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L'ÉDITO

 par Joël AUBERT Joël AUBERT
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19/03/2017

Un livre dans la campagne: Quand Cayrol décrit  » les raisons de la colère »

Cayrol, sans en abuser, rappelle à ce sujet quelques unes des phrases des occupants de l'Elysée ou de Matignon qui finiraient par exonérer François Hollande de cette fameuse promesse sur l'inversion de la course du chômage tant il y eût, au fil des ans, de Pompidou à lui-même, en passant par Giscard et Mitterrand, sans oublier Balladur ou Sarkozy, une manière de litanie destructrice de la confiance citoyenne. L'auteur n'oublie pas, non plus, de puiser dans le copieux héritage du bréviaire idéologique qui explique, encore et toujours, cette singularité française d'un clivage gauche-droite puissant et d'une bipolarisation qui rendraient impossible tout compromis. Et cela vaut le détour, de Léon Blum à François Mitterrand que nous entendons encore, fidèle à une doctrine qui n'était culturellement pas la sienne, se convertir à l'idée de la nécessaire rupture avec le capitalisme pour prendre le pouvoir, à la tête du nouveau parti socialiste...Avant de devoir opérer le virage que l'on sait , deux ans après son triomphe de mai 1981.

Mais, en ces heures où l'idée d'une VI° République est en mesure de réunir plus de 100.000 personnes dans les rues de Paris à l'appel de la France insoumise, chère à Jean-Luc Mélenchon, il faut entendre ce que nous souffle un observateur aussi averti et au fait de toutes les études qui décrivent les attentes profondes des Français. D'abord ceci, et nous l'évoquions ici-même il y a une semaine le besoin absolu de rééquilibrer nos institutions. Le résumé qu'en offre Roland Cayrol vaut d'être cité : «  Constitution hybride mais instituant ( hors cohabitation) la primauté du pouvoir présidentiel, élection présidentielle au suffrage universel à deux tours avec deux candidats au second tour, quinquennat et calendrier organisant la primauté de la présidentielle sur les législatives, mode de scrutin majoritaire uninominal à deux tours pour les députés: tout concourt, dans notre régime, à un système fortement déséquilibré où le président est un maître du jeu absolu. On est à l'évidence allé trop loin dans le balancier entre les pouvoirs, on a oublié les poids et contrepoids chers à Montesquieu «  Et de citer l'auteur de l'Esprit des Lois: « Pour qu'on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir »

Pour autant faudrait-il renoncer à élire, nous-mêmes, le président de la République? Certes pas et l'auteur de rappeler que, sondage après sondage, les citoyens répondent qu'ils sont attachés à cette élection directe au point de continuer à y voter en nombre ( sera- t-on toujours dans ce cas de figure le 23 avril? ). Renonceraient-ils pour autant à croire à l'importance d'un Parlement qui jouerait pleinement son rôle plutôt que d'être relégué trop souvent à celui de godillot ? Point du tout, au contraire les Français attendent un Parlement qui travaille et les représente ; d'ailleurs aux yeux de Cayrol « leur bienveillance à l'égard de la cohabitation aurait répondu à « une transposition au sein de l'exécutif de la balance des pouvoirs ». Enfin, l'auteur faisant référence aux sondages, souligne que les citoyens de ce pays sont en attente de l'instauration de la représentation proportionnelle, souvent promise et jamais mise en œuvre, un mode de scrutin qui marche ailleurs en Europe, à commencer par l'Allemagne et qui « nécessite d'apprendre la culture du compromis » Et à ceux qui lui objectent que la V° République ne serait plus la même, Roland Cayrol ne craint pas de se réjouir de pareille perspective, considérant qu'il vaudrait sans doute mieux qu'une formation qui récolte quelques 25% des suffrages – le FN – puisse être vraiment représentée au Parlement plutôt que d'en être de fait exclu. Et d'entonner, ainsi, l'air de la victimisation... Pareille évolution repose évidemment sur la certitude que le FN ne trouverait guère d'alliés dans une assemblée républicaine. Une conviction très ancrée chez l'auteur des « raisons de la colère » qui, force sondages, reste par ailleurs persuadé que les Français ne se risqueront pas à élire une Marine Le Pen. En tout cas son vainqueur, si l'hypothèse de sa présence au second tour devait se confirmer, ne devra pas renouveler l'erreur de Jacques Chirac en 2002 qui n'avait aucunement tenu compte du soutien massif de la gauche pour l'emporter face à Jean-Marie Le Pen mais au contraire « constituer une équipe gouvernementale qui rompe avec une vision rétrécie de l'action politique ».

1. Les raisons de la colère, l'élection de la dernière chance (Grasset)

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