Foot, danse et éloquence libèrent au centre pénitencier


Porter une autre image de la détention. Tel est l’objectif que le Barreau de Bordeaux s’est fixé. Cours de danse avec la première danseuse de l’Opéra de Bordeaux, concours d’éloquence, et match de foot ont été organisés.

une main s'accroche à des barreauxImage par oscar h de Pixabay

Le Centre pénitentiaire de Gradignan a organisé pour la première fois un programme multi-activités pour les détenus.

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Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 02/06/2023 PAR Clémence Deguy

Près de Bordeaux, dans le centre pénitentiaire de Gradignan, surpopulation et dégradations font partie du quotidien des détenus. Face à ces sujets, la Bâtonnière de Bordeaux, Christine Maze, a souhaité « porter un autre regard sur la détention et mettre en œuvre un programme d’actions multi-activités à destination des détenus hommes et femmes ». Un programme en collaboration avec l’Opéra de Bordeaux et la conférence du Barreau de Bordeaux. « C’est un projet qui a été présenté par la détention avec un appel à candidature, les détenus se sont inscrits et sont venus se proposer à cet exercice ». Une vingtaine de détenus se sont prêtés au jeu.

Il y a eu une osmose qui s’est créée. Ce sont des moments intenses, elles se libèrent de cette pression, de cette angoisse de jugement

Vanessa Feuillatte, première danseuse de l’Opéra de Bordeaux a imaginé avec 6 détenues une chorégraphie de danse « néo classique » sur le « remaster des 4 saisons de Vivaldi, l’été » de Max Richter. « Mon but est qu’elles se réapproprient leur corps, qu’elles apprennent à se mouvoir dans l’espace, à danser en rythme et à chorégraphier, à créer quelque chose », explique la jeune femme. À chaque début de cours, Vanessa Feuillatte fait écouter une musique émouvante pour « s’évader », puis les détenues se mettent en binôme pour créer des mouvements. 

« On a un lien fusionnel. On a beaucoup parlé et elles savent que leur passé m’importe peu, c’est que le moment présent », poursuit Vanessa Feuillatte. La confiance entre les détenues et la première danseuse de l’Opéra de Bordeaux s’est installée rapidement. « Il y a eu une osmose qui s’est créée. Ce sont des moments intenses, elles se libèrent de cette pression, de cette angoisse de jugement. »

Le spectacle final se déroulera le 19 juin à la maison d’arrêt de Gradignan. « Au départ elles sont au sol, comme des femmes meurtries, comme des poupées disloquées et ensuite j’ai intégré leur chorégraphie, je voulais que ce soit la leur », détaille Vanessa Feuillatte.

Un film intitulé Danser pour se (re)trouver sera produit par le Barreau de Bordeaux pour montrer l’évolution du travail et l’investissement du groupe. « Elles ont choisi un mot qui leur appartient, un mot puissant, qu’elles feront en langue du signe pendant la chorégraphie », précise la première danseuse de l’Opéra de Bordeaux. Ce film sera diffusé « après la rentrée solennelle du Barreau de Bordeaux, le 15 septembre », assure Christine Maze. 

Foot et concours d’éloquence 

La danse n’est pas l’unique atelier proposé. « L’équipe de foot des avocats du Barreau de Bordeaux est allée jouer avec les détenus », explique Christine Maze. Un détenu a eu l’opportunité de devenir arbitre pour les 90 minutes de jeu. « Il a suivi un programme lié au respect des règles. » Par le sport, la confiance et l’esprit d’équipe ont été mis à l’honneur. « Ce sont des moments de grande chaleur, de fédération entre les différents acteurs », témoigne-t-elle. Un match de rugby touch est prévu pour la rentrée de septembre pour réunir à nouveau les équipes. 

Le 28 avril dernier, 6 détenus ont participé à la finale du concours d’éloquence, organisé par la Conférence du Barreau de Bordeaux. « Les détenus ont su exprimer des choses complexes. Ils ont parlé de sensibilité, d’émotion et ont montré la possibilité de donner un discours construit, organisé autour de l’humain », précise Christine Maze. Ces ateliers seront reconduits les prochaines années pour continuer à « donner un autre regard sur la détention et dire qu’après les murs il y a la vie, la liberté ».


L’info en plus

Depuis le 14 mai dernier, le centre pénitentiaire de Bordeaux -Gradignan refuse les admissions de détenus, son taux d’occupation atteignant les 230 %, soit 822 détenus pour 439 places. Une première dans son histoire. Les personnes placées en détentions provisoires, sont principalement conduites vers Mont-de-Marsan et Pau. 

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1 Commentaire

Un commentaire

  • Franck, le 2/6/2023 à 09h19

    Tout compris. Bien que cela n’impacte aucunement des conditions de détentions inhumaines et que la privation de liberté devrait être la norme et non une pulsion de châtiment hérité d’une tradition archaïque, cela fait partie d une reconstruction de soi et de l’image de soi, un des leviers de la réinsertion. Bravo à tous les acteurs de ces différentes initiatives
    Il faut maintenant que cela s’inscrive dans la durée ce qui va être compliqué au vu des moyens matériels et humains de la pénitentiaire. Poursuivez vous êtes dans le « vrai ».


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