Gouvernement vs Collectivités locales: rassurer n’est pas convaincre


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Publication PUBLIÉ LE 07/09/2017 PAR Solène MÉRIC

Fin août début septembre, le Premier Ministre et le Président de la République ont du voir déferler nombre de lettres de la part d’élus locaux et départementaux quant aux diverses annonces et décisions prises concernant le sort des collectivité locales. En Gironde les prises de paroles ont d’ailleurs sur ces divers sujets été nombreuses. La venue de la ministre au discours « franc et sans langue de bois », de l’aveu même de nombre de ses auditeurs ce mercredi, aura eu le mérite de calmer au moins en partie, certaines de ces inquiétudes.
Concernant les dotations aux collectivités, qu’il s’agisse de la Dotation Générale de Financement (DGF) ou des dotations d’équipement des territoires ruraux, le message de la Ministre a été clair « il n’y aura pas de baisse, les dotations resteront au même niveau que l’an dernier. Concernant la DGF, c’est même la première fois en 4 ans qu’elle ne subira pas de ponctions ».
Quant aux 300 M€ d’économies annoncées, elles proviennent des « fonds de tiroirs des fonds déconcentrés non utilisés » qui sont remontés au niveau national en fin d’exercice, et ne seront pas redistribués les années suivantes, puisque non utilisées au cours de l’année. « D’où l’intérêt de toujours utiliser au maximum les fonds déconcentrés », glisse-t-elle, avant de se faire confirmer par le Préfet de région, qu’en Gironde, « il y a quasiment pas eu de remontées ». Comprendre donc que dans le département, les fonds déconcentrés esteront au même niveau, ou presque.

Taxe d’habitation: l’Etat se substituera au contribuableSur la promesse électorale du Président de la République de supprimer la taxe d’habitation pour près de 80 % des contribuables, là encore, Jacqueline Gourault veut apaiser les craintes des élus qui lui font face : « sur la taxe d’habitation, les communes toucheront le même produit qu’attendu, car il ne s’agit pas d’une suppression de la taxe d’habitation, mais d’un dégrèvement progressif pour le contribuable _ de 30%, 60% puis 100% en 3ans_ auquel l’Etat va au même rythme se substituer », assure-t-elle.
Pour autant, si les dotations sont maintenues, l’impératif d’économies l’est également insiste la Ministre rappelant que les 300 plus grandes collectivités représentent 80% de la dépense publique. Ce sont donc elles « cibles » principales du Gouvernement. « L’idée n’est pas de dépenser moins que l’an dernier, car on sait bien qu’il y a une dynamique des dépenses mais de ralentir la courbe des dépenses de fonctionnement ». Une idée que les Préfets auront pour mission de contribuer à mettre en œuvre en passant des pactes d’économies avec les grandes collectivités de leur département.

Emplois aidés: « drame humain » et « détérioration du service public »Autre point de crispation des élus présents ce mercredi à Montussan : la disparition annoncée des emplois aidés, tant sur le contenu de la mesure que sur « la brutalité de son annonce par le Gouvernement ». Sur le fond, ils sont en effet plusieurs à avoir pointé d’une part les « drames humains auxquels le non renouvellement de ces contrats expose les personnes concernées », et d’autre part, du point de vue des collectivités, « les risques importants de dégradation de service public, après la disparition de ces emplois ». Une inquiétude qui concernen particulièrement les écoles dont beaucoup « tiennent » grâce à la présence de personnels embauchés via ces contrats. En la matière le malaise est grand pour les élus des petites communes rurales.

Concédant que, sur la méthode, « il aurait sans doute fallu plus d’explications et plus d’étapes dans l’annonce », Jacqueline Gourault a relayé auprès des élus girondins deux annonces gouvernementales faites la veille. D’abord, la préservation de deux secteurs prioritaires que sont l’éducation et « plus particulièrement l’accompagnement des enfants handicapés » et « l’urgence sanitaire et sociale », ainsi que deux secteurs géographiques : l’outre-mer et les communes rurales, « et notamment celles les plus en difficulté sur le plan financier. » En d’autres termes, un traitement au cas par cas, assurés par les Préfets. Une solution par ailleurs temporaire, en attendant les résultats et les propositions de la mission confiée en la matière par Emmanuel Macron à Jean-Marc Borello, fondateur du groupe SOS ( et par ailleurs soutien de la première heure de sa campagne électorale ).

« Où l’Etat trouvera-t-il 20 Mds € de la taxe d’habitation? »Si la ministre sera au total sans doute parvenue à rassurer en partie les élus venus la rencontre, pas sûr qu’elle les ait pour autant convaincu bien qu’elle ait insisté sur la relation très régulière mise en place entre le Gouvernement et les grandes associations d’élus qui les représentent. Des élus sceptiques, dont Christine Bost, première vice-présidente du Département de la Gironde en charge des territoires, et maire d’Eysines, qui a eu l’occasion d’échanger avec la Ministre lors de la réunion. « Pas de baisse des dotations, une taxe d’habitation compensée… sur certains points son intervention peut paraître rassurante. Mais tout ça, évidemment, va avoir un coût. Sur l’exonération de la taxe d’habitation dont l’Etat prendrait le relais, ça équivaut à un poids financiers de 20 Mds € sur trois ans. Elle ne m’a pas répondu quant à savoir où et comment l’Etat compte les trouver… De plus en ce qui concerne les économies sur les dépenses de fonctionnements que la ministre nous encourage à faire, cela fait déjà quelques années que nous travaillons dessus, nous allons commencer à arriver à l’os… ! »
Sur la questions des emplois aidés, le désaccord persiste. Au-delà des difficultés pointées pour les personnels et l’organisation des services rendus par les collectivités, la maire d’Eysines souligne aussi les difficultés pouvant être causées par la disparition de ces emplois aidés au sein des associations. « Avec la mise en place des « nouveaux » rythmes scolaires il y a 5 ans, on a fait appel pour la mise en place des Temps d’Activités Périscolaires à des associations qui se sont notamment  organisées via les emplois aidés pour pouvoir assumés ces TAP. Demain que se passe-t-il si les emplois aidés disparaissent ? soit on baisse la voilure de la capacité d’accueil, soit on arrête… Et si on ne fait rien, un grand nombre des activités culturelles et sportives vont être captées par le secteur privé, dont les politiques tarifaires n’induiront pas nécessairement la mixité sociale». Et son homologue de Lormont, Jean Touzeau, d’être pour sa part très critique sur « l’absence d’évaluation sérieuse des dispositifs en place avant de les détruire », et d’appuyer pour sa part : « remettre en cause les emplois aidés au sein des associations, c’est remettre en jeu un fragile équilibre au sein des territoires de politique de la ville », s’agace-t-il.

Au total, si l’incendie de la discorde entre gouvernement et collectivités locales pourra peut-être pour un temps apparaître circonscrit, l’intervention courageuse de la ministre n’aura pour autant semble-t-il pas permis de l’éteindre réellement.

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