état d’esprit que s’est conclue la conférence. Au moment du cocktail dinatoire, un concert de sept musiciens s’est improvisé. Parmi eux, quatre anciens. Des « papis » heureux de donner d’eux-mêmes. A pleines mains sur les instruments de percussions. Pendant qu’Abdrahime Rchouk, un « artiste libre », récitait un slam composé pour le Printemps des poètes. Il avait pour thème la mémoire.

Virginie Wojtkowski

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