Aurore, maraîchère bio «à l’écoute de la société»


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 14/04/2017 PAR Matthias Hardoy

Voilà plus de quinze ans qu’ils se sont lancés dans le maraîchage, et plus particulièrement dans la production de légumes. Aurore et Philippe Sournac sont issus de familles d’agriculteurs mais n’ont pas hérité de terres. A l’orée de l’an 2000, ils ont acheté un terrain situé chemin de Langlet à Eysines et ont décidé de construire leurs serres eux mêmes. Dix-sept ans plus tard, ils ont réussi à survivre et sont passés de l’agriculture conventionnelle au bio. Leur passion pour leur métier est intacte. Il faut dire qu’ils ont «conscience d’exercer une  noble mission: celle de nourrir les hommes»

Preuve qu’économiquement, tout ne vas pas si mal, l’exploitation d’Aurore et Philippe Sournac emploie aujourd’hui 5 salariés à temps plein. Basculer vers le Bio via le système des AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) au courant des années 2000 a été une idée plus que judicieuse. Les AMAP, sont rappelons le, des associations qui regroupent des consommateurs en lien direct avec des producteurs locaux. Ces  »circuits courts » permettent aux agriculteurs d’être bien mieux rémunérés que dans le  »circuit traditionnel » de la grande distribution. Aurore Sournac avoue qu’elle ne ferait pas machine arrière, même si «produire pour les Amap a aussi ses difficultés». Contrairement au traditionnel, dans un circuit court, il faut produire varié pour ne pas lasser les consommateurs qui viennent chaque semaine récupérer leur panier. Selon la maraîchère, il faut être «très bon techniquement pour produire de façon diversifiée, il faut aussi trouver du personnel ultra-compétent qui accepte de travailler dur, et de faire des tâches nombreuses et différentes pour chaque type de légumes produits».

D’Henri IV aux néo-ruraux des années 2000

Eysines et ses alentours sont des terres de maraîchage depuis au moins Henri IV. Dans les années 1980, une grande crise menace de mettre fin à cette grande Histoire. La pression immobilière et les difficultés financières poussent de nombreux maraîchers à vendre leurs terres à de grandes entreprises du BTP. Le maraîchage ne fait alors plus rêver. A la fin des années 2000, les choses vont changer. Les idées écologistes commencent à infuser la société et face au réchauffement climatique, les hommes et femmes politiques girondins trouvent que le développement de « cette ceinture verte » maraîchère autour de Bordeaux peut être une belle piste d’avenir. Aurore et Philippe Sournac voient alors débarquer, peu à peu, des  »néo-ruraux » à la recherche de sens et d’une nouvelle vie. La cohabitation n’est pas toujours facile, comme nous l’explique Aurore Sournac: «Ils sont arrivés avec une vision en partie fantasmée de l’agriculture. Ils avaient énormément d’idéaux, de principes moraux. Ce qui n’est pas mal en soi mais certains avaient beaucoup de difficultés à écouter les agriculteurs en place. Il y avait même un mépris parfois pour les agriculteurs qui faisaient du traditionnel! » Peu à peu, pas mal de ces nouveaux agriculteurs ont compris qu’ils avaient à apprendre de maraîchers beaucoup plus expérimentés qu’eux. Le dialogue a pu alors s’installer.

Créer un lien de confiance avec les citoyens 

«On a pu leur paraître rude au départ mais on a essayé de leur faire prendre conscience des difficultés du métier. Ces gens en reconversion professionnelle ne peuvent par se permettre financièrement un échec. Gérer des serres même Bio, c’est plusieurs métiers en un. C’est être à la fois chef d’entreprise, agriculteur, agronome, comptable; il faut être prêt à cela!» constate la maraîchère eysinaise. Les futurs  »néo-ruraux » qui viennent la voir sont moins «naïfs». Elle leur conseille néanmoins de faire des stages auprès d’agriculteurs avant se lancer pour « être sûr de faire le bon choix». Aurore Sournac fait alors preuve de pédagogie.

« Pédagogie», un mot qui résume bien l’approche des Sournac qui ne cessent d’expliquer leur métier à leurs clients ou aux politiques locaux. Selon Aurore Sournac, « avant, la plupart des gens avaient un agriculteur dans leur famille. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il n’y a plus de lien direct à la terre, il faut ré-expliquer l’importance des saisons par exemple ». Il faut dire que la grande distribution qui propose des fruits et légumes toute l’année a contribué à dérégler  »l’horloge interne » des consommateurs. Pour remédier à cette situation, les Sournac ouvrent régulièrement leur porte aux membres des Amap, afin de leurs montrer comment la production de légumes se fait. Une ouverture récompensée, puisque il y a quelques années, lorsque la grêle avait détruit 90 % de leur exploitation, ils avaient pu compter sur l’aide de leurs consommateurs fidèles. Le «lien de confiance»,  c’est ce que tissent peu à peu grâce au circuit court les producteurs qui n’arrivaient plus à trouver une place valorisante dans le système traditionnel.

Ne pas rester dans sa bulle

Pour espérer perdurer, il faut selon Aurore Sournac ne pas avoir peur de se remettre en question : « Il ne faut pas que les agriculteurs restent dans « leur bulle »; il faut aussi parfois entendre les critiques constructives des citoyens. Il faut être à l’écoute de la société!» déclare-elle comme « un mantra ». Comprenant que les aquitains passent de plus en plus de temps dans les transports, les Sournac ont par exemple mis en place un distributeur de légumes près du parc-relais du Tram à Ravezies. Moyen habile d’atteindre des clients qui n’ont pas le temps et ni forcément l’envie de s’engager dans une Amap. Si Aurore et Phlippe Sournac sont contents de l’attrait pour «la ceinture verte» d’élus locaux dont la maire d’Eysines, Christine Bost, ils espèrent avoir leur mot à dire dans les évolutions de la métropole. « C’est super de vouloir mettre du vert et du bio dans la Ville, de vouloir remettre en activité les terres maraîchères, mais il ne faut pas oublier de faire ces changements avec nous!» affirme avec force la maraîchère.

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