L’IRSA se pose à Mérignac


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L'IRSA se pose à Mérignac

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 02/07/2017 PAR Romain Béteille

Elle était attendue depuis dix ans par les personnes handicapées (auditif et visuel) de la région Nouvelle Aquitaine, et c’est à Mérignac qu’elle a enfin vu le jour vendredi dernier. La Résidence Luis Daney, dépendante de l’Institution Régionale des Sourds et Aveugles (l’association IRSA, à ne pas confondre avec l’Institut National des Jeunes Sourds, qui est un organisme public), accueille déjà depuis le mois d’avril dernier 76 patients adultes. Il s’agit du seul foyer de ce type dans toute la région, on a donc voulu comprendre comment ça marchait. D’abord, on remarque que l’emplacement du lieu est adéquat avec ses ambitions : à proximité des axes de transports et véritablement implanté dans la ville, la Résidence de 5343 mètres carrés est composée de trois différents services. Le foyer occupationnel d’une soixantaine de place en constitue de pôle principal : il s’adresse à des personnes dont le handicap « ne permet pas d’exercer une activité professionnelle » mais qui restent autonomes. Le foyer d’accueil médicalisé de seize places, lui, est réservé à des cas plus lourds ayant besoin d’une assistance personnelle, auquel il faut ajouter le Service d’Accompagnement à la Vie Sociale (110 places dont l’ouverture est prévue prochainement). 

Une économie à résidence

Ce projet de longue haleine (les premières études ont en fait commencé en 2005, soit il y a douze ans) sont avant tout le fruit d’un contexte particulier, selon le directeur général de l’IRSA, Eddie Balagi. « C’est un peu le lieu commun des projets dans le champ médico-social depuis une dizaine d’années, au regard de la difficulté à mobiliser des financements publics ». En effet, l’élaboration du centre a été réalisée en concertation avec le département de la Gironde et l’ARS Aquitaine, et l’investissement immobilier financé par un recours à l’emprunt. En tout, on parle de 10,3 millions d’euros pour la construction et 3,6 millions d’euros pour le budget de fonctionnement annuel financés intégralement par le département, de 430 000 euros portés par l’ARS pour le foyer d’accueil médicalisé et de deux autres demandes de subvention représentant 300 000 euros supplémentaires. En tout, on parle d’un budget de 12 millions d’euros , auquel l’IRSA a apporté 1,750 millions d’euros pour l’achat du terrain.

Une balance difficile à vendre aux collectivités publiques, de l’aveu même du directeur général, mais que les 15 établissements et 400 salariés en 140 ans d’existence de l’IRSA peuvent légitimer. « Aujourd’hui, notre association gère une quinzaine d’établissements et de services sur la région, de Mont-de-Marsan à Mérignac en passant par Bordeaux, Ambarès ou Saintes. Tous n’ont pas la même importance en termes d’effectifs. Ici, on est sur un établissement moyen. Sa spécificité, c’est avant tout celle du public accueilli. Ce sont des personnes majeures, handicapées auditives ou qui ont besoin d’un accompagnement en institution en raison de difficultés associées à leur handicap. Elles ont besoin d’un accompagnement quotidien permanent, à la fois pour les gestes essentiels de la vie mais aussi pour stimuler leurs capacités à développer des savoirs. On se fixe toujours comme objectif qu’un certain nombre d’entre eux qui auraient un potentiel plus important puissent demain en sortir pour aller dans d’autres types d’habitats et ne pas rester toute leur vie en institution », commente Eddie Balagi.

Une adaptation spécifique

Voilà donc le dernier objectif, et sans doute le plus intéressant dans ce type d’institution : l’ouverture à la ville et à ses habitants. D’abord concernant le personnel de l’établissement (une cinquantaine de salariés aujourd’hui) : Ces derniers « ont passé un accord avec Pôle Emploi et avec notre organisme de formation professionnelle qui a pu  financer leur salaire deux mois et demie avant l’ouverture. Quand les résidents sont arrivés, les employés étaient déjà tous formés à la langue des signes. Ca existe dans la loi, mais c’est quelque chose d’assez peu actionné d’habitude ». Dans sa volonté de ne pas enfermer ses résidents, ensuite : « La subsidiarité permet de ne faire en interne que ce que nous ne trouvons pas à l’extérieur. Les activités, le cinéma, le sport, la culture : chaque fois qu’il existera une association dans laquelle nous pourrons inscrire nos résidents, ils seront à l’extérieur. Dans l’autre sens, nous invitons les voisins, les associations de personnes âgées, culturelles et sportives à utiliser nos locaux pour faire leurs propres manifestations. Par exemple, nous avons prévu un grand potager. Notre idée, c’est que demain, par exemple, des personnes passionnées de jardin viennent travailler ici avec nos résidents pour en construire un ». C’était déjà un peu le cas avant l’inauguration dans une période d’une semaine durant laquelle une compagnie d’artistes locaux sont venus animer des ateliers et donner un spectacle.

Des besoins renouvelés

Enfin, la méthode d’admission des patients fait qu’ils ne ne sont pas gérés par l’association directrice du lieu. « Les patients sont orientés par la Maison Départementale des Personnes Handicapées, considérant leur incapacité à vivre de façon autonome. Une commission d’admission examine les candidatures et retient celles qui sont le plus en phase avec le projet. En même temps, nous sommes conscients qu’on laisse un certain nombre de personnes au bord de la route. Aujourd’hui, cet établissement dispose de 76 places mais il faudrait commencer dès maintenant un autre projet pour avoir un nouveau lieu de même nature ». En effet, le temps de réalisation de ce type de projet ne peut pas vraiment correspondre au renouvellement des demandes ou à la réalité des publics ciblés. Une étude réalisée par l’IRSA en 2009 pointait déjà un besoin de 374 places supplémentaires, dont 304 rien qu’en foyer occupationnel. Cette étude a aussi montré que de nombreux patients ne bénéficiaient pas des soins adaptés à leur situation : des jeunes de plus de 20 ans maintenus dans des établissements pour enfants et adolescents faute de place en foyer, des adultes accompagnés en foyers non-spécialisés ou même des personnes isolées qui ont dû rester au domicile de leur famille. La Résidence Luis Daney apporte donc un peu d’oxygène à ce public, mais ce dernier n’est jamais suffisant : il est encore, en 2017, l’un des 12 établissements de ce type en France, dont les plus proches sont à Poitiers et Marseille. 

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