Banque et RSE : « Nous sommes à un moment de pivotement »


GRAND ENTRETIEN - A l'heure de toutes les transitions, Paul Carite, directeur général de Crédit Agricole Pyrénées Gascogne, détaille comment la Responsabilité Sociétale des Entreprises impacte les activités de la banque dans de multiples dimensions.

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Paul Carite, Directeur général de Crédit Agricole Pyrénées Gascogne également récemment nommé président de la filiale Crédit Agricole Transitions & Energies du Groupe Crédit agricole

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 24/06/2024 PAR Solène MÉRIC

Aqui ! : Aujourd’hui, la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est un incontournable du monde économique, beaucoup d’entreprises s’en réclament. Comment une banque et particulièrement la vôtre, le Crédit Agricole Pyrénées Gascogne (CAPG), s’empare du sujet ?

Paul Carite : Nous avons la particularité d’être nativement RSE. Du fait de nos origines, notre organisation mutualiste, notre ancrage sur le territoire, on faisait de la RSE sans le savoir ! Dans toutes les décisions que l’on prend, il y a en effet des grilles de lecture de bienveillance, d’humanité, d’aide au territoire, de respect de l’environnement.
En tant que banque autonome de plein exercice, nous avons la volonté d’être universel, ce qui est un critère RSE à part entière. On cherche à couvrir le maximum de besoins avec des offres de services dans l’immobilier, les assurances, l’énergie, la santé… en s’adressant à tous nos clients. C’est-à-dire, pour les particuliers, des CSP+ aux personnes plus fragiles, que nous accompagnons par une adaptation tarifaire et
la proposition d’offres permettant un accès facile d’usage et indispensable à moindre coût.
Le relationnel est aussi un point important de notre vision RSE, versus la banque transactionnelle. On s’occupe de tous les besoins du client, on l’accompagne dans le temps, et lui-même a un rôle prépondérant
dans cette relation avec nous.

@! : Mais la RSE, c’est aussi une vision de l’entreprise dans son environnement global (partenaires, territoires..) et pas uniquement vis-à-vis de ses clients ?

P.C. : Le Crédit Agricole est né il y a plus de 100 ans, d’agriculteurs qui ont décidé de créer une banque pour les besoins des agriculteurs, parce qu’ils n’arrivaient pas à trouver des financements bancaires. L’utilité au territoire, c’est donc aussi notre histoire. Cette organisation perdure dans notre gouvernance. Les agriculteurs, les représentants du monde socio-économique qui siègent dans nos conseils d’administration et qui représentent nos sociétaires, jouent un rôle fondamental dans la conduite de l’entreprise.

Diffuser notre RSE dans la RSE de nos clients

Dans la mise en œuvre de notre modèle, on travaille donc beaucoup l’utilité au territoire, au point qu’aujourd’hui, nous sommes à un moment de pivotement : du champ des services aux clients, on est maintenant aussi dans la réponse aux enjeux sociétaux de notre territoire.

@! : De quelle manière concrètement ?

P.C. : Agir en faveur de la RSE pour le territoire, c’est embarquer les trois grandes dimensions qui constituent le pacte sociétal du Groupe Crédit Agricole : la transition agri-agro, la dimension climat et énergie, et la dimension santé et territoire. Ainsi, la transition agri-agro, c’est accompagner nos clients agriculteurs ou de l’agroalimentaire, leur faire prendre conscience des enjeux. En tant que banquiers, nous considérons que nous avons de plus en plus de responsabilité d’aborder ces sujets. Par ailleurs, côté entreprises, on intègre d’ores et déjà des indicateurs ESG (critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) dans le dossier client et on demande, dans un esprit de concertation, à ce que le client s’engage, afin de les prendre en compte dans nos décisions.

Ce qu’il nous reste à faire c’est généraliser cette démarche à tout le monde. C’est une manière de diffuser notre RSE dans la RSE de nos clients, principalement les professionnels et les entreprises. Ainsi, on
s’assure nous-mêmes qu’ils sont bien engagés dans cette dynamique, aujourd’hui inéluctable. De plus, ça s’intègre dans la mesure de notre empreinte carbone en tant que banque.

@! : La banque devient donc influenceur de la politique RSE de ses clients ?

P.C. : Oui, c’est ce qui est intéressant en matière de diffusion de la RSE. Non seulement nous devons être exemplaires, avec par exemple, un porte-feuille crédits qui soit exemplaire ou encore, en interne, sur la mixité des collaborateurs et collaboratrices – on y est résolument engagé – mais nous considérons que nous avons la responsabilité de convaincre nos clients d’ « une transition juste », c’est à dire inclusive, afin que chacun des acteurs économiques clients de CAPG puisse faire son chemin et accélérer sa transition.

