L’ancienne ligne Bedous-Canfranc étudiée à la loupe par SNCF Réseau


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L'ancienne ligne Bedous-Canfranc étudiée à la loupe par SNCF Réseau

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 23/11/2018 PAR Solène MÉRIC

Depuis la RN 134 qui relie Bedous à la frontière espagnole, on aperçoit désormais facilement l’ancienne ligne ferroviaire que près de 50 ans d’abandon, suite à l’effondrement du Pont de l’Estanguet causé par le déraillement d’un train en 1970, n’ont pas épargné. Ce n’était pas le cas il y a un an à peine. De janvier à mi-mars 2018 puis de mi-août au début de ce mois de novembre, débroussaillage, abattage, élagage, évacuation de blocs rocheux, curage de fossés, nettoyage des ouvrages d’art ou encore de dégagement des têtes de tunnels ont été réalisés par la SNCF et l’ONF. « Ce chantier a été réalisé en deux phases pour respecter les périodes de reproduction et de nidation de la faune sauvage », indique David Keller responsable des opérations pour SNCF Réseau. Des enjeux environnementaux également pris en compte par la mise en place de mesures particulières sur les zones abritant des espèces protégées (faune et flore), le tout régulièrement surveillé et contrôlé par un écologue.

« On constate plutôt un bon état de conservation du patrimoine »
Au fur et à mesure de ce grand nettoyage, ce sont les chantiers d’investigations qui ont pu se mettre en place. Ceux-ci ont mobilisé une quinzaine d’entreprises, et leur sous-traitant, sur le site concerné (de Bedous à l’entrée du tunnel du Somport) « soit une trentaine de personnes présentes chaque jour, atteignant au plus fort de l’activité jusqu’à 80 personnes régies par un programme hebdomadaire de travaux donnant lieu à des réunions quasi quotidiennes en période de pointe », détaille David Keller. « Une nécessité pour la bonne organisation et la sécurité des chantiers d’investigation », le tout non sans encombre en termes notamment de contraintes d’accès dans cette zone montagneuse, et de la circulation sur la RN 134 adjacente.
Ces travaux d’investigation ont notamment permis de réaliser des sondages géotechniques, ainsi que des levées topographiques classiques (réalisées au printemps dernier) ainsi que par survols hélicoptères qui démarraient ce 22 novembre. « L’objectif de cette étape d’investigation est d’acquérir les connaissances techniques et topographiques nécessaires pour pouvoir lancer les études de conceptions qui détermineront les choix à faire pour que cette ligne puisse à nouveau faire passer des convois. En d’autres termes, ces différentes études de terrain vont nous permettre de décider des aménagements à faire pour pouvoir reprendre l’exploitation ferroviaire de cette voie », synthétise Alain Autruffe, Directeur territorial SNCF Réseau pour la Nouvelle-Aquitaine.
Si bien sûr le temps n’est pas encore à l’analyse fine (les investigations se terminant dans une poignées de jours), le premier diagnostic tiré par David Keller est plutôt optimiste. « On constate plutôt un bon état de conservation du patrimoine, tant sur les tunnels (le tronçon concerné en compte 16, dont un tunnel hélicoïdal « bijou de réalisation pour l’époque », selon les ingénieurs SNCF, ndlr) que sur les rambardes. » Les gros ouvrages métalliques, qui bien sûr, ont aussi été inspectés, sont également « en bon état et seront conservés », ajoute Fabien Garcia, chef de projet SNCF sur l’opération.

Structures metalliques sont en bon état sur l'ancienne voie ferrée reliant Bedous à Canfranc

Quelques mauvaises surprises
La rénovation à venir n’échappera pour autant pas au changement des voies et ballast dont le visiteur lambda peut non seulement facilement constater la dégradation, mais qui de toute manière ne correspondent plus aux standards actuels. Pour autant quelques mauvaises surprises ont tout de même été découvertes à l’occasion de ces investigations. Les forages ont par exemple révélé la présence de roches très fragmentées à proximité (moins de 4 mètres) du tunnel du Portalet. Un « détail » démontrant que clui-ci a été construit dans des éboulis, les ingénieurs du début du siècles ayant vraisemblablement procédé par des techniques à l’explosif. « Les forages que nous réalisons nous permettent de caractériser l’intégralité du massif, et ainsi de localiser les failles qui pourraient créer des fissures sur les ouvrages », explique Fabien Garcia.
Autre point qui demandera réflexion : le tunnel du Peilhou, à proximité immédiate du tunnel international du Somport, est « dans un état de délabrement avancé », faisant ainsi exception aux expertises réalisées sur les autres ouvrages. « La question sera donc de savoir si on répare ce tunnel, si on en creuse un autre, ou si on construit un viaduc.. », explique le chef de projet. Autant d’hypothèses que les différents sondages réalisés dans le massif autour du tunnel et jusqu’à 90 mètres de profondeur, ainsi que les relevés topographiques, permettront de trancher… sans oublier le critère du prix qui pourrait arbitrer par une liaison en extérieur, à priori moins coûteuse selon le professionnel.

Un atelier de sondage à proximité du tunnel du Peilhou

Caractère international ou intérêt local ?
Une question des financements qui restent encore d’ailleurs un des points d’interrogation de ce projet de réouverture de la ligne. Si le programme d’études de 14,7 M€, qui intègre notamment les investigations techniques qui se terminent actuellement et l’étude d’avant-projet pour la conception du tronçon, est co-financé par l’Union européenne à 50% en raison du caractère international de la ligne, au côté de la Région Nouvelle-Aquitaine, du Gouvernement d’Aragon, et des Etats français et espagnols, le financement des éventuels futurs travaux n’est en effet, quant à lui, pas encore assuré. La remise en service du tronçon est pour l’heure estimée à 450 M€ ; or la seule volonté politique, certes forte, des collectivités territoriales de part et d’autre de la frontière ne pourra suffire à la financer.
Si l’Europe pourrait bien poursuivre son accompagnement du fait de son classement de la ligne au sein du Réseau Transeuropéen de Transport, rien n’est moins sûr en ce qui concerne l’Etat français. Et pour cause en février dernier le conseil d’orientation des infrastructures a considéré ce projet d’un seul « intérêt local dont le caractère prioritaire pour l’Etat n’apparaît pas clairement ». Un classement qui ne rend « pas utile de mobiliser des financements nationaux pour ce projet ». Un projet qui agite d’ailleurs souvent violemment les passions au sein même de l’hémicycle régional avec une opposition fortement mobilisée contre ce qu’elle nomme le « tchou tchou des Pyrénées ». Toujours est-il que ce 22 novembre, dans la fraîcheur de la haute vallée d’Aspe, élus régionaux socialistes et écologistes présents lors de la visite de chantier étaient quant à eux plus que satisfaits de « voir enfin avancer les choses après des années de combat en ce sens ».

Une partie de la délégation des élus régionaux venus assiter à la visite de chantier de la ligne Bedous Canfranc
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