Bordeaux-Orly cloué au sol, des passagers inconsolables


L’interdiction de la liaison aérienne Bordeaux-Paris Orly, approuvée par la Commission européenne le 1er décembre 2022 et soumise à la consultation des Français, avant son examen par le Conseil d'Etat, est loin de faire l’unanimité des usagers.

La liaison aérienne Bordeaux-Paris Orly est désormais interdite.Pexels

La liaison aérienne Bordeaux-Paris Orly est désormais interdite.

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 16/03/2023 PAR Juliette Huard

Clouée au sol depuis le printemps 2020 en raison du confinement lié au Covid-19, la ligne Bordeaux-Paris Orly ne décollera définitivement plus. Avec l’ambition de lutter contre le dérèglement climatique, la loi Climat et résilience du 22 août 2021 prévoit en effet que les trois liaisons aériennes entre Paris Orly, Bordeaux, Lyon et Nantes sont interdites à toute compagnie aérienne, en raison de l’existence d’alternatives ferroviaires dont le trajet est inférieur à 2h30.

 « Cette interdiction de la ligne Bordeaux-Paris Orly représente 600 000 passagers en moins pour le territoire. Des entreprises s’étaient aussi installées autour de l’aéroport pour cette navette. Il y a un vrai impact », affirme Simon Dreschel, directeur général et président du directoire de l’aéroport de Bordeaux-Mérignac.

Comme lui, près de trois ans après la suspension de ces vols par les compagnies aériennes, la grande majorité des usagers de la ligne Bordeaux-Orly ne s’en remettent pas. C’est ce qui ressort de la consultation publique sur le projet de décret interdisant ces liaisons aériennes. En raison de contre-temps et de désaccord entre autorités françaises et européennes (qui ont leur mot à dire sur la question), cette consultation n’a été lancée que le 9 décembre 2022. Achevée le 10 janvier dernier, les 95 contributions à cette consultation ont été rendues publiques fin février.

Les usagers de la ligne Bordeaux-Orly grincent des dents

 La majorité des usagers de la ligne Bordeaux-Orly grincent encore des dents. D’autant plus que la consultation s’est tenue alors que des grèves sévissaient dans les rangs des cheminots, de quoi raviver des colères. « Dépendre de la SNCF, de ses grèves à répétition, de ses innombrables retards, de ses trains saturés est une punition pour tous ceux qui contribuent au développement économique et à l’emploi en Gironde », assène un contributeur. La ligne Bordeaux-Paris Orly étant principalement empruntée par des travailleurs.

« Si Bordeaux est à moins de 2h30 de Paris en TGV, ce n’est pas le cas depuis les communes environnantes comme Mérignac, après une heure sur la rocade aux heures d’embauche. Avec les grèves de la SNCF en ce moment, Bordeaux est à 6 heures d’autoroute. Encore une mesure pour faire plaisir à une poignée d’écolos parisiens qui pénalise les bassins d’emplois en Province et ne règle en rien les émissions de CO2 », rage un autre participant.

Le gain écologique d’une telle mesure sera vite dissipé dans la perte que nous aurons à multiplier les moyens de transport

En ce qui concerne les vols vers les DOM-TOM, historiquement au départ de Paris Orly, un contributeur bordelais pointe du doigt le parcours fastidieux pour atteindre sa destination finale : « De Bordeaux, il faut prendre le train en direction de Massy ou Paris puis rejoindre Orly. La liaison aérienne Bordeaux-Paris Orly n’existant plus. Sinon, il faut prendre l’avion à Toulouse. Le gain écologique d’une telle mesure sera vite dissipé dans la perte que nous aurons à multiplier les moyens de transport. »

Une mesure positive mais insuffisante

Tout de même, un certain nombre de contributions estiment que l’heure est à l’adoption de pratiques plus respectueuses de l’environnement tous domaines confondus. De nombreux participants s’accordent sur ce sujet pointant une mesure insuffisante, voire timide. « Ce projet est trop limité pour avoir un véritable effet. Il faut étendre la mesure aux trajets égaux ou inférieurs à 4 heures de train », propose un contributeur. C’est d’ailleurs ce que proposait la Convention citoyenne pour le climat, qui devait inspirer la Loi climat….

« Cette mesurette permettra d’analyser l’ensemble des conséquences et, peut-être poursuivre l’action en augmentant la durée du trajet aérien concerné à 6 heures et en développant parallèlement l’offre ferroviaire », suggère un participant. « Et les jets privés ? Il reste à nos législateurs encore beaucoup de chemin décarboné à parcourir… », souligne un autre contributeur.

Et pourquoi pas Bordeaux-Roissy ?

Tout est question de calcul. Afin de ne pas mettre en cause les vols en correspondance, le gouvernement a décidé de retenir non pas les trajets entre les centres-villes, mais la gare TGV de l’aéroport, au nord-est de Paris, pour le calcul du temps de trajet en train. Malgré la LGV vers Paris, Bordeaux (et Nantes) reste ainsi à plus de 2h30 de l’aéroport de Roissy. Le diable se cache dans le détail…

Suite à cette consultation, le projet de décret va être examiné par le Conseil d’État avant sa signature par Elisabeth Borne. Si la consultation du public enrichit le débat, « les commentaires recueillis ne remettent, à ce stade, pas en cause l’équilibre et la rédaction du projet de décret », avertit déjà pour sa part la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC). Ils entreraient cependant en compte dans l’évaluation de la mesure qui sera faite 24 mois après son entrée en vigueur. Elle sera également réexaminée avant tout éventuel renouvellement supérieur à trois ans.

L’aéroport de Bordeaux-Mérignac se veut « leader de la transition écologique et énergétique »

Pour Simon Dreschel, « l’interdiction de cette liaison aérienne est la démonstration que le monde change. Notre rôle, en tant qu’aéroport, est de s’adapter », appuie-t-il. Dans cette perspective, l’aéroport de Bordeaux-Mérignac s’engage à réduire ses émissions de gaz à effet de serre annuelles de 40 %. Pour ce faire, il souhaite mettre en place des actions permettant de développer des énergies décarbonées, produire 65 % d’énergies vertes et ainsi réduire sa consommation d’énergie de 20 %.

Aussi, l’aéroport se résout à créer des filières locales de biocarburants aéronautiques et d’hydrogène, et produire de l’énergie grâce à la géothermie et au photovoltaïque. Cela représente plus de 25 % de ses investissements. 

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