En tant que banquier, on fait du circuit court monétaire: nos clients épargnent ici pour prêter ici

De la même manière pour les particuliers, avec notre plateforme « j’éco-rénove mon logement ». Nous les guidons sur les mesures rapides qu’il peuvent prendre pour être plus frugaux en énergie, par exemple.
Mais sur cette plateforme, le particulier va aussi découvrir toutes les aides de l’Etat dont il pourra bénéficier, et nous pourrons le mettre en relation avec les diagnostiqueurs et professionnels pour l’aider dans sa démarche.

@! : C’est une nouvelle manière d’envisager le métier de banquier ?

P.C. : En 2021, nous avons lancé notre projet d’entreprise que l’on a appelé Impact. Son objectif est de faire prendre des orientations à notre entreprise mais aussi de mesurer que le résultat que l’on recherchait est bien atteint, que l’action de nos 2300 collaborateurs a bien un impact sur le territoire.

Si je dois un peu simplifier notre métier de banquier, on fait du « circuit court monétaire » : nos clients épargnent ici pour prêter ici. Nous sommes le maillon intermédiaire entre l’épargne des clients et les besoins d’accompagnement de projets. D’ailleurs, Crédit Agricole Pyrénées Gascogne a été avant-gardiste en créant un livret sociétaire. Cette épargne est fléchée pour financer des projets locaux. Ça représente plus d’un milliard d’euros, c’est significatif !

L’énergie renouvelable, cela fait en effet partie des grandes initiatives de transitions de la Caisse régionale

Autre expression de la RSE au sein de la Caisse régionale, notre Fondation d’entreprise Crédit Agricole Pyrénées Gascogne est particulièrement active. Tous les ans, par le biais de ce mécénat, nous donnons aux associations locales entre 1,7 et 2 M d’euros. En 2023, 1,8 M euros ont été distribués à plus de 700 projets portés par les associations autour des thématiques de l’insertion sociale, de l’économie et de l’innovation, de la culture et du patrimoine, et enfin, des jeunes.

@ ! : Vous disiez que la Caisse est avant-gardiste sur plusieurs sujets. c’est le cas avec les énergies renouvelables. A propos de d’évolution du métier, le CAPG est devenu de manière un peu inédite énergéticien ?

P.C. : Cela fait en effet partie des grandes initiatives des transitions de la Caisse régionale. C’est un sujet sur lequel se lance aujourd’hui le Groupe Crédit Agricole. Nous, nous y sommes depuis 2009. Nous sommes la seule Caisse régionale à produire de l’énergie avec à peu près 1700 points de production pour une production électrique équivalente à la population des Hautes-Pyrénées et du Gers additionnées ! C’est du photovoltaïque, de l’hydro électrique, de la méthanisation… et prochainement la géothermie. La majorité des centrales photovoltaïques sont installées sur des exploitations agricoles et génèrent des revenus complémentaires opportuns pour les agriculteurs.

En tant que leader et pionnier, nous accompagnons les autres caisses régionales, on vient de créer une filiale avec Crédit Agricole d’Aquitaine et au niveau groupe Crédit Agricole, on a créé la filiale Crédit Agricole Transitions & Energies, que je préside. Cette société -à 800 M d’euros tout de même- vise à faire monter les 38 autres caisses régionales à notre niveau. Elle s’adresse à toutes les clientèles, particuliers et professionnels, et sur toute la chaîne de valeur, du conseil à la commercialisation de l’énergie en passant par le diagnostic, l’évaluation du projet, et la production. On est même certifié agrégateur, c’est à dire que l’on peut envoyer la production dans le réseau électrique français. A travers ma présidence, c’est bien Crédit agricole Pyrénées Gascogne et sa capacité à innover qui est reconnue !

@! : Vous avez évoqué un axe santé dans la stratégie RSE … qu’en est-il précisément ?
P.C : On entre là dans un nouveau domaine, un vrai enjeu sociétal, avec l’ambition d’amener la santé dans la ruralité, de s’occuper de nos aînés et d’arriver à irriguer partout sur le territoire, y compris les secteurs les plus reculés. Nous allons ainsi étudier des projets sur les problématiques d’accès à la santé pour tous, à la télémédecine… La filiale Santé et Territoires créée au niveau national se structure, mais la Caisse régionale prendra d’ores et déjà des initiatives d’ici la fin de l’été.

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